Magazine Cinéma
L’Alhambra
21, rue Yves Toudic
75010 Paris
Tel : 01 40 20 40 25
Métro : République / Jacques Bonsergent
Genre : Polar musical
Mis en scène par Antoine Lelandais
Musiques de Raphaël Bancou
Scénographie de Sarah Bazennerye
Costumes de Virginie Houdinière et Sarah Dupont
Chorégraphies d’Armelle Perron
Maître d’armes : Benoît Cambillard
Avec Cécilia Cara (Bonnie Parker), Fabian Richard (Clyde Barrow), Christine Bonnard (Anita Villa-Lobos), Gilles Vajou (Alvarez / Almafuerte), Magali Bonfils (Gabrielle), Antoine Lelandais (Willy Woofy), Fabien Hily (Cosmo), Sabrina Boudaoud (Môme Dina), Raphaël Bancou (Lieutenant Jakowski)
Ma note : 7/10
L’histoire : Une cambrioleuse de talent dérobe les diamants d’Alvarez, le parrain de la mafia newyorkaise. En réponse, celui-ci envoie son bras droit afin de l’éliminer. Problème : elle s’appelle Bonnie… il s’appelle Clyde…
Mon avis : Il fallait un certain courage et/ou beaucoup d’enthousiasme pour porter à la scène la mythique histoire de Bonnie Parker et Clyde Barrow. Ce couple est tellement gravé dans la mémoire collective par ses interprètes précédents : Faye Dunaway et Warren Beatty pour le film, Brigitte Bardot et Serge Gainsbourg pour la chanson. Excusez du peu ! En plus, on a en permanence la chanson dans la tête. Sacré handicap au départ…
L’épopée commence sur un air d’harmonica. Trois musiciens enchaînent en « live »… Willy Woofy, animateur d’une radio de Brooklyn, va en être notre narrateur. Grâce à un habile flash-back digne du cinéma, nous assistons au premier exploit de Bonnie Parker. Déguisée en hôtesse de l’air, elle s’empare d’un sachet de bijoux que convoie Gabrielle, âme damnée d’Alvarez, le patron de la pègre newyorkaise et, accessoirement maîtresse de son homme de main, le brutal et séduisant Clyde Barrow… Cette première scène de combat est remarquablement chorégraphiée. Cécilia Cara, particulièrement sexy dans sa tenue d’hôtesse de l’air, jupe fendue, chemisier blanc et ravissant petit calot, nous la fait carrément à la Kill Bill. Les arts martiaux n’ont plus de secret pour elle. Nous sommes bien loin de la gentille et romantique Juliette qui l’avait fait connaître… Quant à Clyde, c’est un vrai dur. Il ne connaît qu’une loi : son flingue. C’est un tueur impitoyable et cynique… Leur rencontre va être explosive. Nous assistons à un coup de foudre en direct.
Beaucoup de choses m’ont séduit dans ce « polar musical »… D’abord, l’histoire tient parfaitement la route. C’est une véritable tragédie grecque transplantée à Brooklyn qui se déroule sous nos yeux. Il y a de l’action, des rebondissements, des personnages bien dessinés, une mise en scène intelligente…. Grâce à un scénario solide, truffé de ramifications et de rebondissements, le tout est très crédible.
Ce que j’ai apprécié également, c’est que l’auteur du livret n’a pas succombé à la facilité en évitant tout manichéisme. Ceux qui ont l’air gentil peuvent trahir, les gangsters au cœur de pierre peuvent faire preuve de commisération. Il y a du feu, du sang, de l’amour, de l’humour, de l’émotion. De l’humain, quoi ! Nous assistons par exemple à une surprenante confession de Bonnie qui avoue presque à contrecœur qu’elle est excitée par la montée d’adrénaline que lui procurent ses hold-up. Pourtant, sa vocation, au départ, c’est d’incarner une sorte de Robin des Bois en jupons. Ces sentiments troubles sont fort bien analysés.
Mardi, c’était le soir de la première représentation. Après quelques ajustements, quand tout le monde aura bien pris ses marques, le spectacle va devenir plus rythmé, plus huilé, plus intense encore. Honnêtement, c’est du très bon travail. Les chorégraphies sont réussies, les scènes de combat originales et très physiques. Tous les protagonistes de ce drame – ils sont neuf – sont vraiment bons. Et les musiciens eux aussi participent à l’action en se muant en comédiens avec un réel talent. Sincèrement, il y a beaucoup d’inventivité dans cette mise en scène.
Maintenant, il y a un élément qui m’a quelque peu perturbé. Bonnie & Clyde est annoncé comme étant un « polar musical ». Or, je l’ai trouvé plus « polar » que « musical ». C’est effectivement bien âpre, bien noir, bien violent. Mais il m’a semblé que la musique, par manque de mélodie, n’était pas au diapason. Les chansons sont plus parlées que chantées. C’est peut-être un parti pris, mais il nous manque deux ou trois « tubes » qui pourraient dynamiser la bande son. Il y a certes des morceaux réussis comme le gospel, la chanson un peu bluesy de Dina, l’ambiance sud-américaine de celle de Cosmo le recéleur. Ça va faire mal, interprétée par le flic, est un bon air jazzy, Anita se fend d’un joli Combien de temps… C’est dommage, pour un spectacle musical qu’il n’y ait pas plus de vraies belles chansons qui s’installent dans notre tête et nous accompagnent ensuite dans le métro. Bref, j’ai trouvé les chanteurs plus convaincants que leurs chansons…
Mais, mis à part ce petit reproche, j’ai pris beaucoup de plaisir à suivre le déroulement de cette histoire d’amour et de violence. Le couple Bonnie/Clyde fonctionne parfaitement. Le charisme est là, ils assurent. Comme je le mentionnais plus haut, tout le monde est bon, d’Anita l’ex-prostituée devenue prêcheuse à Alvarez, le parrain, en passant par Gabrielle la tueuse ou Dina la serveuse. J’ai également bien aimé le timbre de voix du lieutenant Jarowski et sa désinvolture.
Allez voir Bonnie & Clyde. Déjà, ça a le mérite d’être une création française. L’histoire est costaude et les comédiens sont épatants. C’est un très bon divertissement. Et puis il y a Cécilia Cara. On la savait excellente chnateuse et très bonne comédienne ; mais là, elle nous épate aussi par ses qualités athlétiques.