Illustrations: Béatrice-Anne de La Mare © Copyrigth 2007.
Illustrations : Béatrice-Anne de La Mare . ©
Préface : Claudéa Vossbeck-L'hoëst
Perles de cristal,
perles couleur des saisons d’une vie.
Enchaînements d’associations déchaînées…
Est-ce d’avoir lu la nouvelle de John Steinbeckn The Pearl, ou La Perle, qui entraîne, à la lecture des Perles de Cristal de Raymond Matabosch, autant d’émotions que d’associations mettant en parallèle la noyade de l’individu dans la corruption de masse?
Les associations en effet s’imposent d’elles-mêmes: les aspirations au bonheur de l’homme dans la contemplation des limites de sa condition. La révolte de l’homme face au choc de sa confrontation avec des motivations contradictoires. La solitude du chercheur qui se trouve rejeté par son entourage qui le jalouse. Tout ceci cristallisé en un seul objet: une perle.
Perle. Mot riche en connotations et associations. Se développant à l’abri des regards, au profond de l’eau, de la mer, berceau de nos inconscients, au coeur d’une coquille protectrice, une perle est réaction, absorption, cicatrisation d’une blessure, refoulement de l’agression dans un processus de sublimation. Sa rondeur a su absorber la blessure et en constitue la mémoire. La poésie serait-elle, telle une perle, la sublimation de souffrances à quelque niveau que ce soit, au profond de la sensibilité du poète?
Perles. Mot qui fait jaillir les images de bijoux, de belles femmes, et l’idée du dur labeur des pêcheurs de perles. Mot qui entraîne les qualificatifs de précieuses, naturelles, brutes ou raffinées. Il y en a de toutes sortes. Elles peuvent être sélectionnées pour une parure homogène, ou combinées plus librement, plus naturelle-ment, dans toute leur variété vive d’expression.
Tel est l’enchaînement de haïkus, alignements de formes métriques, rondes en elles mêmes du fait de l’image ou d’un ressenti, enrobées dans une ronde régularité de rythmes et de règles.
Telle une parure de perles naturelles, irrégulières, on ne saurait ici parler de simple agrément des sens: toute la richesse d’ex-pression réside dans sa variété, tant au niveau de l’incident qui provoque la réaction, qu’au niveau de la forme et de l’aspect que revêt cette dernière.
Les plus belles parures sont celles qui savent associer le régulier à la variation, l’élément attendu à celui qui surprend, marier les opposés, la matière dite noble, miroir des aspirations, à celle rugueuse exprimant les racines de l’être, les bases de la vie, les lois de la nature.
Pour ce recueil, Raymond Matabosch, poète au cuir tanné, a su séduire avec sa plume d’une rugosité raffinée le regard coloré de la jeune artiste peintre Béatrice Anne. Avec ses peintures qui parsèment le recueil, de petites fenêtres d’espoir d’un monde meilleur peut-être, ouvert à l’expression du ressenti surement, s’ouvrent partout dans les pages du poète et apportent une interprétation par ici, une variation par là, et si souvent une modulation du thème avec changement du mode mineur en mode majeur.
Dans leur Déclaration, lancée au Sénat de la République le 21 septembre 2007, les poètes réunis lors du 1er Festival International de la poésie, à Paris, ont souligné que, selon leur vision, la parole poétique « s’oppose aux injustices sociales et aux diverses formes d’exclusion », qu’elle est « engagée… se lève contre la dégradation de l’environnement, de la biodiversité, et les menaces qui pèsent sur les différents écosystèmes qui constituent un bien commun de l’humanité ». Comparés à ces résolutions, les écrite de Raymond Matabosch se révèlent ultramodernes dans leur engagement qui prend racine dans un mode d’expression qui a une tradition millénaire
La poésie de Raymond Matabosch n’est pas toujours mélodieuse à lire, pas toujours agréable à intégrer, pas toujours coulante à déguster, mais toujours engagée. A ce titre, maniant l’art d’une expression poétique millénaire, il s’intègre dans un développement artistique résolument contemporain assumant le grand écart entre richesse de contenu et simplicité du contenant, richesse du ressenti et précision concise de l’énoncé, expression claire et association ambiguë, forme polie et idées tranchantes.
Perles de cristal… La grande perle de Steinbeck… Le cristal…
La plus grande perle de cristal, n’est-ce pas une boule de cristal? Matière noble de par sa grande pureté, qui sait capter lumières, reflets et ombres et leur donner forme selon ses facettes. La boule en est le symbole le plus profond car sa surface sans facettes produit des reflets venant de sa profondeur. Si cette immense perle de cristal est synonyme d’expression de l’inconscient, les perles de cristal qu’offre Raymond Matabosch, seraient-elles autant de regards sur le monde, sur les émotions, sur l’homme, sur les événements, sur l’histoire, en connaissance inspirée?
Claudéa Vossbeck-L'hoëst