Enfin…
J’ai enfin vu "Midnight Meat Train" de Ryûhei Kitamura d’après une œuvre de Cliver Barker en personne. J’ai raté le film à sa sortie (problème de distribution) et je piaffais de le voir en dvd tant j’avais lu de critiques et chroniques élogieuses. Et c’est vraiment un truc de dingues comme on en voit que très rarement.
L’histoire est une et multiple à la fois. Il ne s’agit pas d’une histoire de tueur en série de plus. Le scénario est assez astucieux pour nous réserver un final incroyable et le spectateur se rend compte qu’il a été mené en bateau.
Sans trop en dévoiler je peux tout de même vous dire que tout le récit obéit à une pure logique. Ces meurtres ont un sens, un but. Les motivations du tueur sont à l’origine d’un cycle de vie et de mort qui se perpétue dans le temps. Le long métrage prend de la hauteur et dépasse la simple boucherie. Le film ne nous dévoile qu’une partie de ce grand dessein. Le spectateur sent la touche particulière apposée par Clive Barker, également producteur du film.
Le film est efficace car le metteur en scène a un sens du rythme. Il a su trouver un juste équilibre entre les séquences souterraines dans le métro de New York et les scènes de surface qui permettent aux protagonistes de se faire face. Le photographe d'art (Bradley Cooper) et le boucher (Vinnie Jones) jouent à un étrange jeu du chat et de la souris.
L’ambiance est très prenante. Nous plongeons dans un univers glauque limite poisseux. Le sang nous colle à la peau. A mesure que le "Midnight Meat Train" avance le climat se fait de plus en plus pesant. Le photographe qui est plutôt au départ un personnage sensé, glisse progressivement vers l’abîme, la faute à une quête obsessionnelle sans fin.
Sur le plan formel le long métrage est bâti sur une opposition permanente entre la clarté et l’obscurité. Les différents jeux de lumière accentuent la lourdeur des lieux. Le métro est l’endroit où éclatent ces oppositions. Les couloirs des stations, les quais, les rames sont gorgés de lumières artificielles vives alors que dans les tunnels règnent les ténèbres.
Les caméras sont en perpétuel mouvement. L’impression de vitesse grandissante se fait jour au fil des minutes tant elle semble saisir les protagonistes entraînés vers leur funeste destin.
Mais "Midnight Meat Train" est avant tout un film d’horreur qui nous en donne pour notre argent. Le boucher tueur massacre à grand renfort d’hémoglobine qui gicle. Des têtes sont fracassées allégrement, des membres sont coupés sans autre forme de procès. Le réalisateur trouve le moyen de rendre chaque séquence dissemblable. Tous les moyens sont bons et sont effectivement employés. Des passages où le rythme de l’ensemble s’accélère. Pas de discussions inutiles. Ca tranche dans le vif si j’ose dire.
Les effets spéciaux dédiés aux scènes les plus crues sont réellement de qualité. Les prothèses corporelles sont sacrément bien foutues.
Le film évoque certaines productions ultra gore des années 80. La réussite de "Midnight Meat Train" est de nous proposer un déroulement certes prévisible mais étonnant dans sa forme. Le metteur en scène met en place avec efficacité différents éléments qui s’avèrent payants. La descente aux enfers du personnage principal est étonnante dans sa construction et sa conclusion.
Le choix du réalisateur de centrer son propos sur quatre ou cinq personnages pas plus, et sur un duel à distance entre deux hommes que tout oppose, est judicieux. Ainsi nous pouvons considérer, et Ryuhei Kitamura est explicite dans la forme, que le reste des personnes que nous croisons ne constitue que de potentielles et futures victimes, de la simple viande à suspendre à des crochets de boucher dégoulinants de sang.
Bradley Cooper est excellent dans un tel rôle de composition. Pendant une heure trente, le film a un rythme très soutenu, nous le voyons perdre pied physiquement et mentalement.
Qui d’autre que Vinnie Jones pouvait incarner une figure aussi charismatique que ce boucher meurtrier ?
A mon avis personne. J’ai eu l’occasion de vous affirmer que l’acteur gallois me passionnait et franchement Vinnie Jones a vraiment une gueule de tueur. Dans "Midnight Meat Train" il impose sa carrure de déménageur, une mâchoire serrée prête à mordre et un regard déterminé comme j’en ai rarement vu au cinéma. Au milieu de cette testostérone qui suinte nous retrouvons la jolie Leslie Bibb qui demeure la seule parcelle d’humanité dans cet univers barbare de sang et de larmes.
"Midnight Meat Train" est un film très agréable à regarder. La construction est efficace, le jeu d’acteurs est dynamique. Mais surtout l’élément qui retient le plus l’attention est le propos plus complexe qu’il n’y paraît de prime abord. Le travail d’écriture prend tout son sens ici.
En extrait l'un de mes passages préférés.
Video de samom78