Le maire d'une ville roumaine à forte minorité hongroise (" Sfântu Gheorghe ") a été sanctionné par une amende contraventionnelle pour avoir retiré le drapeau roumain du fronton de la mairie et traduit en hongrois le nom de cette ville sur des documents officiels. Il contesta sans succès cette sanction devant les juridictions roumaines.
La première difficulté suscitée par la requête alléguant d'une violation du droit à un procès équitable (Art. 6) concernait sa recevabilité et, en particulier, l'applicabilité ratione materiae de ce droit à la situation d'espèce. La Cour européenne des droits de l'homme refuse d'abord cette applicabilité sur le " volet civil" de l'article 6 car " la contestation en cause ne portait pas sur des droits et obligations de caractère civil" mais sur des " compétences qui ont été dévolues au maire par la loi en sa qualité de premier magistrat élu de la ville, [et qui] constituent une participation directe à l'exercice de la puissance publique et aux fonctions visant à sauvegarder les intérêts généraux de l'État ou des autres collectivités publiques " (§ 29).
Cependant, sur le " volet pénal ", parmi les critères d'applicabilité à ce titre (§ 30), il est relevé que " l'amende infligée était fondée sur des normes poursuivant un but à la fois préventif et répressif " (§ 32). De plus, au regard " du montant élevé de l'amende infligée, la Cour estime que la sanction relève, par sa sévérité, de la matière pénale " (§ 30), d'où le constat d' applicabilité de l'article 6 (§ 34).
Au fond, l'absence de réponse des juridictions nationales " à l'un de ses moyens essentiels de recours [dirigé contre la sanction], à savoir le défaut de date de l'accomplissement de l'une des contraventions " (§ 35) est jugée contraire au droit à un procès équitable (§ 41). Certes, la Cour rappelle que " si l'article 6 § 1 oblige les tribunaux à motiver leurs décisions, il ne peut se comprendre comme exigeant une réponse détaillée à chaque argument " (§ 37). Mais, eu égard à " l'importance de ce motif du recours pour le requérant [...], force est de constater qu'en l'espèce le tribunal départemental [suivant en cela le tribunal de première instance] a ignoré ce moyen de recours du requérant " (§ 40).
La Roumanie est donc condamnée pour violation de l'article 6.
"Régularité de la sanction infligée à un maire pour des actes résultant de l'exercice de prérogatives de puissance publique"