Energie : Notre état ne veut plus que du "vert"

Publié le 24 février 2010 par Objectifliberte

Un Guest Post signé Jean-Michel Bélouve

Le XXIème siècle pourrait devenir le siècle du tout-électrique, comme le XXème a été celui du pétrole, et le XIXème celui du charbon. Si l’on veut que l’usage de l’automobile électrique se répande, que le chauffage ne soit pas générateur de gaz plus ou moins nocifs tout en restant une solution à portée de toutes les bourses, que l’industrie utilise moins d’hydrocarbures importés, il convient d’assurer au pays les capacités de production d’électricité à énergie primaire non fossile, et, dans ce domaine, les centrales nucléaires constituent  actuellement, et pour de  nombreuses années encore, la solution la plus éprouvée, la plus performante et la plus compétitive (avec l’hydroélectricité, qui manque de sites pouvant être équipés). De plus, le combustible nucléaire constitue une ressource qui sera disponible pendant des milliers d’années.
Entre la décision de construire une centrale nucléaire et le démarrage de sa production, il s’écoule environ huit ans. Si l’on pense que l’électricité doit voir sa part de marché croitre au détriment des hydrocarbures, c’est maintenant qu’il faut décider d’investir.
Emmanuel Grasland, dans Les Echos du 24 février, rend compte d’un projet de Gaz de France-Suez pour la construction d’une centrale de type ATMEA, technologie nouvelle et complémentaire d’EPR car adaptée à des unités de plus faible puissance. Le but est double : élargir la part de marché national et européen de GDF dans l’électricité, et créer une vitrine qui permettra de vendre ce type de centrales à de petits pays, tels que la Jordanie, pour lesquels les centrales EPR sont surdimensionnées. La stratégie de GDF parait donc cohérente : marché porteur, choix d’un créneau délaissé par son concurrent EDF…
Oui, mais une décision de marketing industriel ne se prend pas comme cela dans notre beau pays. Les Echos concluent l’article en exposant le point de vue étatique :

"Au sein du gouvernement, le dossier est sensible. La nécessité de construire ou pas un autre réacteur fait débat en France, compte tenu de la désindustrialisation du pays et des politiques de maîtrise de l'énergie. Le projet risque aussi de se heurter à l'opposition farouche de la CGT. Contacté, GDF Suez n'a pas souhaité faire de commentaire."

Un industriel ne peut donc définir son plan de développement en fonction des opportunités de marché, de ses ressources propres et de ses objectifs commerciaux. Il doit en passer par les fourches caudines de nos gouvernants. Liberté d’entreprendre ? Vieux souvenir !

Quant à l'argument "compte tenu de la désindustrialisation de la France", il laisse particulièrement pantois. L’état l’accepte comme une fatalité, et se fonde sur cet argument pour s’arroger de décider, à la place de l’industriel, ce qui est bon et ce qui ne l’est pas.

Imposer taxe carbone ou un "paquet européen énergie climat" aura il est vrai pour conséquence de brader nombre de filières industrielles dans lesquelles notre pays a dans le passé exprimé son savoir faire de belle façon.  Adieu raffineries, sidérurgie, métallurgie, cimenteries, verreries, chimie, papeteries, cartonneries, allez régurgiter votre CO2 en Inde et en Chine, ou au diable vauvert. Alors dans ces conditions, pourquoi nos politiques approuveraient-ils un réacteur nucléaire de plus ? Non, qu'importe que des moyens d'accroitre notre production de façon rentable existent, ils nous parlent de "maîtrise de l'énergie", pour ne pas dire son rationnement. La pollution de la pensée politique par l'écologisme de la décroissance le plus extrémiste est hélas de plus en plus flagrante.

Et puis, l'on apprend au détour d'une phrase que le projet déplairait à la CGT, face à laquelle nos dirigeants successifs ont pris l’habitude de se coucher ! Halte au nucléaire, Greenpeace et la CGT l’exigent ! Seuls ont droit de cité auprès de nos élites bien pensantes les agro-carburants dont nos agriculteurs ne peuvent plus se passer (faute de pouvoir développer leur marché dans le secteur des OGM), les éoliennes tellement peu productives, le photovoltaïque qui s’amortit en 60 ans, et, pactole escompté pour demain, la séquestration du carbone.
C’est en puisant toujours plus au fond des poches des contribuables que l’on compte faire vivre ces activités qui n’auraient aucun avenir économique sans la conjonction de règlementations liberticides et de largesses financières publiques qui laminent les pouvoirs d’achat individuels et mènent l’Etat à la ruine... Mais elles seraient tellement créatrices d’emploi, à en croire nos élites gouvernantes ! Ainsi remplace-t-on les emplois créés par le marché et la réussite industrielle par des emplois (enfin, moins d'emplois...) payés par les contribuables, et qui ne dureront que le temps que le budget public pourra en subir le poids.
--------------
Jean Michel Bélouve (son site), qui livre de nombreuses analyses sur la géo-économie du changement climatique pour l'institut Turgot, est l'auteur de "La Servitude Climatique - Changement Climatique, Business et Politique", aux éditions Libermédia, livre déjà  présenté ici.