La vie de Joanie Rochette m’a ramené violemment à la mienne. Il y a quelques années, j’ai appris que mon frère avait un cancer la veille d’un spectacle d’humour.
L’humour ce n’est pas du théâtre « ordinaire» , c’est le théâtre de la légèreté et du plaisir, on ne peut pas se servir de nos douleurs pour les propulser hors de soi, faut les étouffer, les écraser dans un coin, le temps du show.
J’ai été déchiré entre l’option de canceller le spectacle, et celui de faire face à mes engagements. Puis, parce que je ne voulais pas être celui qui rendrait public la maladie de mon frère, j’ai décidé de faire le spectacle quand même, et appeler un ami pour qu’il m’accompagne.
J’ai fait un show différent ce soir là. Au lieu de « donner» un show, j’ai décidé de « prendre» chaque rire du public comme un peu de réconfort, pour ne pas casser. J’ai tenu le coup, puis après je me suis effondré, vidé.
Chaque jour des milliers de personnes, font des gestes banals en étant habité d’une profonde tristesse, chaque jour il y a des milliers de Joanie Rochette qui avancent quand même….Ces milliers de personnes ont eu une pensée spéciale pour elle hier, hier soir, elle n’était pas toute seule dans ses patins…