S’agit-t-il d’auto-fiction ? Non. D’un journal intime ? Non plus.
Josse ne triche pas, mais il fait tout l’effort de distance, d’écriture de
l’expérience. Tout est parfaitement lisible, mais tout est mis en pages de
façon presque froide, volontariste. Pas de dates quotidiennes scandant le
« journal », seulement des séquences de prose liées/séparées par une
esperluette. La recherche de la « disparue » alterne avec les
souvenirs, les échos de mémoire, les racontars de bar, l’actualité qui vient
dissoner avec les attentats de Madrid… Et surtout le passage au « il »,
sans doute la marque la plus efficace de cette volonté de distance entre auteur
et expérience vécue. Sans doute aussi, en désespoir de cause, la seule façon de
« raconter ». Devenir comme étranger à soi-même pour mieux recueillir,
accueillir l’autre et « glisser cette ombre entre les draps de sa
mémoire ». Inutile de poser ici la question d’une distinction entre poésie
et récit : ce qui est donné à lire, c’est une tension entre écrire et
vivre, personnellement résolue. Et que demander de plus à un poète ?
par Antoine Emaz
Jacques Josse
Journal d’absence-
Ed. Apogée-28 pages – 9 €
Illustrations de Georges Le Bayon