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Un livre tout en pudeur où Annie Ernaux parle de son père. Après son décès, elle a voulu relater sa vie sans chercher à provoquer chez le lecteur de la pitié ou un autre sentiment. Juste raconter les faits, les événements et dire que oui, elle a eu honte de son père.
Son père travaillait aux champs puis il est devenu ouvrier. Une rencontre et le mariage mais toujours faire attention à l’argent, économiser « au cas où ». Ses parents ont pu ouvrir un café-épicerie comme il en florissait à l’époque. Ce n’est pas pour autant qu’ils ont changé leurs habitudes. Toujours la peur au ventre de perdre le commerce et de se retrouver sur la paille. A l’âge de l’adolescence, Annie Ernaux a commencé à fréquenter des amies issues de milieux sociaux plus aisés. Poussée par ses parents à réussir dans ses études, le sentiment de honte a germé vis-à-vis de ce père qui n’avait pas d’instruction. C’était un français modeste qui faisait partie de cette classe des « braves gens ». On ne se mélangeait pas ou très peu, chacun à sa place …
Avec les années, le respect remplacera la honte. Comme dans « la femme gelée », j’ai retrouvé ce style épuré sans fioritures inutiles et où les sentiments apparaissent en toute simplicité.
Un livre intemporel où elle rend hommage à son père en toute franchise. Accepter ses origines et ses parents tels qu’ils sont permet de se construire.
« Pour rendre compte d’une vie soumise à la nécessité, je n’ai pas le droit de prendre le parti de l’art, ni de chercher à faire quelque chose de « passionnant », ou « d’émouvant ».
« On avait tout ce qu’il faut, c'est-à-dire qu’on mangeait à notre faim (preuve, l’achat de viande à la boucherie quatre fois par semaine, on avait chaud dans la cuisine et le café, seules pièces où l’on vivait ».