Le silence se déploie autour des premiers chants et ce faisant, se creuse vers l’arrière, prend son élan depuis l’intérieur de nos corps jusqu’au plus blanc des ciels où tout remonte doucement entre les gels les jours et les errances d’un soleil cru qui avec l’aide du noroît illumine les visages emmitouflés dans la laine des bonnets et la bure lourde des manteaux qu’on serre contre le col. La voix enrouée des mésanges, longtemps bloquées au creux des arbres, remonte timide, charmes de mars blême où la visiteuse de son voile impeccable (on le voit bien aux nébuleux couchants mauves) retient de la main les secrets de l’éclatement des boutons enfiévrés, comprimés, qui n’attendent que sa voix.
Aux articulations, le sang, les nerfs commencent un petit jeu d’impatience pour l’instant presque imperceptible, et les pas n’osent pas, même si déliés de la pétrification des glaces, ils pourraient arpenter les chemins de traverses où l’on aperçoit les labours étincelants des énormes moissons promesses. Dans le lointain, on entend les appels des bûcherons, les grondements ferraillés des tronçonneuses thermiques enrageant contre les aubiers qui lancent leur baroud d’honneur ; des hommes s’encouragent à coups de merlins tranchant transversalement les bûches qui feront la joie des noëls à venir. Le monde se prépare des jours de fête. Lorsque la visiteuse au sourire vif ouvrira les mains, lâchant les graines sous le chaud des sols, les musiques vertueuses feront de la terre un velours de fraîcheur.