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Trois quarts d’heure d’effervescence

Publié le 05 mars 2010 par H16

Ça faisait longtemps – oh bien facilement … 24H ! – que Sarkozy n’avait plus fait parler de lui. Revigoré par le repos de cette longue abstinence de médias, il nous revient donc, plein de peps et d’allant, pour nous requinquer l’économie à grands coups de propositions dont la quantité suppléera à la qualité. Sabre au clair, yeux tournés vers l’horizon, le poney républicain fièrement harnaché va trottiner de toutes ses petites pattes vers un âpre Everest, emmenant fiévreusement son cavalier vers de nouvelles batailles homériques, pendant que l’intendance, lourdement chargée, bottes trouées et yeux hagards, suivra. En avant, chargeeeeeeeeez !

Pour l’exégèse journalo-journalistique avec notes rigoureuses et petit bout de langue qui dépasse de lèvres pincées et sourcils froncés, on pourra se reporter aux articles du Monde ou du Point.

Et pour le détail, minute par minute, du discours, on pourra se référer à cet article du Journal Ecrit En 20 Minutes. Magie du HTML et de la typo multicolore, ce dernier article permet de comprendre rapidement qu’on assiste, une nouvelle fois, au syndrome de l’Aspro : une fois placé dans un volume d’eau restreint, ça fait beaucoup de petites bulles pétillantes et joyeuses, ça se trémousse au fond du godet, et pour soigner la gangrène, c’est totalement inefficace.

En effet, si l’on voulait faire court, on pourrait résumer l’exercice présidentiel d’une expression : « interventionnisme à tous les étages » ; l’État est tout, l’État peut tout, l’État fait tout pour que l’Industrie se remette d’aplomb, avec vos sous. Le destrier ne serait pas un poney, on y verrait presque des accents mussoliniens.

Évidemment, le plus fort, c’est lorsque le chef de l’exécutif, probablement en pleine digestion d’un plantureux déjeuner de travail, a déclaré, sans qu’il soit possible de croire à une plaisanterie, vouloir augmenter la production du secteur secondaire de 25 % en volume d’ici 2015.

Ben oui les petits amis : il suffisait d’y penser. Nicolas parle devant les micros, et dit qu’il faut 25% d’augmentation de la production, et hop, Jules et Robert, aux manettes, poussent les petits boutons et tournent les gros volants, et, cinq ans après, on se retrouve avec 25% de plus en sortie.

Ici, nos journalistes, que le monde nous envie, se sont empressés de poser quelques questions évidentes : pourquoi 25% et pas 75% ou 12% ? Pourquoi ne pas viser un but plus modeste, mettons 10%, et rediriger les efforts qu’ils aurait fallu consentir pour aboutir à 25% pour autre chose ? Ou pourquoi ne pas se donner les moyens de faire un petit +50% ? Que se passe-t-il si on fait 24% ? Et 3% ?

En fait, personne n’a posé ces questions parce que tout le monde sait fort bien que ce chiffre de 25% est aussi crédible qu’un bulot qui se lance dans la conquête spatiale. En fait, il traduit la volonté des étatistes et de leur chef de file du moment de continuer à fourrer leurs doigts gras dans des affaires qu’ils n’ont pas arrêté de tripoter ces trente dernières années, avec les fulgurants succès qu’on connaît.

Et comme les finances, actuellement, ce n’est pas tip-top, on rassure tout le monde en expliquant que tout ceci sera de toute façon payé grâce au Grand Emprunt, ce qui permet au passage de faire une retape peu discrète pour une opération médiatico-financière globalement foirée.

En outre, et parce qu’un Grand Emprunt, c’est bien, mais une implication du peuple dans sa propre déconfiture, c’est encore mieux, on va proposer une idée qui cogne : un Livret d’Epargne Populiste, idée dont mon collègue blogueur l’Hérétique a retrouvé la source à la CGT. Il s’agit de collecter l’argent des Français (qui en ont, actuellement, tous, caché sous un matelas) de le rémunérer avec un lance-pierre, de le faire gérer par des cadors de la CDC, le tout, à destination des entreprises « méritantes » choisies sur le volet.

On respire d’emblée à plein poumon le parfum de la rectitude, de la bonne gestion, des décisions judicieuses et des retours sur investissement qui roxxent.

Si l’on ajoute une variation sur le thème des Commissions Théodule, avec la création du spin-off de la série Desperate Government poétiquement baptisé Médiateur de la Sous-Traitance, on commence à voir à quoi rime tout ceci : encore un foutage de gueule magistral.

La seule différence entre l’ère sarkozienne et les présidences précédentes, c’est, justement, cette augmentation de la production industrielle (dans les 250%, pour le coup) de ce genre de moquages de visage. C’est la seule augmentation notable. Auparavant, on sentait une patte artisanale, un polissage, une finition à la main et cuir pleine peau, dans les discours interventionnistes et de politique générale. Avec Sarko, on a littéralement taylorisé le processus de fabrication. On perd les cuirs et les gentes alliage, on gagne en réactivité, on a le volant sport et un beau klaxon qui hurle la Cucaracha tant qu’il peut à chaque feu rouge.

Le gain au change est discutable.

Et pour ce qui est de l’interventionnisme, dont les vertus ne semblent acquises que pour ceux qui en profitent, on va mettre le turbo : l’Etat actionnaire va zimpulser comme un malade. A la limite, il est parfaitement concevable que lorsqu’il est l’actionnaire de référence, celui-ci s’implique dans la gestion des entreprises et zimpulse à fond.

Le souci est cependant double : d’un côté, lorsqu’il zimpulse, il ne fait pas vraiment des étincelles. Pour les réussites fulgurantes des grandes entreprises dont l’état s’est violemment occupées, les nationalisations donnent un bon aperçu du résultat.

Sarko tristounet

Pour l’industrie, c’est pas gagné. Snif.

De l’autre, quand il n’est pas actionnaire, il zimpulse quand même : les petites gesticulations récentes avec Total en sont un excellent exemple. En clair : actionnaire ou pas, l’Etat se mêle de tout et tout ceci revient à trouver de bonnes ou moins bonnes excuses pour que tout soit centralisé et dirigé par un quarteron des fines lames de l’économie et de la finance, quarteron qui a réussi à faire passer la dette française autour de 0 au milieu des années 70 à environ 2000 milliards d’euros maintenant.

Comme track-record, j’ai connu plus solide.


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