Vendela Vida et Dave Eggers.
Vous les connaissez. Le duo a écrit le scénario du film Away we go de Sam Mendès alors que le couple attend un premier enfant et s'interroge...
VENDELA: I think one of the challenges of being a parent is—
DAVE: …is trying not to say “one of the challenges of being a parent.”
Eggers a aussi écrit le scénario de Max et les Maximonstres, de Spike Jonze : "Le cinéma donne souvent une vision édulcorée de l'enfant. Il lui dénie sa folie, il l'assagit à l'excès", dit-il.
En réalité, si vous les connaissez par ce biais, ce n'est pas mon cas.
Je ne vais plus au cinéma depuis 2 ans, non pas parce que je suis claustrophobe mais parce que je le suis peut-être.
Il y certainement un meilleur terme pour qualifier la crainte d'être coincé quelque part. C'est le problème avec les ballades en montagne. Il y a de fortes chances pour que je ne puisse pas changer d'avis au bout d'une heure. Je pourrais sortir de la salle. Peut-être pas suffisamment rapidement.
Mais je lis. Pas encore la version plébiscitée de Max et les Maximonstres, ni le nouveau roman d'Eggers Le grand quoi, prix médecis étranger 2009.
Les romans d'avant.
Soleil de Minuit, de Vendela, m'a donné une leçon de vie. Laquelle ? Il faut lire le bouquin. C'est rare qu'un livre qui me semblait assez anecdotique sur le coup m'aide à me diriger.
Deux rennes avant. Je veux dire DORENAVANT.
"vous, ça ira ?
Je lui ai dit que j'irais très bien dorénavant.
[elle est américaine, lui Lapon]
- Qu'est-ce que ça veut dire, deux rennes avant ?
- A partir d'aujourd'hui ?
- Jusqu'à quand ?"
C'est une bonne question, quand on va mieux : jusqu'à quand ?
Elle dit aussi d'un garçon "son odeur me rappellait celle d'un hamster que j'avais eu dans le temps".
Ca me laisse sans voix, personne ne sait quelle est l'odeur d'un hamster ni si c'est bien pour un garçon de sentir le hamster.
Katherine Pancol elle décrit les choses comme ça : "le teint d'un champ de navets, des cernes mauves et marron, le cheveu essoufflé et le dos en zigzag"
Je dis Pancol car dans ma boite on se refile ses bouquins. Club de lecture de consultants : "t'as lu le Pancol ? c'est tellement drole".
"Une femme vient de rompre, elle entend les pas de son amant dans la cour, les pas s’arrêtent. Vous pouvez écrire : «Elle plongea dans l’enfer des supputations et des conjectures.» Mais ce n’est pas une phrase de roman. C’est de la phrase molle, abstraite, vous avez beau y mettre le mot enfer, ça ne trompe personne. Vous n’avez pas fait le boulot. Le boulot, depuis Stendhal, depuis Tolstoï, c’est produire la scène qui va faire dire au lecteur que ce qui arrive est infernal." Hedi Kaddour.
Un teint de navet, ça ne trompe personne. Une odeur d'Hamster qu'on a possédé, c'est mystérieux.
Soleil de minuit raconte l'histoire de Clarissa, traductrice. Elle regarde un dessin animé en Laponie, à la télé, dans sa chambre d'hôtel.
"Le synchronisme entre le mouvement des lèvres des ours et le doublage était impressionnant. Le finnois était apparemment la langue maternelle des ours".
Les animaux dessinés ont aussi une langue maternelle, je n'y avais pas pensé.
Katherine toujours "Quand on écrit, on ne s'économise pas. On donne tout à n'importe quelle heure du jour et de la nuit. Alors faut-il s'économiser et privilégier la vie, la vie réelle ? Ou ne pas compter et tout donner ? Le hic, c'est qu'on n'a pas vraiment le choix. Si on veut que ça "sonne", que ça "sonne plein", il faut donner, donner… Et tant pis, si on puise directement dans ses forces vives tout le temps sans compter…"
Comme les lofteurs et les slalomeurs elle croit qu'elle donne, qu'elle se donne, pour son art.
Fédor : "J'ai tout donné". De Leon, son éditeur dirait "Il a tout donné".
Pas que dans mon entreprise, Miss Pancol. Je suis capable de me faire les ongles devant un téléfilm. Mais ne rien faire d'autre que se plonger dans des mots idiots et des histoires déjà pensées, what for ?
J'admire tout de même les gens qui arrivent à écrire de mauvais romans. Ca demande autant de travail je pense qu"il soit bon ou mauvais le livre. La célébrité de l'écrivain est plus que précaire et le rapport boulot / bénéfices défavorable. Admirons leur foi.
OK moi aussi j'encombre, le réseau. Mais quelle entreprise modeste. J'abats pas des arbres.
La prochaine fois, Dave.