Ce n’est une découverte pour personne, la santé morale des salariés est au plus bas depuis quelques années. De crises en licenciements, de restructurations en délocalisations, les salariés de nombre d’entreprises françaises sont déconsidérés, ou plutôt considérés comme un “asset”. Il est assez difficile d’en déterminer les raisons objectives en quelques lignes, et n’étant pas sociologue moi-même, je ne parlerai que d’un ressenti, au fil de mes 20 dernières années.
Plusieurs facteurs doivent être pris en compte, à mon sens:
- le “capitalisme d’héritier” dénoncé il y a quelques mois dans un excellent ouvrage de Thomas Philippon
- la dé-responsabilisation du “middle management“: c’est l’effet sous-officier. A force de pousser vers le l’encadrement des gens qui n’étaient pas faits pour cela, on a créé une caste d’individus au sein des grands groupes dont la seule tâche est de protéger leurs postes, au détriment de toute initiative ou de véritable encadrement.
- une logique de revenus plus basés sur la réduction des coûts (donc délocalisation, sous-traitance à bas prix que sur l’acquisition de nouveaux marchés
- l’absence d’un “small business act” à la française, qui aiderait à développer les PME par exemple en incitant les grands groupes à s’approvisionner de préférence auprès de PME nationales, PME où il fait meilleur vivre que dans nombre de “grands groupes”
Suite à la vague de suicides des derniers mois chez un opérateur télécom bien connu (mais aussi chez un fabricant auto tout aussi connu et surement d’autres entreprises), le ministère du travail a pris conscience du problème, et a lancé une campagne de sensibilisation auprès des grandes entreprises, dont les résultats ont été divulgués il y a quelques jours. Excellente initiative. Hélas, le résultat le plus visible aura été la reculade de ces dernières heures: en effet, alors que le site proposait une liste des entreprises vertes (celles où une démarche avait été lancée, comme Chantelle, Coca Cola, Danone ou Yoplait, mais apparemment aucune entreprise Dassault, erreur de casting?), une liste d’entreprises “oranges” qui se sont réveillées à la dernière minute, et une liste d’entreprises “rouges” qualifiées de mauvais élèves, ce matin, il ne reste plus que la liste verte. Exit les mauvais élèves.
Ainsi, comme l’avaient si bien remarqué les auteurs des “réformes ratées du président“, le gouvernement a beau lancer de belles initiatives, il suffit que les corporatismes visés élèvent la voix pour que cela finisse en eau de boudin. Décidément, le stress au travail a encore de beaux jours devant lui…
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