Voici quelques nominations attendues, l'une à la Cour des Comptes, les autres au Conseil Constitutionnel, un dérapage électoral en Ile-de-France, et l'éthique présidentielle en prend un coup. Relancer l'ouverture à trois des élections est une tactique de la dernière chance. Des exemples, différents, des limites éthiques, maintes fois commentées, de la Sarkofrance.
Nominations monarchiques
Nicolas Sarkozy a décidé de nommer un socialiste, et pas le moindre, à la tête de la Cour des Comptes pour remplacer Philippe Séguin. Didier Migaud, l'obstiné président de la Commission des Finances à l'Assemblée Nationale, ressemble à une prise de choix. Le Monarque trouble une nouvelle fois le Parti Socialiste. Jack Lang a félicité Migaud sans attendre la confirmation officielle. D'autres se disputent son remplacement à la commission des finances. François Hollande s'y verrait bien. Martine Aubry est réticente. Lors du Conseil des Ministres du 23 février, le Monarque s'est contenté de commenter ainsi cette "relance de l'ouverture": "C’est la marque d’une politique d’ouverture que je compte poursuivre." Benoist Apparu, l'un des "jeunots" du gouvernement ne s'est pas épargné en louanges: " Le fait que les deux institutions qui contrôlent le budget de l’État sont tenues par des personnalités de l’opposition est résolument moderne. C’est le signe d’une démocratie totalement aboutie. " Cette nomination est éminemment politicienne. Nicolas Sarkozy cherche à troubler l'opposition socialiste, quelques semaines avant les élections régionales. La manoeuvre ne trompe personne.
Nomination plus discrète, le responsable internet de l'UMP serait pressenti pour intégrer l'HADOPI, cette autorité administrative qui sanctionnera les pirates du Net. Cet "apport" de l'UMP au filtrage du Net sera moins commenté par les caciques de l'Elysée.
Nicolas Sarkozy a aussi nommé Michel Charasse au Conseil Constitutionnel. La nouvelle n'est pas surprenante. Le sénateur, anciennement socialiste, avait fait part de cette envie dès la campagne présidentielle de 2007 au candidat de l'UMP. "On est entre amis" avait commenté Eric Woerth, alors trésorier de campagne de Sarkozy, après une visite remarquée de Nicolas Sarkozy dans le fief de Michel Charasse. Ancien ministre du budget de François Mitterrand, Michel Charrasse avait depuis longtemps abandonné la cause de son camp politique au profit de sa cause personnelle. En 2007, la "trahison" était manifeste. En 2008, Michel Charasse a officialisé sa "mue", en quittant le PS. La nomination de Charasse n'est pas une prise d'ouverture mais la promotion d'un zélote à la plus haute institution juridique du pays.
A droite, ces nominations font grincer des dents. Yves Thréard, le directeur de la rédaction du Figaro, ne cache pas son agacement. Sur son blog, il écrit : "Nicolas Sarkozy a donc fait le choix de continuer sur le chemin de l'ouverture. Il pourrait s'en mordre les doigts car, aux yeux de nombre d'électeurs de droite, la barque est pleine, prête à couler." (...) "Face à l'ouverture, l'électorat de droite pourrait menacer de se replier sur lui-même. Et le faire savoir en 2012. "
Nicolas Sarkozy nomme, ou fait nommer. Ainsi Christine Albanel, ancienne ministre de la Culture jusqu'en juin dernier, va rejoindre France Télécom à la direction de la communication de l'entreprise publique, auprès de Stéphane Richard, l'ex-directeur de cabinet de Christine Lagarde devenu en quelques mois patron du groupe (semi)public de télécoms. Nicolas Sarkozy a également eu raison de Pierre Louet, le patron de l'AFP. Ce dernier venait d'être réélu à la tête de l'agence d'information. Le voici qui file également chez France Télécom pour en prendre le secrétariat général. L'AFP avait été de nombreuses fois critiquée par des proches du chef de l'Etat, jugeant qu'elle ne relayait pas suffisamment les communiqués de presse de l'UMP. A l'approche de l'élection présidentielle, l'Elysée place ses pions, sans opposition ni critique.
Quand la droite donne des leçons d'éthique
En Ile-de-France, la campagne de Valérie Pécresse a dérapé. Le maire UMP de Franconville a cru bon de donner une leçon d'éthique politique à Jean-Paul Huchon. vendredi dernier, il avait qualifié Ali Soumaré, tête de liste PS dans le Val d'Oise, de "délinquant multirécidiviste chevronné” et de “repris de justice” , et demandé son retrait de la campagne. Le porte-parole de l'UMP, Frédéric Lefebvre, fut trop content d'enfoncer le clou, en précisant que ces accusations s'appuyaient sur des “des documents très précis”. Manque de chance: l'UMP s'est trompé de Soumaré, le vrai condamné était mineur en 2004: "Le jugement du 8 février 2007 n’est pas un jugement rendu par le tribunal correctionnel, c’est un jugement rendu par le tribunal pour enfants et il ne concerne pas Ali Soumaré qui est né le 25 décembre 1980 (...) C’est un problème d’homonymie", a expliqué la procureure Marie-Thérèse de Givry à France Info. Eric Raoult, Chantal Jouanno, et Axel Poniatowski se sont désolidarisés de leur collègue Pécresse. Cette dernière a donné son accord à la publication du communiqué de presse de François Delattre. Bingo ! Ali Soumaré a bien été condamné, il y a longtemps et pour d'autres faits, et sa candidature est parfaitement légale.
On s'est également vite interrogé sur l'origine de ces (fausses) fuites : les allégations de M. Delattre sont si précises qu'elles pourraient provenir d'une consultation du fichier STIC (Système de traitement des infractions constatées). Ce fichier contient les infractions commises par des personnes. Il ne répertorie pas systématiquement leurs issues judiciaires. Or l'accès à ce fichier est réservé au personnel policier. Le Figaro est venu au secours du maire UMP, auteur de ces accusations, en expliquant : "il est facile d'obtenir la copie d'un jugement que l'on connaissait auparavant." Pourtant, l'un des jugements, celui du tribunal pour enfants de 2004 qui ne concerne justement pas Ali Soumaré, n'a pas été rendu public. M. Delattre a donc des sources bien informées...
Sur son blog, Yves Thréard, toujours le même, demandait lundi dernier à Jean-Paul Huchon de s'expliquer : "C'est donc à vous, candidat à votre réélection à la présidence de la région Ile-de-France, de faire toute la lumière sur le profil de votre protégé. Ou à son avocat. " M. Thréard ne savait pas que l'accusation portée par l'UMP francilienne relevait plutôt de la diffamation.
Mince.
Ami Sarkozyste, qu'en penses tu ?