Pendant que lundi soir nous nous endormions dans une chambre d’hôtel minable de Miami - chambre dite non fumeur mais dont les derniers visiteurs en avaient grillé quelques unes -, la terre a tremblé en Haïti. Il semble de plus que la nuit dernière, elle aurait tremblé aussi, mais le sommeil était plus profond que la crainte, on n’a rien senti. Ce matin à la radio, on a entendu Dieuseul Anglade, le directeur général du Bureau haïtien des mines et de l'énergie (BME). Quand tu te prénommes Dieuseul, on t'écoute... Cet ingénieur du BME explique très clairement et simplement que que les secousses qui secouent étaient prévisibles et sans nouveau danger réel ; se yon bagay nomal (tout se déroule normalement). Les scientifiques avaient prévu ces secousses et que leur déroulement actuel (intensité, fréquence et durée) n’est pas atypique dans la dynamique des plaques tectoniques (j’aime la rime). En fait, il était très rassurant. L’animateur l’amène lentement mais sûrement sur des aspects un peu plus mous que la science des plaques tectoniques, mais tout autant ‘solides’ dans une société fortement animiste ; les esprits, les croyances religieuses, les forces maléfiques, … Un vrai patineur artistique. Assez conscient des limites de crédibilité de son discours ‘scientifique’ face à ces enjeux mystiques, il a réussi très habilement à patiner entre ces deux rapports au monde ‘contradictoires’; le doute et le dogme. Il a en même temps maintenu son message de confiance quant à la situation sismique du pays, et celui sur l’importance de la religion pour favoriser l’élan de compassion et de solidarité nécessaire à la sortie de crise. Il est même resté calme et intelligent quand l’animateur l’a amené sur le sujet de ces personnages qui tous les jours nous annoncent (à la radio ou dans un lieu de culte) avoir lu quelque part où il n’y a rien d’écrit, la date prochaine d’un nouveau séisme pire que celui du 12 janvier. Un vrai cours de communication en cas de crise.