Christian Estrosi, maire de Nice et ministre de l'industrie depuis 2009, s'est exprimé hier dans le Talk organisé par Le Figaro en faveur d'un « patriotisme industriel » français. Le relookage du protectionnisme en patriotisme économique puis en patriotisme industriel ne suffit cependant pas à masquer la vacuité et surtout la dangerosité d'une telle idée.
Le patriotisme économique (ou industriel) n'est qu'une démarche protectionniste visant à protéger certaines industries au nom d'un supposé « intérêt général ». L'expression a connu un certain succès, ponctuel, dans le langage politicien. En effet, désignant avec un mot nouveau une réalité ancienne, il permet aux tenants du protectionnisme de continuer à y avoir recours malgré le bilan catastrophique des politiques protectionniste. En outre, comme le notait un article du journal Le Monde, parler de patriotisme économique permet de taxer ceux qui s'opposent de mauvais patriotes. Geoffroy Roux de Bézieux, alors président de Croissance Plus, déclarait en 2006 : « On sous-entend que les entrepreneurs ne sont pas des patriotes, qu'ils sont vendus à la mondialisation » [1].
Pour l'intérêt général, les résultats ont été catastrophiques : les résultats concrets de la politique industrielle passée (Crédit Lyonnais, industrie informatique inexistante malgré des milliards de subvention (Bull, Plan calcul, etc.) ne laissent pas plus transparaitre les vertus de l'« État-stratège » tant vanté par les zélateurs du patriotisme économique comme Christian Estrosi...
Seuls gagnants, les dirigeants proches du pouvoir qui réussissent à obtenir cette protection injuste. Au final, le patriotisme économique ou industriel n'est que la défense des intérêts des producteurs, au détriment des intérêts des consommateurs, qui doivent payer plus chers pour un produit qu'ils auraient pu acheter à meilleur prix.
L'analyse de l'école du Choix Public permet d'éclairer les raisons qui font que de telles politiques grandioses sont condamnés : l'État, ce sont des hommes, avec des intérêts personnels, des relations, etc. Ainsi, plus que des critères objectifs, c'est la collusion entre haute fonction publique et grand patronat qui explique certains choix, par la consanguinité de ces deux mondes à travers des établissements comme l'ENA en France. Mathieu Laine parle ainsi de ces « patrons du CAC 40 [qui] appellent au secours leurs amis ministres pour tenter d'enrayer le jeu naturel du marché et protéger leurs propres intérêts »
Sur Contrepoints, on pourra lire un article de Mathieu Laine : Le patriotisme économique ou le syndrome de la nurserie française
[1] « Les patrons se méfient du patriotisme économique », Le Monde, 14 mars 2006