Validation presque totale de la loi renforçant la lutte contre les violences de groupes (Cons. constit. n° 2010-604 DC du 25 février 2010)

Publié le 26 février 2010 par Combatsdh

Le 25 février 2010, par sa décision n° 2010-604 DC, le Conseil constitutionnel a examiné le recours à l’encontre de la loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public. Il l’a globalement validée, à l’exception de l’article 5 de la loi.

1°/ - A été entièrement validé le délit nouveau de participation à un groupement constitué en vue de commettre des violences en insérant dans le code pénal un article 222-14-2 aux termes duquel : “Le fait pour une personne de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ” ;

Il était reproché à ce délit l’obscurité et l’ambiguïté de ses termes, donc le non respect du principe de légalité des délits et des peines, risquant de porter atteinte au droit d’expression collective des idées et des opinions, argument rejeté par le CC.

De plus, selon la saisine, la nouvelle incrimination établirait une responsabilité pénale collective en permettant de juger une personne pour des actes commis par des tiers sans qu’il soit besoin de prouver qu’elle en a été co-auteur ou complice ; sa mise en œuvre conduirait à « établir une présomption de culpabilité du seul fait de la présence de cette personne dans un groupement ; qu’ainsi cette disposition méconnaîtrait le principe de la responsabilité du fait personnel en matière pénale, la présomption d’innocence et procéderait à une inversion de la charge de la preuve en méconnaissance des droits de la défense » : le Conseil valide pourtant cette disposition, mais en faisant une réserve d’interprétation, qui est plutôt un rappel des règles pénales “il doit être établi que (la personne) l’a fait en vue de commettre des violences contre les personnes ou les biens, à la condition que la préparation de ces infractions soit caractérisée par un ou plusieurs faits matériels accomplis par l’auteur lui-même ou connus de lui“.

2° - L’article 13 de la loi insère dans le code pénal les articles 431-22 à 431-28 destinés à réprimer l’intrusion de personnes non autorisées ainsi que l’introduction d’armes dans un établissement d’enseignement scolaire. Le CC valide ces dispositions : pour lui elles ne sont pas constitutives de double incrimination et n’instituent aucune responsabilité collective. Les peines encourues ne présentent pas de disproportion manifeste avec l’incrimination.

3° - En revanche, le Conseil a censuré l’article 5 de la loi à propos de la mise en place d’un nouveau système de vidéosurveillance (qui était en expérimentation depuis quelques années) : la transmission aux services de police et de gendarmerie nationales ainsi qu’à la police municipale d’images captées par des systèmes de vidéosurveillance dans des parties non ouvertes au public d’immeubles d’habitation.

L’article 5 de la loi insérait dans le code de la construction et de l’habitation un article L. 126-1-1. Celui-ci permettait la transmission aux services de police et de gendarmerie nationales ainsi qu’à la police municipale d’images captées par des systèmes de vidéosurveillance dans des parties privées d’immeubles d’habitation.
Le CC rappelle l‘article 2 de la Déclaration de 1789 : (” Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression “), la liberté proclamée par cet article impliquant le respect de la vie privée. Or le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence en permettant la transmission aux services de police et de gendarmerie nationales ainsi qu’à la police municipale « d’images captées par des systèmes de vidéosurveillance dans des parties non ouvertes au public d’immeubles d’habitation sans prévoir les garanties nécessaires à la protection de la vie privée des personnes qui résident ou se rendent dans ces immeubles » Il a donc omis d’effectuer la conciliation qui lui incombe entre le respect de la vie privée et d’autres exigences constitutionnelles, telles que la recherche des auteurs d’infraction et la prévention d’atteintes à l’ordre public.

Décision n° 2010-604 DC du 25 février 2010 Loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d’une mission de service public

  • Communiqué de presse

Actualités droits-libertés du 26 février 2010 par Sylvia Preuss-Laussinotte