Comme tous les ans, Saint-Valentin oblige, les fashionistas du monde entier attendent l’objet de tous leurs désirs : la 6ème édition du Manifesto Yves Saint Laurent... consécration, déception, ou assassinat. Le Manifesto YSL, objet fashion non-identifié il y a encore 6 ans est devenu aujourd’hui un it-RDV dans les rues de Paris, Londres, Milan, Tokyo, Hong Kong et Berlin.
« Le Manifesto » créé par la marque YSL est un « semi-viol » des codes habituels de l’univers très conventionnel du luxe, par sa réinterprétation des codes des magazines gratuits (type 20 minutes), et par l’intégration du street-marketing (tags + tracktage) dans les usages d’une marque de luxe. Cette « subversion de luxe » ne pouvait être que le fait de la Maison Saint Laurent. Après Gisèle Bundchen sur le pavé parisien, Naomi Campbell,Kate Moss et Claudia Schiffer, C’est au tour de l’ « Etam girl » Natalia Vodianova d’être mise en scène dans une série de photos utilisées pour la dernière campagne publicitaire Printemps/Eté 2010. A publication attendue, distribution exceptionnelle. La marque a attendu 11 heures du matin pour publier les lieux et heures de distribution pour la ville de Paris. Premier spot: le magasin Colette. Miss Planning s'y est donc précipitée pour vous faire partager quelques minutes de folie.
H-1 : Devant le magasin Colette, rien d'inhabituel, aucun signe du Manifesto ni des fans de la marque. Angoisse. Me voilà donc arpentant le magasin (pour attendre 14h, heure du RDV), et là au premier étage: Suprise ! Des exemplaires papier du Manifesto négligemment posés sur un banc. La vendeuse m'informe que je peux me servir, autant vous dire que je ne me suis pas génée ! En redescendant, je me fais accoster par deux fans tout aussi surpris que moi.
13h30: Je ressors du magasin, mes exemplaires papier en main. Nous sommes tout au plus une dizaine à avoir repéré la combine.
13h45: La camionnette "presse" d'YSL se gare rue du 29 Juillet. Une organisatrice nous demande d'attendre que les hôtesses s'installent. De 10, il me semble que nous sommes maintenant une cinquantaine. L'anglais est de mise devant le magasin, on vient de partout pour espérer avoir le précieux Graal.
14h: C'est parti ! Les mains se précipitent, les hôtesses sont à moitié écrasées. Ma main attrape l'anse de la version tissu, une autre fan à l'autre bout... je tire... je l'ai !!!! Les gens sortent tant bien que mal de la foule qui s'est maintenant agglutinée devant le magasin, mais les sourires sur les visages, le fameux sac en main montrent que ces minutes de folie en valaient la peine !
Résultat des courses : un ongle cassé, les pieds en compote et surtout une grande déception.
L’opération buzz du Manifesto est certes populaire, mais le contenu est une trahison... « The triumph of spirit » déclare la marque. De l’esprit YSL qui se voulait révolutionnaire, il ne reste plus rien. Le Manifesto qui se targuait d’emprunter les codes des gratuits, et d’avoir une dimension transgressive, retourne au bercail, en jouant la petite musique trop entendue des Fashionistas, et d'un Luxe show off... sans esprit. Spots de distribution triés sur le volet, format poster, édition limitée à 500 000 exemplaires dans le monde, le Manifesto est certes devenu collector, mais un objet de collection pour "matérialiste". Les valeurs Manifesto, l’esprit Saint Laurent ne sont plus, RIP.