Un public versatile, des humoristes habiles.
Je continue mon hommage à Adjani.
Hier soir, j’ai été frappée du sketch assez drôle au demeurant sur le biopic (faux) sur Juliette Binoche. En gros, si j’ai bien compris, Valérie Lemercier et Gad Elmaleh se moquaient du nombre des velléités artistiques de l’actrice (elle joue, elle danse, elle peint..), et en plus de son toupet d’aller flirter avec les USA (tout doublé en américain). OK. Qu’elle se le tienne pour dit. Après l’amour, voici la chronique d’un désamour annoncé. Ca y est, elle énerve, donc.
On ne sait pas trop quand ça se passe, quelle est la ligne à ne pas franchir, mais là, apparemment, elle l’a franchie…
Ca me ramène à mon sujet : les relations passionnelles et conflictuelles d’Isabelle Adjani avec la presse et la célébrité.
Cela ne date pas d’hier. En 1981, à Cannes, elle monte les marches sous une huée (pour le film L’Été Meurtrier), et les photographes ont posé leurs appareils sur le velours rouge en signe de bouderie envers l’actrice, qui selon eux, ne s’était pas montrée assez coopérative avec les journalistes.
Ensuite, il y a la rumeur de 1987 qu’elle est obligée de démentir (cf extrait ci-dessus) selon laquelle elle est atteinte du SIDA et mourante.
Après, il y a des creux dans sa carrière, dans lesquels, elle s’efface de l’espace médiatique. Pas bon, ça non plus. On la trouve hautaine. Bizarre.
Puis il y a des rôles ratés, c’est vrai.
Des frasques avec ses anciens amoureux, dont Jean-Michel Jarre.
Des interventions de chirurgie esthétiques ! Ca c’est intolérable.
Elle grossit, puis maigrit, puis regrossit. Quelle sans-gêne ! Elle ne pense pas à ceux qui la regardent, qui sont obligés de s’adapter à ses variations !
Quand enfin elle revient au premier plan (sous les yeux du public et de ses pairs) en 2005 pour présider la Cérémonie des Césars, on l’attend au tournant. Le silence quand elle arrive est électrique, hostile. Elle est terrorisée. Elle fait quelques lapsus, panique, rate un peu son discours, demande un verre d’eau ! Et là, c’est le drame. Le soir même, elle sera parodiée pour cette demande jugée ridicule.
Enfin, il y a le sketch de Florence Foresti (drôle évidemment) dans lequel elle parodie Isabelle Adjani dans son rôle de La Dame Aux Camélias, et la présente comme folle.
Et voilà, le tour est joué. Isabelle Adjani est ridicule, à moitié folle, peut-être malade, gonflée au botox… Elle est en bonne voie pour être carrément foutue. Après avoir été aimée, célébrée, portée aux nues, pour son talent, pour ses audacieuses prises de position politiques, pour son intelligence, sa grâce…
Pourtant, dans un métier comme celui-là, qui dépend uniquement du désir des autres, il y a de quoi je pense, flipper un peu, mal gérer la vieillesse, surtout pour une femme, surtout après avoir été si belle, surtout après avoir commencé si tôt (à 15 ans et donc avoir vécu toute sa vie sous les yeux du public). Il y a de quoi se prendre les pieds dans le tapis. Et il y a de quoi, quand enfin on retrouve de l’amour (hier soir, pour son cinquième César), fondre en larmes. Je trouve. Mais bon, c’est sûr, je ne suis pas actrice et j’en suis fort aise (je ne tiendrais pas le coup). Je ne fais que supposer.
Le public est versatile… il prend et jette ses idôles. Mais parfois, il est un peu manipulé aussi par ceux qui sont drôles, moqueurs et donc in, qui savent quand il faut se moquer et quand il faut se taire, pétri de respect… Dans une société qui cultive la dérision comme une religion, ce sont eux qui font la pluie et le beau temps de l’opinion aujourd’hui…