Car si le film n’était qu’une affaire de style, il ne serait qu’un bel écrin vide. Ce qu’il n’est pas. Du style, il en a, mais ce qu’il a surtout, en son cœur, c’est un magnifique personnage masculin, servi par un grand acteur. Ce personnage, c’est George Falconer. Et ce jour de novembre 1962, George veut mourir. Il l’a décidé, ce jour sera le dernier jour de sa vie. Au cours de la journée, il prendra soin de tout mettre en ordre avant de partir pour de bon, en se remémorant le passé heureux, du temps où Jim, l’homme de sa vie, était encore en vie. Il croisera également Charlotte, sa meilleure amie, et Kenny, un de ses étudiants. L’un ou l’autre pourra-t-il détourner George de son funeste projet ?
Colin Firth prête donc ses traits à George, ce professeur anglais enseignant en Californie. Non seulement Firth lui prête ses traits, mais il le porte de la première à la dernière seconde avec une force incroyable. Il habite le personnage à chaque instant. Le comédien a toujours été quelqu’un d’immédiatement sympathique. Un acteur que l’on apprécie quoiqu’il fasse, même le film le plus futile. Quelque chose d’assez universel qu’il dégage et qui finalement l’a plutôt desservi puisqu’on a pris l’habitude de le voir dans des rôles « faciles ». George Falconer lui offre le plus grand défi de sa carrière, qu’il relève de façon incroyable.
Firth est de presque tous les plans du film, des plans qui ne mentent pas. Des plans longs, des plans
C’est une séquence, qui résume à petite échelle ce qu’est capable de faire Colin Firth pendant 1h41.
Sans Firth, le film aurait sans doute été tout autre. Peut-être la stylisation de la mise en scène de Tom Ford serait-elle moins bien passée à l’écran. Peut-être son portrait feutré de l’Amérique années 60 aurait-il agacé. Peut-être son regard sur le deuil, et l’acceptation de la durée éphémère du bonheur (et de la vie), eut-il été plus fade. Impossible de le dire. Car A single man est dominé par la présence de Colin Firth, qui enfin se voit offrir un grand rôle. Qui enfin révèle que ce sympathique britannique à l’allure si romantique cache un acteur fiévreux, remarquable, qui n’a pas volé la Coupe Volpi du Meilleur acteur à la dernière Mostra de Venise.
Maintenant, le défi pour Colin Firth sera de ne pas se laisser aller à retrouver ses confortables rôles futilement romantiques, ou exagérément costumés, pour poursuivre à offrir dans d’autres grands rôles cette mélancolique ardeur qui émane de lui. Pas de Bridget Jones 3 Colin, please. Please.