Vous allez finir par trouver douteux mon enthousiasme répété, mais il est vrai que le héros de Gabriel Trujillo MUNOZ a eu l’heur de me plaire en toutes circonstances jusqu’à présent. Si le texte s’est copieusement rallongé cette fois-ci, le style est resté le même avec des chapitres courts, enlevés, sans fioritures, allant systématiquement et très rapidement à l’essentiel.
Mais ce n’est pas pour autant que Gabriel Trujillo MUNOZ bâcle l’ambiance, lésine sur le contexte, gâche l’idée qui lui fait faire évoluer son héros dans une nouvelle facette de la vie des villes du Mexique, frontalières des États-Unis. Mezquite Road commence par une entrevue houleuse entre un joueur compulsif criblé de dettes de jeu et la tenancière d’une boîte à qui il doit une facture qu’il sera bien incapable de rembourser. Et doňa Matilde le sait si bien qu’elle missionne sa garde du corps afin de faire un exemple de Heriberto González : mort, il aura plus de valeur que vif !
Ce qui, encore une fois, est passionnant dans ces petits polars de Gabriel Trujillo MUNOZ, c’est la narration brève, mais diaboliquement efficace qu’il fait du milieu dans lequel vivent les populations mexicaines frontalières : un œil sur le rêve américain dont les séparent des kilomètres de barbelés, un œil sur le milieu mexicain où la vie n’a aucun prix et où la drogue passe au travers de tous les trous de la clôture frontalière.
Mexicali, ville frontière où la police est complètement gangrenée par la corruption et où, peu de temps après son arrivée, Morgado s’entend dire qu’il n’est pas encore mort, car « le prix de (sa) tête n’a pas encore été divulgué ». Et on sent bien que la société dans laquelle évoluent policiers, motards en bandes, trafiquants de tous crins (auxquels il ne faut pas manquer d’ajouter des flics de tous calibres venus de chez les gringos pour arranger les affaires à leur sauce et toujours selon leurs intérêts exclusifs), a perdu tout repère et a totalement abandonné à leur triste sort les pauvres bougres, les sans-grade les innocents qui n’ont d’autre recours que d’être aussi transparents que possible afin de tenter d’éviter les coups qui ne leur sont pas destinés, mais qui manquent rarement de les atteindre.
Elle fait peur cette société sans loi qui transgresse tous les interdits et laisse au plus fort de l’instant la liberté de faire régner un ordre inique !
Et, encore une fois, les représentants des officines américaines ne sont pas montrés sous leur jour le meilleur, laissant la part belle à des arrangements troubles au prétexte de mieux pénétrer le milieu en vue de piéger les plus gros poissons. Un petit détail (important) pour terminer : il est plaisant de constater que notre privé n’a rien perdu, dans ce quatrième tome, des qualités attachées à ce métier et, bien évidemment, celle notamment de plaire aux (belles) dames !
Tout y est, je vous dis.
Retrouvez Mezquite Road, de Gabriel Trujilo Munoz, en librairie.