C'est ma chanson du dimanche, peut être et sans doute parce que selon la coutume le grand Cacou lui même se serait reposé ce jour-là après avoir marné toute la semaine. Et pour ceux à qui ça filerait des boutons ou qui profiteraient de l'occasion pour dire qu'ici on est chez laïque et que donc on s'en fout des fêtes religieuses, z'avez qu'à aller voir chez l'empereur Constantin si j'y suis ou plus proche encore du côté de la chambre (anti-cléricale) en 1906.
Et puis quoi alors, toutes les occasions sont bonnes à prendre quand il s'agit de se sortir cinq minutes des griffes de l'exploiteur qui lui est par essence rappelons-le apatride et immoral et qui en voudra donc toujours plus et pas cher-demandez donc à nos potes chinois ce qu'ils en pensent...
C'est ma chanson du dimanche, parce qu'elle dit entre-parenthèses qu'on peut être fier d'être exploité et usé par le travail... Ou là, je me doute bien que si si je présente l'affaire de cette manière, des bataillons en rangs serrés de" représentants" établis de la classe ouvrière vont me tomber dessus pour me traiter de social traite ou autre gentillesse dont ils ont le secret. Et pourtant, et avec tout le profond respect que j'ai pour l'ouvrier, le paysan, l'employé ...même si en politiquement correct, il faudrait plutôt dire qu'on est fier de son travail (même si, il vous tue, amiantés and co je vous salue) qu'on s'est sacrément bagarré pour le conserver et qu'on se battra encore et toujours, parce qu'entre un boulot de merde et plus rien on sait forcément de quel côté on va pencher-pas le choix...
Alors oui il arrive, même si ça se perd (sans pour autant, que ça aille mieux d'ailleurs) qu'on rentre en boulot comme en religion, et ici même sur le (comme on disait) bassin ouvrier de Saint-Nazaire, j'en ai vu des copains qui arrivaient au chantier parce que leur père y était allé avant eux et leur grand-père aussi, et oui, c'est notre mine à nous. Et s'agissait pas alors d'émettre le moindre soupçon d'idée- forcément farfelue-que dis-je hérésie! d'une autre possibilité de taff, y'avait pas le choix ou alors c'était le banissement assuré...et tant pis si le grand-père était sourd avant l'heure à force d'avoir tapé sur des rivets et son fils shooté au gros rouge consigné de chez Jeannette à Penhoët, quand il s'agissait d'aller au lance-pierre se payer un larbin bleu casqué , planqué derrière les grilles de la sous-pref., toute la famille sonnait le rassemblement et l'unité de la classe ouvrière;
et puis aussi , la larme collective mais sans le lacrymo, les jours de départ des grands paquebots où l'on avait drôlement trimé dessus, tout en sachant qu'on en goûterait jamais de l'épaisse moquette, réservée -Oh bonne blague- à ceux là même qui nous fouteraient un jour au chômage...Mais voilà, c'était du beau travail -collectif-et l'on pouvait en être fier.
C'est ma chanson du dimanche que j'offre au vieux monsieur vendeur de l'Huma. du marché.
Lui, il est là chaque dimanche, qu'il pleuve ou qu'il vente depuis...
Je lui en ai acheté parfois... heu! rarement , c'était pas vraiment ma tasse de thé le stalinisme même si aujourd'hui il s'est drôlement allégé de ses matières grasses...mais bon, pour en avoir côtoyé quelques uns de près , j'ai un profond respect pour ces militants de toujours de la cause sociale, et même si je les égratigne parfois de ma plume -et c'est facile, ils s'y prêtent tellement...ils ont le grand mérite -eux- de croire en l'homme plutôt qu'au fric, et franchement, quelle que soit leur boutique, ça mérité bien une certaine déférence.
"Il a refermé la porte douc'ment
Pour pas réveiller "Maman"
Il a j'té l'Huma
Sur l'canapé près du chat
S'est assis dans un coin
La tête dans ses mains
Cinquante balais c'est pas vieux
Qu'est-c'qu'y va faire de son bleu
De sa gamelle de sa gapette
C'est toute sa vie qu'était dans sa musette
Y r'voit toutes ses années au chagrin
Et tout l'cambouis sur ses mains
Y r'pense à son gars
Qui voulait faire péter tout ça
Ça a pété sans lui
Sans douleur et sans cris
Où c'est qu't'as vu un bon Dieu
Qu'est-c'qui va faire de son bleu
De ses bras de travailleur
C'est toute sa vie qu'était dans sa sueur
Pourquoi y r'pense aujourd'hui au p'tit
V'la dix ans qu'il est parti
"Salut pauv' cave
Tu s'ras toujours un esclave"
Eh ben tu vois gamin
Aujourd'hui j'suis plus rien
Pas fini d'se faire des ch'veux
Qu'est-c'qu'y va faire de son bleu
D'son drapeau rouge de son Lénine
C'est toute sa vie qu'était dans sa machine
Y va réveiller "Maman"
peut-être Lui dire : "Toujours pas de lettre
Il reviendra Il pense à nous,
t'en fait pas, là-bas
Dans la guérilla Au Nicaragua"
Renaud-" Son bleu" - album: "A la belle de mai"-