Il suffirait qu’un jardinier sème quelques graines de plantes bien choisies au pied de nos immeubles en béton, sur les toits, ou dans les cages d’escaliers, pour que nos villes retrouvent couleurs, harmonie et poésie. C’est avec ce rêve dans l’air du temps que l’architecte Luc Schuiten nous a fait franchir les portes de ses « cités végétales », exposées au Musée du Cinquantenaire de Bruxelles en 2009.
Depuis plus de 30 ans, cet architecte visionnaire bruxellois, imagine et réalise des habitations, des paysages urbains, des cités inspirées par tout ce qu’il a pu observer dans des environnements naturels. Rappelons qu’il est l’un des premiers architectes européens à avoir bâti une maison écologique auto-suffisante en énergie dans les années 70 : la maison Oréjona. Il fut aussi le premier, bien avant que le musée du quai Branly n’en ait un, à imaginer des jardins verticaux sur les murs aveugles de nos villes.
En quelques coups de crayon, il présente comme une évidence la métamorphose de nos environnements urbains, qui passeraient en quelques décennies de l’ère du tout béton à une osmose parfaite entre l’humain et le végétal. Il projette ainsi une nouvelle utilisation des écosystèmes, offrant des modèles inédits de penser l’organisation des villes. Pour Luc Schuiten, l’”archiborescence” (contraction d’architecture et d’arborescence), est un nouveau mode de construction où l’arbre en est le pilier, le biomimétisme, le moteur. Ces représentations originales sont étayées par la collaboration étroite que l’artiste entretient avec les biologistes de l’association de Biomimicry Europa.
Aujourd’hui, certaines de ses visions arborées n’ont plus rien d’utopique, et c’est plutôt bon signe! Les paysagistes transforment nos toits en promenade plantée, nos balcons en cocon abritant un jardin d’hiver… Mais Luc Schuiten va beaucoup plus loin. Il imagine des villes où les murs auraient cédé la place à des parois en fibre textile similaire aux cocons des vers à soie, où le système de climatisation serait calqué sur celui d’une termitière, où chacun verrait son espace naturellement délimité par l’enchevêtrement des branches d’un figuier étrangleur.
Il réinvente aussi les moyens de locomotion, un travail qu’il laissait déjà entrevoir dans des bandes dessinées co-signées avec son frère François. Ses villes se parcourent au volant d’un « chenillard », en mini-avion « ornithoplane » ou encore en « sauteraile », tenue alliant prothèse ailée et chaussures à ressorts aux effets proches de bottes de sept lieues… A Bruxelles, il se déplace avec une curieuse voiture électrique, en forme d’œuf, qui peut « monter » à 90 km/h, avec une autonomie de 100 km. Il démontre ainsi qu’il existe une alternative agréable à la « monstruosité » de nos autos dont le poids est dix fois plus important que celui de la personne transportée.
Luc Schuiten a déjà publié « Habitarbre », « Archiborescence » et « Vegetal city ». Ces ouvrages illustrent sa vision urbanistique qui a donné forme à une nouvelle architecture basée sur une vision poétique, où l’invention et la relation avec la nature occupent une place prépondérante. Du 31 janvier au 14 fevrier 2009, à Mons en Belgique, La Maison Folie accueillera l’exposition « transport du futur », en collaboration avec Luc Schuiten.
Pour en savoir plus sur les projets futuristes de Luc Schuiten :« Archiborescence » et « Vegetal city ».
Ici, un avant goût de « Les terres creuses » ,albums écrits et dessinés à quatre mains par les deux frères Schuiten.