La haine de la famille

Par Liliba

Catherine CUSSET

Déterminez le défaut le plus irritant de chaque membre de votre famille et attribuez-lui une couleur. Dès que votre père hurlera pour un torchon disparu, vous lui crierez : " Carton vert ! " Chaque fois que votre mère se lamentera sur sa vie ratée, vous vous exclamerez : " Carton rouge ! " Lorsque votre sœur vous traitera de mollasson incapable de passer une éponge, vous répliquerez : " Carton jaune ! " Quand votre frère se lancera dans le récit d'une fête sublime que vous avez manquée, vous l'interromprez : " Carton gris ! " Seul, vous surprenant à bouder parce que personne ne vous aime, vous vous direz soudain, dans un éclair de lucidité : " Carton bleu ! ", et vous éclaterez de rire.

Dans la famille "Je les déteste tous", je voudrais le père... puis la mère... puis le frère, la soeur, oh et aussi la grand-mère !

Cette chronique de la haine ordinaire et quotidienne n'épargne personne au sein de cette famille. Le père, tout d'abord, pater familias au caractère colérique et tatillon, mais malgré tout bon père et bon mari et sur lequel on peut compter (quoique, rien ne soit si sur, finalement...). La mère ensuite qui crie haut et fort qu'elle déteste la famille, les fêtes obligatoires, les repas, les contraintes des enfants, qui a son choucou avéré et qui n'aime ses enfants qu'en fonction de leur réussite à l'école puis dans les études... Et puis la fratrie, ces quatre frères et soeurs (dont la narratrice, qui n'est autre que l'auteur) qui grandissent et s'épanouissent tant bien que mal dans cette famille qui ne donne vraiment pas envie...

J'ai lu à sa parution Le problème avec Jane, que j'avais bien aimé, et plus récemment Un brillant avenir que je n'avais pas aimé. Certes, l'auteur a une prose superbe et un grand art pour brosser les portraits des personnages de ses romans, portraits tout en finesse, très psychologiques, à multiples facettes, des caractères vraiment intéressants à analyser, mais mon Dieu ! que les protagonistes de ses histoires sont donc peu aimables, au sens premier, c'est-à-dire qu'on n'a pas envie de les aimer ! Surtout pour les femmes, revêches, désagréables, méchantes parfois, mesquines souvent... Vraiment, j'ai du mal à accrocher à des romans dans lesquels les femmes dégagent aussi peu de sympathie. Impossible pour moi de m'identifier mais aussi de compatir, de partager des émotions avec ces coeurs secs et rageurs...

Et puis cette famille est si plombante... Bien sûr, il est vrai que derrière chaque porte de foyer refermée se cachent des secrets, des rancoeurs, que sous chaque oreiller on peut trouver des mensonges ou même des haines, mais la façon dont le partage Catherine Cusset est pour moi vraiment déprimante.

Ce sera donc le dernier livre que je lirai de cette auteur.

Ce livre faisait partie de la toute première sélection du Grand Prix Quoi de 9.