Notre Président vient de manifester une nouvelle fois son goût pour les coups en nommant deux personnalités n'appartenant pas à son camp à des postes d'importance, M. Didier Mingaud à la tête de la Cour des comptes et Michel Charasse au Conseil constitutionnel. Je ne suis pas persuadé que cette supposée habileté le serve. Dans l'immédiat, elle suscite une certaine acrimonie dans les rangs de ses partisans et je doute que les deux promus puissent exercer dans leur poste une influence favorable à la gauche.
Je ne traiterai pas du cas du sénateur d'Auvergne, bien que le personnage ne me soit guère sympathique. Mais je mentionnerai simplement deux circonstances où M. Mingaud ne m'a pas paru à la hauteur. Il s'agit le 25 octobre 2007, de sa Présidence de la Commission d'enquête parlementaire à propos d'EADS et le 25 mars 2009 où la Commission des Finances de l'Assemblée Nationale recevait M. François Pérol. La première remarque que je ferai est le manque de solennité de ces séances où des citoyens se présentent devant des membres d'une Assemblée députés par le peuple souverain. Quelle différence avec des comparutions de même nature aux Etats-Unis d'Amérique où le déposant prête serment face à la Commission chargée de l'évaluer. Sans vouloir instituer un décorum semblable à celui d'une salle de tribunal, a-t-on déjà vu les candidats à un examen être assis aux côtés du jury ? C'est pourtant le spectacle auquel vous pouvez assister sur les deux vidéos citées dans ce billet où M. Lagardère et M. Pérol se trouvent à la droite de M. Migaud. D'entrée, on comprend qu'il peut s'agir d'une discussion entre gens de bonne compagnie, à la bonne franquette pour ainsi dire.
Je ne reviendrai pas sur la prestation de M. Pérol, que j'avais commentée en son temps. Je m'attacherai plutôt au gag joué par M. Arnaud Lagardère, interrogé sur la vente en avril 2006 d'une partie de sa participation dans EADS. M. Lagardère a assurément beaucoup de qualités. Il n'en demeure pas moins que s'être donné la peine de naître fils de Jean-Luc Lagardère n'a pas nui à son accession à la direction d'une entreprise prestigieuse.
Lors de cette séance, Jérôme Cahuzac, député du Lot-et-Garonne, l'interroge ainsi : « Puisque vous avez parlé de l'aide que vous a apportée le ministre de l'Economie et des Finances de l'époque, M. Sarkozy, quelle fut cette aide ?" Se tournant vers un autre membre de cette commission, M. Lagardère, le pouce levé, plaisante ainsi: "Alors, on a droit à un joker ici, hein, non ? Un seul ? Le député répond alors : « ch'ai pas, c'est vous qui appréciez » et de rire. M. Lagardère reprend : « eh bien, je veux bien appeler le public, appeler un ami, demander un 50/50, moi je sais pas... Je fais ce que vous voulez mais, très franchement, je préfère ne pas répondre à cette question ». Eclat de rire général. Qu'il ne se soit pas trouvé un seul parlementaire pour le tancer d'importance, pour lui signifier qu'il n'était en représentation mais qu'il se trouvait devant les élus de la Nation, c'est dramatique. Et que de surcroît tous ces nobles élus se soient esclaffés bruyamment, comme larrons en foire, c'est pitoyable.
Il faut espérer que M. Migaud est meilleur à l'écrit qu'à l'oral mais ces deux épisodes me laissent douter de sa pugnacité en tant que Président de la Cour des Comptes, avec le coeur à gauche.