Parce que fuguer c’est un must, mon cher

La voiture était plus petite que nous l’avions cru et contenait déjà 3 passagers, dont un très mignon contre lequel je dus me coller pour qu’A. et O. puissent se poser. La voiture démarra.

-Et vous allez ou ?me demanda le conducteur.

-C’est ou la gare la plus proche ? demanda O.

-Gare de Lyon, répondit le mec mignon en se penchant vers nous.

Seul A. n’avait pas l’air franchement emballée par cette aventure. En même temps, je la comprends, il n’y avait que des mecs à l’intérieur, la voiture était crade était les vitres toutes salies par de la buée.

-Sinon, questionna O. en regardant autour d’elle, vous faites quoi dans la vie ?

La réponse la plus évidente était sans doute : « dealers intérimaires » mais ils nous surprirent en répondant :

-On fait un CAP fleuriste et on va à Amsterdam parce que leur marché aux fleurs est super réputé…

Cela expliquait les nombreux pot et graines qu’il y avait dans la voiture…

-Et vous ?

Ça, s’était la question qui tue. O. et moi échangeâmes des regards paniqués mais ce fut A. qui nous sauva en maugréant :

-On est étudiantes.

-C’est cool ça ! s’exclama mon voisin en la regardant. Et pourquoi vous allez à la gare de Lyon en particulier?

Le sourire qu’il avait le rendait encore plus craquant. Gentil et innocent, exactement mon type. Je me sentais craquer…

-On part en vacances.

Le conducteur se retourna d’un air goguenard :

-Et vous aimez pas le métro ?

-Il fait tard et c’est dangereux, grogna A., qui s’était penchée en avant, le visage entre les mains.

-Vous avez raison, c’est pas sûr à cette heure ci, acquiesça mon beau gosse en se penchant vers elle.

Le pauvre, je n’avais pas le cœur de le laisser se tromper comme ça. Je fis donc semblant de verser un peu des graines en m’emparant d’un des sachet derrière moi- les deux devant pestèrent mais lui, comme je m’y attendais se pencha pour m’aider à ramasser. Il fut suffisamment occupé pour oublier ma pote.

Au moment ou, échangeant un sourire avec lui, je mettais les dernières graines dans le sachet, la voiture se gara.

A. fut la première dehors. O., qui n’avait pas réussi ses tentatives avec le conducteur, suivit. Quand à moi, j’envisageais sérieusement l’idée d’aller à Amsterdam pour suivre ce garçon si mignon.

Il était évident, en plus, qu’il ne tenait pas à nous voir partir. J’allais craquer…lorsque je jetai un coup d’œil vers A. dont le regard triste et fuyant allait au loin.

La voiture s’éloigna et avec elle mes rêves hollandais.

Je suivis donc les autres dans la gare qui était sur le point de se fermer. Notre choix se limitait drastiquement avec le temps qui filait.

Les autres me suivaient parce que j’étais la seule à avoir un embryon de plan dans la tête. Je dois avouer que 30 minutes plus tôt, j’en avais un ; mais abandonner le beau gosse et ses plantes m’avait vidé la tête.

A tout hasard, j’arrêtais un agent de la SNCF et lui demandais franco de nous aider à trouver ou aller.

Le pauvre parut perplexe. Ce fut à ce moment la que me vint une idée et m’emparant d’un dépliant avec une carte de France, je le lui fis tenir des deux côtés.

Je donnais à A. un stylo qu’elle devait lancer comme une fléchette, mais les yeux fermés, sur la carte. L’endroit ou tomberait le stylo serait celui ou nous irions.Le plus loin serait le meilleur.

Le stylo, avant de s’écraser au sol, a fait un petit point sur Montpellier. Et, sous les yeux ahuris de l’agent, nous courûmes vers le quai d’où s’apprêtait à partir le dernier train. Nous n’avions ni valises, ni ticket, ni même une idée de ce que nous ferions là bas.

Un voyage parfait, quoi.