Le président russe, Dmitri Medvedev, a limogé jeudi une quinzaine de hauts responsables de la police et ordonné une vaste réforme du ministère de l’Intérieur pour juguler la criminalité au sein des forces de l’ordre, au coeur de nombreux scandales. « Ce n’est que le début » de la réforme, a-t-il prévenu, face à une assemblée de hauts responsables du ministère, dans un discours très détaillé et repris en longueur par les agences russes.
M. Medvedev a transmis jeudi au Parlement un projet de loi prévoyant que le fait d’être un agent du ministère de l’Intérieur soit considéré « comme un facteur pénal aggravant » si celui-ci commet un crime ou un délit.
« Il faut lutter avec sévérité contre ceux qui enfreignent la discipline. celui qui n’obéit pas à un ordre est un criminel », a-t-il martelé. Dans la foulée de son discours, le président a limogé deux vice-ministres de l’Intérieur et une quinzaine de hauts responsables de la police dont dix généraux, selon des communiqués du Kremlin.
Il a aussi signé des décrets pour retirer aux policiers des domaines de compétences où fleurissent la corruption et les abus de pouvoir, à savoir le contrôle technique de véhicules, les expulsions d’immigrés et les centres de dégrisement.
Le chef de l’Etat a ordonné par ailleurs au gouvernement dirigé par son prédécesseur, Vladimir Poutine, de mettre en place d’ici au 1er décembre un nouveau cadre législatif sur le travail de la police.
Il a aussi intimé au ministre de l’Intérieur, Rachid Nourgaliev, d’établir d’ici à un mois un plan de lutte contre la corruption au sein du ministère et un projet pour améliorer la qualité du recrutement.
Dmitri Medvedev a aussi souligné que la police devait mettre en oeuvre ces mesures après avoir été ces derniers mois au coeur d’une multitude de scandales incluant meurtres, viols, corruption et falsifications de preuves.
« Il y a eu toute une série d’événements retentissants mettant en cause le ministère de l’Intérieur, et disons-le franchement, ils ont terni l’autorité du ministère et de ses agents », a relevé M. Medvedev.
Un sondage du centre indépendant Levada publié mardi a mis une nouvelle fois en évidence le manque de confiance des Russes envers leur police. Selon cette enquête, 67% des citoyens « craignent » les forces de l’ordre et 77% ne se sentent pas protégés contre l’arbitraire des policiers. Ces chiffres sont d’ailleurs stables depuis 2004.
Le président Medvedev s’en est aussi pris aux mauvais résultats de la police, dénonçant notamment une tendance à gonfler artificiellement les succès dans les statistiques officielles. « Elucider des crimes et délits est bien entendu le critère de base de votre travail. Le désir d’enjoliver les statistiques, de les modifier, est bien sûr inadmissible », a-t-il souligné. « Et malgré toutes les mesures adoptées, chaque année seule la moitié des crimes sont élucidés. Plus de 1,3 million de crimes et délits ne sont pas élucidés », a martelé M. Medvedev. Selon lui, la lumière n’a pas été faite sur 2.000 meurtres et tentatives de meurtre, 760.000 vols et 124.000 cambriolages en 2009.
Le chef de l’Etat russe qui, en décembre, avait promis de réformer l’organisation policière et judiciaire du pays, a aussi juré de juguler la corruption, notamment parmi les policiers qui devront désormais fournir des listes détaillées de leurs biens et de ceux des membres de leur famille. « Ces instruments doivent fonctionner à pleine puissance et ne pas rester sur le papier (…) pour éradiquer le mal (de la corruption) des structures de l’Etat », a-t-il prévenu.