10/18
Domaine étranger
Traduit du japonais par Hélène Morita et Théodore Morita
Paru en Juin 2008
229 pages
7,40 euros
Quatrième de couverture: Dans un bar, Mari est plongée dans un livre.Elle boit du thé, fume cigarette sur cigarette. Surgit alors un musicien qui la reconnaît. Au même moment, dans une chambre, Eri, la s?ur de Mari, dort à poings fermés, sans savoir que quelqu'un l'observe. Autour des deux s?urs vont défiler des personnages insolites : une prostituée blessée, une gérante d'hôtel vengeresse, un informaticien désabusé, une femme de chambre en fuite. Des événements bizarres vont survenir : une télévision qui se met brusquement en marche, un miroir qui garde les reflets...A mesure que l'intrigue progresse, le mystère se fait plus dense, suggérant l'existence d'un ordre des choses puissant et caché. Le temps d'une nuit, Haruki Murakami nous entraîne dans un Tokyo sombre, hypnotique, aux prémices d'un drame.
Lu dans le cadre du club de lectures sur le thème "Visions nyctalopes" à savoir plus précisément un livre dont l'action se déroule la nuit, j'ai choisi Le passage de la nuit de cet auteur bien connu, de renommée internationale. Après Kafka sur le rivage, Le passage de la nuit renoue avec ce qui fait l'originalité de l'auteur. Entre onirisme et réalité, Haruki Murakami nous propulse en plein coeur de Tokyo pour admirer le spectacle de la nuit. Mari est assise dans un bar et a décidé de passer la nuit à lire, fumer et boire du thé. Mais un jeune musicien la reconnaît et vient lui tenir un brin de causette. De fil en aiguille, au fur et à mesure que la nuit avance, Mari va faire la rencontre d'un monde nocturne qui réserve une part sombre de l'humanité: une prostituée chinoise qui s'est fait violentée, la gérante d'un love hôtel...Au même moment, sa soeur aînée Eri dort d'un sommeil presque comateux. Dans sa chambre, rien ne bouge, tout est silencieux. Mais on peut l'observer à travers une caméra "suspendue dans l'air". Cette caméra est flexible et change les prises de vue...Eri dort encore mais son lit est dans un écran de télévision.
C'est toujours frustrant de lire une oeuvre d'Haruki Murakami, on ne saisit jamais le sens caché des choses, des situations fugitives qu'il met en place et néanmoins d'une inquiétante étrangeté. Le surnaturel et le fantastique sont étroitement imbriqués dans l'intrigue à côté de personnages quotidiens. Le passage de la nuit a cette particularité de l'effet filmique. Le lecteur est spectateur, il voit double. Entre Mari et Eri, il y a un univers indéchiffrable mais pourtant lié. Comme toujours, l'interprétation reste personnelle tant le roman est intimiste. La nuit est le théâtre d'une acuité bizarre: la télévision se met en route toute seule, un homme observe Eri, un miroir qui garde les reflets. On évolue dans un univers kafkaien, empreint de poésie au sein de la ville. L'auteur nous entraîne au fil de son histoire dans les mystères et les secrets d'un monde interlope, intrusif mais en même temps fascinant et marginal. Seule l'écriture d'Haruki Murakami a ce don de nous emporter jusqu'à cet inconnu, là-bas au confluent du temps et de l'espace...
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