Madjid Kakavand commence à trouver le temps long. Dans une interview accordée à l'agence de presse ISNA, cet ingénieur iranien, retenu sur le territoire français depuis presque un an, accuse la France d'avoir politisé son dossier. « La justice française est convaincue que je n'ai jamais enfreint la loi mais elle ne statue pas sur mon dossier en raison des pressions politiques, et reporte régulièrement le verdict », se plaint-il.
Petit rappel des faits. Le 20 mars 2009, Madjid Kakavand est arrêté dès son arrivée à Paris, en vertu d'un mandat d'arrêt international émis par les Etats-Unis, qui réclament son extradition. Détenu à la prison de la Santé pendant cinq mois, puis assigné à résidence, cet Iranien de 37 ans est accusé d'avoir violé l'embargo américain sur les ventes de produits à « double usage », civil et militaire, à l'Iran. Mais la justice française tarde, selon les autorités iraniennes, à donner sa décision. Le 17 février dernier, elle a fait savoir qu'elle voulait demander l'avis technique de la DGA (Direction générale de l'armement) et de deux services spécialisés du ministre de l'Economie, avant de statuer sur son sort.
D'abord peu médiatisée, l'affaire Kakavand semble avoir pris un nouveau tournant, cet été, avec l'arrestation, en Iran, d'une jeune française, Clotilde Reiss, accusée, entre autre, d'avoir participé aux manifestations post-électorales. Libérée sous caution à la mi-août, elle a été convoquée plusieurs fois au Tribunal révolutionnaire de Téhéran. Depuis la dernière audience, le 16 janiver, elle attend son verdict.
Ces deux dossiers sont-ils liés ? En France, la question fait débat, et de nombreux observateurs se demandent si la décision iranienne concernant Clotilde Reiss n'est pas conditionnée à celle de la cour d'appel de Paris concernant Madjid Kakavand. Dans son interview, l'ingénieur iranien renvoie, lui, la balle dans le camp français. « J'ai peur que le gouvernement français ne soit pas neutre à propos de mon dossier. Sinon, la justice n'aurait pas reporté mon verdict », dit-il à l'ISNA, en accusant la France d'agir sous la pression des Etats-Unis. « Les Etats-Unis ne cessent d'accentuer la pression sur la France. Les relations stratégiques franco-américaines ont affecté ce dossier. Mais j'espère que la justice française préservera son indépendance afin de pouvoir rendre un verdict équitable », poursuit-il.