Aujourd’hui tout a changé d’échelle. Les policiers disposent d’un fichier informatique – le STIC - sans doute performant mais fort mal tenu à jour selon les critiques émises par la CNIL. Je ne conteste nullement l’utilité d’un tel fichier en ce qu’il permet sans nul doute une meilleure efficacité dans la lutte contre la criminalité par exemple si un même individu commet des forfaits dans des régions différentes. Beaucoup se trahissent par le même modus operandi qui sera leur signature. Nombre d’affaires de tueurs en série ou autres crimes de même gravité n’auraient sans doute jamais été élucidées sans des fichiers consultables à partir de tous les commis-sariats ou gendarmeries de France et de Navarre.
Il est en revanche totalement inadmissible que certains policiers acceptent d’utiliser ce fichier à des fins politiciennes, à la demande d’élus ou de candidats à une quelconque élection, quels qu’en fussent les enjeux. Ma position serait aussi rigoureusement identique si les socialistes étaient au pouvoir et demandaient aux forces de police de procéder à une telle opération, indigne de l’Etat de droit et de la légalité républicaine.
Je ne doute pas un instant qu’une grande partie des policiers ont une toute autre conception de leur métier et n’y mêlent aucunement leurs sympathies politiques – pour avoir agi ainsi, il faut déjà pencher très à droite ! – et ne soient très en colère d’apprendre, alors même qu’on leur demande déjà beaucoup d’efforts avec des effectifs insuffisants, à quelles activités se livrent certains de leurs collègues que l’on distrait à l’évidence de leurs tâches normales pour des opérations inqualifiables sur le plan de l’éthique.
Déjà un nombre croissant de membres des forces de l’ordre regimbent qu’on les mobilisât en grand nombre pour les déplacements de Nicolas Sarkozy – au minimum, 500 sinon rien, quand ce n’est pas le triple ! Ce sera la cerise sur le gâteau.
Dans ce contexte, il est aussi fort plaisant d’entendre Valérie Pecresse accuser Jean-Paul Huchon de laxisme en matière de sécurité alors que, sauf en ce qui concerne les transports en commun, cela ne relève aucunement des prérogatives de la Région.
Le pouvoir ne se grandit pas. Alors qu’Alex TurK, président de la CNIL, réclame des explications, rappelant que “la traçabilité des recherches effectuées, ainsi qu’un historique des consultations de ce fichier” sont prévues par la loi Informatique et Liberté, pour sa part Frédéric Péchenard, directeur général de la police nationale (DGPN), réserverait encore sa réponse, indiquant que s’il “n’excluait pas d’ouvrir une enquête et de saisir l’IGPN [l’inspection générale de la police nationale]”, il procède à des vérifications et “à un état des lieux sur l’accès aux antécédents de M. Soumaré”.
La vérification serait facile car les personnes qui ont accès au STIC sont enregistrées dans une base de données grâce à leur identifiant et leur code. Frédéric Péchenard botte donc en touche. En attendant les ordres… de l’Elysée. Que doit-on en déduire ? Si les policiers en cause sont trop proches du pouvoir l’affaire sera-t-elle proprement enterrée ?
Je sois avoir besoin d’un sonotone – ce qui m’étonnerait fort, je serais sans nul doute capable d’entendre une mouche péter – car je n’ai oui aucune intervention de Nicolas Sarkozy sur cette lamentable affaire… Assez surprenant de sa part, lui qui parle à tout propos et en toute occasion. Preuve évident que de tels agissements ne sont pas faits pour le troubler.
Nicolas Sarkozy – qui n’a jamais quitté sa casquette de “premier flic de France” qu’il porta de 2005 à 2007 – a une conception tout à fait policière de l’histoire qui s’inscrit dans la tradition des “cabinets noirs” de l’espionnage des opposants. Ces dérives perpétuelles nous entraînent vers l’Etat policier d’un (Little) Big Brother.