« Tout le monde croit avoir le droit, le devoir de parler de cinéma. Vous parlez tous de cinéma.
Est-ce que je parle d’astrophysique ? De biologie ? »
Nanni Moretti ( ou son personnage ) dans « Sogni d’Oro » .
Politique, psychanalyse, culture, sexe et dérision. Dès ses premières armes, Nanni Moretti joue carte sur table. Farouchement indépendant ,mégalomane , loufoque, il se faufile subtilement dans tous les tableaux pour instaurer un nouveau cinéma. Histoire de poser les fondamentaux.
« Je suis un autarcique », tourné en super 8, est suivi de « Ecce Bombo » en 1978 et « Sogni d’oro » en 1981 Avec ces trois films (accompagnés d’entretiens de Moretti et de ses proches) quatre courts métrages réalisés entre 1990 et 2007 prolongent l’enchantement, « Le cri d’angoisse de l’oiseau prédateur », « Le journal d’un spectateur » « La Cosa » (une remise en question du parti communiste italien dont on n’aurait pu se passer) et le merveilleux « Le jour de la première de Close-Up ».
Le réalisateur italien possède un cinéma à Rome, le « Nuovo Sacher ». A la sortie du film de Abbas Kiarostami (dans ce blog), il fait tout ce qu’il peut pour le mettre en avant, face à une concurrence déloyale « Le Roi lion », « Quatre mariages et un enterrement »… Effervescent et drôle, Nanni Moretti n’hésite pas devant sa caméra à houspiller le personnel du cinéma afin qu’il réponde au mieux à la clientèle qui ne se presse pas. La scène finale du répondeur est hilarante.
Ironique sur la société moderne, conteur merveilleux d’histoires aussi abracadabrantes que véridiques, il est dès le début très lucide quand à l’avenir de son pays, et de son cinéma. Il suffit de regarder « Sogni d’Oro » qu’il tourne alors qu’il n’a que 28 ans.
C’est une formidable comédie sur le pouvoir, un autoportrait complètement allumé et un film dans le film qui annonce déjà le déclin de la télévision (d’un point de vue qualitatif) et l’arrivée de la télé-réalité. La sphère Berlusconienne en prend déjà pour son grade. Il n’avait alors que vingt ans d’avance.
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Je viens de revoir ce film et j’y ai pris un énorme plaisir . Il est à la fois très profond, et très drôle, puisqu’en posant les bonnes questions (notamment sur la production cinématographique italienne) Moretti s’implique totalement dans l’histoire. Mais parle-t-il de lui (« Je suis le cinéma, je suis le plus grand ! ») ? ou bien son personnage relaie-t-il la mégalomanie ambiante ?
Une implication totale, un caractère autobiographique du personnage principal qu’il interprète, des revendications, des analyses constituent une recette qui depuis a forgé la réputation d’un cinéaste hors du commun. Qui entre comédie et mélodrame, regarde le monde bouger. Mais tout en posant les questions, il tente d’y répondre. Ce qui dans l’art n’est pas forcément une marque de fabrique. Chez Moretti c’est une profession de foi.
En détail les quatre dvd dans l’article à venir …demain .