J’adore la conception toute sarkoïdale de la démocratie : il propose et dispose dans le même mouvement. Ce n’est pas nouveau mais cela saute aux yeux dès le titre du Figaro (27 février 2010) Sarkozy promet «surprises et imprévu» pour le Grand Paris… La seule bonne surprise que j’aimerais qu’il nous fît : débarrasser définitivement le plancher !
Nicolas Sarkozy va sans nul doute perdre les élections régionales en Ile de France et sûrement dans nombre de régions mais il s’en fiche – ou plutôt fait semblant car au lendemain des européennes et de la déconfiture du Parti socialiste, il crut bien que “c’était dans la poche” d’où sa colère contre Valérie Pécresse qu’il aura l’occasion d’exprimer tout à loisir à l’Elysée aujourd’hui puisqu’il va “recadrer” la campagne. Trop tard ! Il entend néanmoins imposer son projet de Grand Paris.
Ce sera un vrai remake de «Main basse sur la ville»… Ses amis promoteurs s’en pourlèchent déjà les babines. La photo du Figaro illustre à merveille cette volonté de domination. Entre “Dictateur” et “Parrain” number X. Clientélisme et népotisme étant, comme chacun le sait désormais, les deux mamelles du sarkozysme fondateur d’une République bananière. Foin des compétences des collectivités locales de même que leur droit de regard sur leur foncier, bâti ou non bâti… Quant aux citoyens, ceux qui ne seront pas super-friqués : pousse-toi de là qu’on y mette les riches !
Parmi les diverses tares du syndrome de Sarkozy, bien évidemment la mégalomanie. Compensation de minus. Paris, tel qu’il est et que nous l’aimons n’est pas à la mesure de sa folie des grandeurs. Il rêve d’une mégalopole concentrationnaire hérissée de gratte-ciel. Les banlieues pavillonnaires «qui gangrènent nos paysages» (!) lui hérissent le poil : trop à taille humaine ! Il veut augmenter le nombre d’étages du bâti existant, construire des tours. L’entassement vertical, quoi ! Paris et la proche banlieue vidée du plus grand nombre de ses habitants, livrée à la pioche des promoteurs, donnée en pâture aux multinationales, voilà son rêve.
Il nous la bâille bien belle : «On a besoin d’identité, on a besoin de sécurité, mais on a aussi soif de surprises, de découvertes, de rencontres, d’imprévus»… L’identité à la Sarko, on connaît : limite facho sur fond de nationalisme étriqué et frileux et d’islamophobie débridée. Sur la sécurité son bilan est proche du zéro absolu. Sans même parler de sécurité sociale et celle de l’emploi : tous chômeurs ! Bientôt, ce ne sera même plus un péage urbain qui sera proposé aux banlieusards mais un “aussweiss” : nouvel usage de la carte Navigo et de sa pupuce flicardière.
Pour être certain que nous, le vulgum pecus des nouvelles “townships” de relégation sociale et ethnique ne venions pas troubler le plaisir des bobos et des multimilliardaires, peut-être même que l’on nous implantera directement la puce dans le cou comme le fit le véto de Florensac à Tubarào. Triomphe des nanotech-nologies : le contrôle social et une nouvelle forme d’apartheid. J’espère que d’ici là, j’aurais tiré ma révérence.
Point n’est besoin d’être grand clerc pour savoir à l’avance que les règles des marchés publics, appels d’offres et tout le toutim seront allègrement foulées aux pieds, connaissant le peu de cas que fait Nicolas Sarkozy des règles juridiques. Ainsi, le travail préparatoire est-il confié à «L’Atelier» - hautement risible pour quelqu’un qui n’a jamais su ce que travailler voulait dire - dont l’inauguration est prévue début avril… Qui l’a décidé, quels débats politiques dans les instances locales compétentes ?
Sorti tout droit comme un lapin Duracell du bonnet de prestidigitateur de Sarko – boni/menteur de foires et marchés : ni vu ni connu, je t’embrouille. Vraie partie de bonneteau. Au moins le regretté et souriant Garcimore ne se prenait-il pas au sérieux et s’il faisait parfois les poches d’une dupe, ce n’était jamais “pour de vrai”.
Je lis que l’Atelier devrait permettre aux architectes de travailler ensemble et «proposer une politique, un projet urbain global». Foin des concours d’architecture ! Trop aléatoires. Sait-on jamais : si le jury ne choisissait pas les projets des favoris de Sarko… Mais il y aura forcément une sélection au moins tacite à l’entrée de ce club très sélect. Sur quels critères ? Etre bien en cours à l’Elysée, proche de Bouygues ou Vinci et quelques autres.
Tout juste prévoit-il dans cet Atelier – «très interactif et ouvert à la société civile» : blablabla ! - «des débats» entre les équipes et «aussi» - très accessoirement ? – entre les élus. De formalisme, point. Mais ce qui me fait littéralement crouler de rire – quand même passa-blement teinté de jaune – c’est qu’il espère que chacun placera «l’intérêt général au-dessus des querelles de pouvoirs ». Sarko se préoccupant de l’intérêt général ! c’est nouveau, ça vient de sortir. Profitez-en très vite avant que ce ne soit remisé au magasin des accessoires.
Une seule chose me semble certaine : l’argent public va drôlement valser. Sans contrôle des prestations réellement fournies. Petits arrangements entre amis dont le rapport de la Cour des comptes nous a donné quelque idée avec dépenses de sondages – «miroir, miroir, suis-je le plus beau ?» du pervers narcissique - et autres rémunérations de conseillers, les dépenses pharaoniques des six mois de la présidence de l’Union européenne et l’inauguration non moins dispendieuse du Sommet de l’Union pour la Méditerranée.
Pas d’appels d’offres ni de contrôle sérieux des devis et factures. On peut s’attendre au pire : commissions, rétro-commissions, “coulages” et compagnie. Se souvenir du chantier du TGV-Nord. Ce ne fut pas triste dans le genre.
Que dire quand cela se passera à l’échelle de la Région, mise à sac, pillée et rançonnée. Massacrée en long, en large et en travers. Attila n’eût pas fait mieux. Qui seront les Sainte-Geneviève et les Saint-Aignan d’aujourd’hui ?
La Tour Montparnasse devrait être «relookée - selon une idée de l’architecte Frank Gehry - pour en faire un symbole de la créativité échevelée du nouveau Paris». Pour décoiffer sévère avec ses goûts de chiotte de petit m’as-tu-vu parvenu bling-bling, attendons-nous au pire !
Le must de l’inculture sera sans doute atteint avec le projet d’Auchan – qui devrait voir le jour entre Paris et Roissy dans la banlieue Est sous-équipée – d’un complexe «commercial, culturel, sportif et récréatif» qui devrait «surprendre» ! et sera «le prototype d’un nouvel urbanisme commercial à visage humain»…
La culture donnée aux margoulins ! voilà qui résume tout à la fois le sarkozysme et sa «religion» : l’idéologie ultralibérale et la «société de marché» où rien n’a de valeur s’il n’est objet de commerce. Je suggérerais plutôt de rajouter un tout petit quelque chose au “Pater noster” : «délivrez nous du mal»… et de Sarko !
Avant qu’il ne défigure définitivement la Région Parisienne… mais pas seulement : il envisagerait de prolonger Paris jusqu’au… Havre ! rien de moins. Aussi ridicule que naguère Ferdinand Lop - éternel candidat à la présidence de la République sous la IVe - dont le programme consistait, entre autres billevesées du même tonneau à «prolonger le Boulevard Saint-Michel jusqu’à la mer», la Rade de Brest jusqu’à Montmartre, sans oublier l’installation de Paris à la campagne pour que les habitants profitent de l’air pur…
Très bonne idée dont devrait plutôt s’inspirer Nicolas Sarkozy car si son projet d’extension continue de Paris vers la province devait se réaliser c’est tout le contraire qui se produirait : l’air pur disparaîtrait partout. Il me suffit de constater de visu année après année la montée de la pollution dans la Vallée de Montmorency. Il y a une quinzaine d’années elle était circonscrite à certaines parties, grosso modo le long de l’autoroute A15 et de la RN14. Aujourd’hui, elle envahit tout et il y a belle heurette qu’elle est montée à l’assaut de la colline où est perchée Montmorency. J’ai lu que le nuage de pollution dépassait largement Pontoise et ne se contentant pas toujours d’envahir la Haute-Normandie (dont Le Havre !) traverse parfois La Manche… Un peu plus de “fog” à Londres.
Après les riches terres à blé de Brie sacrifiées à Mickey et autres délires urbanistiques proprement invivables et avant les non moins riches terres de Beauce ? – plus besoin d’agriculture non plus que d’industrie : le Brésil et la Chine y pourvoiront… à grand renforts de mélamine ? – il faudra bien faire un sort au magnifique Vexin. Trop agricole, pas assez pollué ni urbanisé. Trop rural et plaisant. Profitez bien du plaisir des yeux en parcourant ses magnifiques petites routes et des trésors que vous découvririez à chaque virage. Bientôt, Wy-dit-Joli-Village ne méritera plus son nom !
Cette mode imbécile des mégalopoles, du “Gross Paris”, des tours infernales comme des régions bétonnées est proprement insensée autant qu’invivable. Quitte à choisir, j’espère redevenir “rat des champs” plutôt que “des villes” : «Adieu donc, fi du plaisir. Que la peur peut corrompre»… Sans même parler ni de la pollution ni de la violence urbaine.