Lorsque le duo Martin Scorsese / Leonardo DiCaprio s’attaque à un polar, ça donne Shutter Island. Un film noir et prenant. Le film de l’année ? peut-être.
Après avoir exploré ensemble la fondation de New York, la vie d’Howard Hugues et la mafia de Boston, voici que le duo Martin Scorsese /Leonardo DiCaprio s’invite dans le polar. Et lorsque ce duo de choc qui a bien fait ses preuves, autant derrière que devant la caméra s’attaque à ce genre sombre, il n’y va pas avec le dos de la cuillère en adaptant le Shutter Island de Dennis Lehane (Mystic River).Autant le dire tout de suite, l’ambiance est mise en place dès le début du film. Un bateau en plein brouillard, le Marshall Ted Daniels débarque sur Shutter Island en compagnie de son collègue pour mener une enquête. L’une des patiente de l’hôpital psychiatrique situé sur l’île s’est évadée. La mission du Marshal : la retrouver. Mais l’île, ses locataires (docteurs et patients) et même Ted cachent bien des mystères.
Pour ceux qui se demanderaient si le film est fidèle au roman de Lehane, n’ayez crainte, il le respecte à la lettre et connaitre le final n’entache pas la vision du film. Mais pour ceux qui aiment le cinéma, rassurez-vous aussi, Scorsese ne fait pas qu’une simple adaptation. La mise en scène du maître new-yorkais est tout simplement époustouflante. Il nous plonge dès les premières images dans cette ambiance lourde, sombre, poisseuse. Il suit son héros à la trace et nous nous posons les même questions que lui alors que nous apprenons aussi à le connaitre. Notre esprit vient presque faire corps avec celui du héros, en pleine paranoïa, on se demande bien ce qu’il se passe sur cette île et lorsque Ted sombre, on plonge avec lui. Scorsese fait encore preuve ici d’un savoir faire hors du commun. On sait bien sûr depuis des dizaines de films qu’il est un maître, mais nous faire plonger ainsi dans la noirceur d’un film aussi sombre et torturé est tout de même unique. Il ne s’agit pas d’un simple polar, mais également d’un film intemporel, un peu un hommage aux anciens polars (on pense à Hitchcock ou Kubrick en voyant le film, son ambiance sonore et musicale et son déroulement) qui marque vraiment les esprits après la séance.Bien sûr, on ne pourra parler de ce Shutter Island sans les performances des acteurs. On le sait, l’association Scorsese / DiCaprio a apporté toute sa crédibilité au jeune acteur du Titanic et il prouve encore ici qu’il est un grand acteur. Son jeu est intense, son personnage est dense, il a vécu des épreuves terribles et sombre peu à peu dans la paranoïa et la folie en nous emportant avec lui au fond du gouffre. Rarement Leonardo DiCaprio mit les spectateurs autant à l’épreuve et on sent que le comédien s’est bien livré. Mais le reste de la distribution est tout aussi remarquable car si Mark Ruffalo fait preuve d’une sobriété exemplaire, Ben Kingsley et Max Von Sydow font froid dans le dos dans les rôles des docteurs. Et il y a également un Jackie Earle Haley (Watchmen) que l’on voit peu mais dont la silhouette marque. Sans oublier Michelle Williams qui éclaire le film dans des flash back d’une beauté tragique où l’imagination de Scorsese fait des miracles.
Le défaut du film ? Une révélation peut-être prévisible et un film peut-être un peu trop expliqué. Mais cela n’entache point la vision globale du film tant l’atmosphère y est pesante et la réalisation de Scorcese au cordeau. De plus, notre empathie avec le personnage de DiCaprio et la dernière scène ambigüe sont bien là pour nous faire vire cette enquête viscérale.Vous l’aurez compris, Shutter Island n’est pas qu’un simple film. C’est une enquête sombre et une experience choc dans laquelle le Scorsese et DiCaprio livrent tout. Le film de l’année ? C’est encore trop tôt pour le dire mais il va assurément prendre place aux côtés des chef d’œuvre du film noir.