En Europe et aux Etats-Unis, l'artiste provoque pourtant d'autres frissons. Comme en cette journée de mars 2008, dans la salle des enchères de chez Christie's à Londres, qui
voit s'envoler le prix de son tableau "Battle of Ganga and Jamuna". Pour la première fois, l'œuvre d'un peintre indien s'arrache à 1,6 millions de dollars. Une bagatelle sur le marché de
l'art, mais un exploit pour l'art contemporain asiatique.
Husain habite aujourd'hui entre Dubai et Londres. Il se tient à distance de l'Inde mais exprime souvent
son désir de retour. La Cour Suprême a pourtant suspendu son mandat d'arrêt contre lui et le jugement qu'elle a rendue en 2008 était très clair. Le juge de la Cour Suprême est même allé assez loin en étendant les
limites de ce qui est permissible en Inde en déclarant: "La nudité et le sexe ont une place d'honneur dans l'art et la littérature. Dans le pays du Kama Sutra, pourquoi se détourner même de
son nom? La beauté réside dans les yeux du spectateur. Dans la tradition indienne, le sexe a été conçu comme une partie intégrante d'une vie pleine et complète. Il est fort regrettable qu'un
nouveau puritanisme émerge au nom d'une pureté culturelle de l'Inde et qu'une foule de gens ignorants vandalisent l'art et nous poussent vers une ère
pré-Renaissance."
Le film « Meenaxi ; a tale of three Cities » a été retiré des cinémas après que des organisations musulmanes protestent contre une des chansons du film. Le conseil des Ulemas de l'Inde proteste contre la chanson Qawwali ‘Noor-un-Ala-Noor’. La chanson contient des mots issus du Coran et serait donc un blasphème.
La communauté artistique l'a soutenu. Krishan Khanna (autre peintre indien connu), Syed Mirza (réalisateur et producteur indien), Nafisa Ali (actrice indienne) et M K Raina ont protesté contre la campagne contre lui. D'autres ont été plus critiques comme Satish Gujral ou Chandran Mitra. L'État communiste du Kerala lui a accordé le prix Raja Ravi Varma pour son œuvre.
Il y a quelques jours le Qatar lui a offert la nationalité qatarie et le peintre n’a pas encore fait connaître sa décision ; fatigué par toutes les attaques dont il est l’objet en Inde (plus de 900 actions en justice contre lui), le vieil artiste hésite. Mais comme l’Inde ne reconnait pas la double nationalité, les Indiens risquent aujourd’hui de perdre l’un de leur plus grand artiste.