Théâtre du Gymnase
38, boulevard Bonne Nouvelle
75010 Paris
Tel : 01 42 46 79 79
Métro : Bonne Nouvelle
One-woman show écrit par Noëlle Perna et Alain Sachs
Mis en scène par Alain Sachs
Ma note : 7,5/10
Le thème : Cette fois, Mado décide de faire un vrai show… comme elle se le « pantaille »… avec des imitations, de la musique et des costumes toujours aussi excentriques pour une galerie de portraits hauts en couleurs. « Qué chance », elle a même trouvé un « reproducteur » !
Elle a tout préparé. Et, pour ce faire, toute sa famille a été mise à contribution… Mais seront-ils à la hauteur pour le grand soir ?
Une recette familiale avec des personnages plus vrais que nature et qui ne manquera pas, à coup sûr, d’être une nouvelle fois « esstra »…
Mon avis : Noëlle Perna ne nous trompe pas sur la marchandise : quand elle annonce que Mado fait son show, elle le fait. Elle y met les moyens, elle nous sort le grand jeu. Lumières, musique typique de revue de music-hall (french-cancan en tête), costume chatoyants et bigarrés… Et dès qu’elle surgit, le ton est donné et on retrouve immédiatement tout ce qui fait la spécificité de Mado : son énergie débordante, son accent, son franc-parler, son langage imagé, ses mots inventés ou déformés, sa manière de prononcer les « S » muets (les « esspots ») son bon sens, sa fausse naïveté, ses coquineries et son aptitude à nous prendre tous pour des confidents. En fait, Noëlle Perna reproduit sur scène sa façon d’être dans son bar niçois, le Bar des Oiseaux. Elle y trône, y tient la vedette, et nous sommes tous ses (bons) clients. Je ne connais pas la marque des oiseaux dont il est question, mais au vu des quelques habitué(e)s dont elle brosse le portrait, ce sont assurément des drôles d’oiseaux. Et elle, c’est une pie ; une pie jacassante et virevoltante, infatigable et intarissable, capable aussi de distribuer régulièrement de féroces petits coups de bec bien vachards.
Mado aime discuter. Son spectacle, même s’il repose sur une poignée de sketches dûment annoncés, semble totalement déstructuré tant elle se complaît à partir dans les digressions et les anecdotes. Si vous avez envie d’être apostrophé ou pris à partie, installez-vous dans les premiers rangs, vous ne lui échapperez pas… Elle affiche en outre une propension particulière à se moquer des hommes. Surtout de ceux de sa famille, Albert le mari, Toinou le fils, son beau-frère. Eux, ils sont habillés pour l’hiver, même si le climat n’est pas spécialement rigoureux du côté de la baie des Anges. Et puis, quelle cabotine !
Son intention, c’est donc de nous présenter un formidable spectacle de « Chauve Biz ». Pour cela, la (re)production n’a pas lésiné sur les moyens. Elle a en effet à disposition, une malle et un porte-manteau. Comme ça, de prime abord, ça fait un peu cheap. Mais dès qu’elle ouvre la fameuse malle, c’est le music-hall tout entier qu’elle en extirpe. Ça, elle n’a pas peur du ridicule. Affichant un goût prononcé pour le rose fluo, il faut voir de quoi elle ose s’affubler (un éventail de vulgaires plumeaux, certes joliment colorés, en guise de plumes). Elle se lance ensuite dans une chorégraphie (la fameuse choré du Sud) des plus approximatives avec pointes émoussées.. Tout au long de ses différentes évolutions, elle ne cesse d’apostropher un fiston qui ne s’avère pas être une lumière au poste d’éclairagiste, et d’invectiver un mari supposé se trouver dans les coulisses côté cour.
Le deuxième sketch est consacré aux imitations. Mais comme elle parodie des personnes qui sont pour nous de parfaits inconnus, puisqu’il s’agit de gens qui fréquentent son bar, inutile d’y chercher le moindre repère. Le premier personnage qu’elle campe, Amélie la « péripétassienne », une gourdasse sympathique, lui permet de distiller une kyrielle de jeux de mots dont certains sont vraiment excellents. Il y en a aussi une poignée qui sont assez faciles, dignes de l’almanach Vermot, mais qui, dans le contexte, ne nous offusquent pas trop.
Au passage, il faut souligner la qualité de l’écriture sur l’intégralité du spectacle. Surtout, qu’il y a du débit, donc du texte.
Noëlle « Mado » Perna a le sens de la formule, des formules rendues encore plus savoureuses servies qu’elles sont par son accent et sa faconde méditerranéenne. C’est la championne de l’exagération et du chauvinisme éhonté (voir sa comparaison entre les plages de l’Atlantique et celles de Nice). Elle possède aussi une science du geste qui n’appartient qu’à elle. Tout ceci fait d’elle un personnage unique, truculent et haut en couleurs. Mado, on aimerait bien l’avoir pour copine. Elle n’a pas son pareil pour créer de l’animation et raconter des histoires. C’est ça aussi qui la rend réellement attachante. Elle nous fait vraiment marrer.
Sa troisième imitation, celle d’une tragédienne légèrement affectée d’ébriété est un vrai grand moment d’humour. Cette comédienne-là consomme plus de verres qu’elle ne débite de vers. De toute façon, elle les déforme et ils ne riment plus à rien. C’est, à mes yeux (ou plutôt à mes oreilles) un des mieux écrits…
Après s’être attardée un moment sur les ronflements de son mari, elle nous présente un numéro de ventriloque avec le charmant Poppy, narre ses vacances à l’île d’Oléron avec Albert, et aborde le rappel avec le sketch un tantinet surréaliste, mais particulièrement drôle dans son outrance, du GPS…
Et, en cadeau de fin, elle nous offre une séquence délirante dédiée au flamenco.
Du début à la fin, Mado fait son show sur un rythme enlevé, confirmant un talent réjouissant de conteuse d’histoires. Elle ne nous laisse pas un instant de répit, paie de sa personne avec une folle générosité. Mado la Niçoise et ses salades, on en redemande !