Friedrich Nietzsche, Fragments posthumes
Le pluralisme en question
Les promoteurs du nouveau cours d’Éthique et de culture religieuse tablent dans leur argumentaire sur les vertus du pluralisme moral et religieux. Par exemple, l’argument central de l’essai de Georges Leroux, Éthique et culture religieuse, dialogue. Arguments pour un programme (Fides, 2007) est, en gros, le suivant : il existe, de facto, un pluralisme dans la société québécoise ; ergo, l’apprentissage du pluralisme moral et religieux dans le dialogue doit être la norme. D’autres prémisses sont invoquées, dont celle voulant que personne ne peut s’ériger en juge des croyances d’autrui ; de plus, le principe d’égalité, au cœur de l’État démocratique québécois, veut que toutes les confessions de foi soient considérées pareillement. Devant ces faits sociaux et ces valeurs partagées par une majorité de Québécois, l’auteur conclut à la nécessité d’une éducation au pluralisme moral et religieux.
À lire la défense de Leroux du programme en question, on a souvent l’impression qu’il commet une erreur de raisonnement, ce que les philosophes désignent sous le nom de «sophisme naturalisme». Leroux semble passer allégrement de ce qui est à ce qui doit être, au sens où la diversité des valeurs et des croyances ambiantes de la société québécoise et de ses institutions laïques est si prégnant qu’il convient d’abouter l’éducation à cette nouvelle réalité sociale non seulement québécoise mais internationale. Dans les faits, le pluralisme paraît être une démarche irrésistible, et chercher à s’y opposer c’est s’engager dans un combat d’arrière-garde. Qui peut sérieusement s’opposer au rouleau compresseur de la laïcité ?[1] Le pluralisme de jure, dont Leroux se fait l’apôtre, consacre ainsi la victoire totale de la laïcité sur le religieux.
On a fait jusqu’ici la part belle au pluralisme. À mon avis, on ne l’a pas encore problématisé, questionné et sondé comme il convient. On tient le pluralisme comme une évidence allant de soi ; il ne s’agit dès lors que de le justifier au plan légal et politique. La question du pluralisme fait songer à l’engouement extraordinaire que connaît aujourd’hui l’écologie. Le débat n’est plus de savoir s’il faut ou non lutter contre les changements climatiques; mais plutôt: comment ne pas être écologiste!
John Stuart Mill était d’avis que lorsqu’on ne connaît que son propre point de vue, on ne le connaît pas ![2] C’est uniquement lorsqu’on connaît le point de vue contraire mieux que ne le connaît notre adversaire, qu’on est en droit de le critiquer. Je soutiens que jusqu’ici on a rien compris à la position «anti-pluraliste», mis au banc des accusés, que nous désignerons ici par «exclusivisme» selon le vocable que lui a prêté le philosophe américain Alvin Plantinga. Partant, on ne connaît pas le pluralisme. J’aimerais dans les lignes qui suivent présenter les objections du principal opposant au pluralisme : l’exclusivisme chrétien d’Alvin Plantinga.[3]
La défense de l’exclusivisme chrétien
Âgé de 77 ans, Plantinga peaufine depuis plus de trente ans une défense au plan philosophique de la foi chrétienne. L’ouvrage que publia l’auteur en 2000, Warranted Christian Belief[4], constitue sans doute son magnum opus. Ce qui est remarquable entre autres chez ce philosophe chrétien, c’est qu’il a cherché à justifier la foi chrétienne non pas sur des bases théologiques, mais essentiellement épistémologiques.
En bon chrétien, Plantinga énonce d’abord deux de ses croyances chrétiennes fondamentales :
(1) Le monde a été créé par Dieu, un être tout-puissant, omniscient et parfaitement bon ; cet être est une personne qui a des croyances, des buts, un plan et possède des intentions ; il est en mesure d’accomplir ses intentions.
(2) L’être humain cherche le salut. Dieu a donné son Fils unique qui, par son incarnation, sa vie, sa mort et sa résurrection offre le salut.
Devant ces croyances chrétiennes, le partisan du pluraliste religieux fait valoir l’objection courante : comment peut-on admettre ces vérités alors qu’il existe bien d’autres confessions religieuses qui proclament des vérités différentes ? Plantinga réplique en appelant un chat un «chat» : seules les croyances chrétiennes sont vraies ; les croyances des autres religions sont fausses. En bonne logique bivalente, si je crois que p, alors je crois que p est vrai ; cela implique logiquement que non-p est faux. Ainsi, l’exclusivisme de Plantinga soutient que seules (1) et (2) sont vraies, de sorte que toutes les autres propositions incompatibles avec elles sont réputées fausses.
Une vaste majorité d’entre nous, même des croyants, condamne l’étroitesse apparente de vue de l’exclusivisme. On le condamne comme étant «arrogant au plan intellectuel», on le fustige en parlant d’«impérialisme», d’«ethnocentrisme», de «religiocentrisme», etc. De plus, il paraît certain que l’exclusivisme est irrationnel, injustifiable, arbitraire, délirant, voire odieux et vil. Il importe de remarquer que ces critiques ne portent pas tant sur les «vérités» de l’exclusivisme, que sur la «posture» elle-même de l’adepte qui l’adopte en proclamant l’universalité de ses croyances.
Plantinga réfute ces accusations portées contre l’exclusivisme. Ces accusations sont de deux types. D’abord, elles sont d’ordre moral : l’exclusivisme ne serait pas correct parce qu’il serait présomptueux et arrogant d’affirmer que les autres confessions religieuses errent. Par ailleurs, l’exclusivisme est irrationnel et injustifié. Voyons comment Plantinga récuse cette double accusation.
Réfutation de l’objection morale
Il faut d’abord s’entendre sur la définition de l’«exclusiviste». Selon Plantinga, un exclusiviste c’est quelqu’un qui admet les propositions (1) et (2) mentionnées (ou toutes autres) comme étant vraies, alors que les autres sont fausses, comme on l’a dit précédemment. S’il croit en la première et la seconde croyances (ou toutes autres propositions), il est aussi convaincu que ceux et celles qui croient en d’autres vérités se trompent et croient ce qui est faux. L’exclusiviste se sent ainsi privilégié de croire en ce qu’il croit. Il croit savoir des choses d’une très haute importance que les autres ignorent et qu’il souhaite partager. Malgré cela, l’exclusiviste a) est informé de l’existence d’autres religions ; b) il sait pertinemment ce qu’il y a de religieux dans les autres religions ; c) sait pertinemment qu’il n’y a pas d’arguments qui puissent convaincre tout le monde des vérités auxquelles il adhère.
L’exclusivisme, tel qu’il vient d’être défini, est-il donc quelqu’un d’arrogant, de «religiocentrique»? Pas vraiment. En tant qu’exclusiviste, il se rend compte qu’il ne peut convaincre les autres, mais continue tout de même à croire ce en quoi il croit. Est-il arrogant de croire ce en quoi il croit de préférence à ce que les autres croient ? Non. Supposons qu’il refuse de croire aux croyances (1) et (2). Est-il encore arrogant ou présomptueux ? Pas davantage.
Supposons maintenant que l’exclusiviste reste neutre vis-à-vis la première et la seconde croyances (ou de toutes autres propositions): il ne les nie pas, ni ne les affirme. Est-il cette fois-ci arrogant et présomptueux ? Apparemment pas, car il n’affirme ni ne nie quoi que ce soit. Mais certains vont alléguer que l’exclusiviste est présomptueux dans la mesure où sa soi-disant neutralité indique que la bonne attitude à adopter c’est la sienne.
Le fait est – ainsi court le préjugé – que l’exclusiviste chrétien (ou de toute autre confession) paraît toujours en faute ; il se trouve dans ce qu’on appelle en anglais «a no-win situation». En réalité, toutefois, lorsqu’on l’examine avec un soin charitable, on ne trouve rien à lui reprocher.
Peut-être, qu’au fond, l’objection morale que l’on adresse à l’exclusiviste, c’est que sa position revient à une forme d’égoïsme : il n’est centré que sur sa personne. On oublie cependant que l’exclusivisme, tel que défini précédemment en a), b) et c), implique qu’il sait que d’autres ont des croyances différentes des siennes ; il le reconnaît ; il les respecte. Ce qui choque, c’est l’affirmation brutale que les autres croyances sont fausses.
On peut, si on le veut, étirer le concept d’égoïsme, pour y faire entrer la croyance à la vérité. Il s’en trouve en effet pour dire que quoi que l’humain fasse ou croit, il agit toujours par égoïsme, tout acte ou toute croyance n’ayant d’importance que pour assurer notre propre survie, entre autres la croyance religieuse qui vise à assurer notre propre vie après la mort. À ce compte, toutefois, personne ne peut être altruiste. Même Mère Teresa, passerait pour la personne la plus égoïste qui ait jamais existé. Évidemment, si l’on vide de son sens le mot «altruiste», alors, son opposée, «égoïsme» perd également tout sens.
Conclusion : on ne peut proprement pas qualifier d’égoïsme le partisan de l’exclusivisme, et on ne voit pas ce qu’il y a d’immoral à l’être.
Réfutation de l’objection épistémique
Au fond, l’objection morale adressée contre l’exclusivisme chrétien ou tout autre, tient à ce qu’il n’est pas en mesure de justifier ses croyances de manière objective et neutre. L’exclusivisme est partial, dit-on. Au pire, c’est un vicieux au plan épistémique. Voilà son grand tort. Plantinga serait immoral parce qu’il n’est pas capable a) d’apporter des preuves convaincantes de ses croyances et, b) parce que beaucoup rejettent ses preuves ; celles-ci résidant en dernière analyse dans l’expérience personnelle qu’on ne serait vérifier de manière indépendante. Examinons à tour de rôle ces objections de nature épistémique.
En premier lieu a), Plantinga enfreindrait le fameux principe de Clifford qui, dans «L’Éthique de la croyance», stipulait
…c’est un tort, toujours, partout et pour quiconque de croire quoi que ce soit sur la base d’une évidence insuffisante.[5]
Bien avant Clifford, son compatriote, le grand John Locke (1632-1704), avait lui aussi posé un principe établissant les bonnes et les mauvaises croyances, lorsqu’il énonce, dans le quatrième tome de son monumental Essai sur l’entendement humain (1690), le principe moral suivant
Ne pas soutenir une proposition avec plus de conviction que ne le justifient les preuves sur lesquelles elle est bâtie.
La première et la seconde croyances de Plantinga sont ici mises au banc de l’accusé : ne sont-elles jamais que fantaisies malsaines ne reposant que sur une évidence insuffisante, voire inexistante? À défaut de quoi, ces croyances religieuses ne sont que crédulités dangereuses qui devraient être impérativement éradiquées. Ainsi, l’exclusiviste chrétien serait un délinquant au plan épistémique. Sa posture est comparable à celui ou celle qui croit à l’existence des extra-terrestres et des soucoupes volantes, alors que dans l’état actuel des choses, on ne peut rien affirmer en ce sens.
Le problème, toutefois, qui se pose avec le principe moral de Clifford-Locke, c’est qu’il s’auto-réfute parce qu’il ne satisfait pas lui-même à ses propres exigences! Quelle est, en effet, l’évidence sur laquelle repose la croyance voulant qu’il faille toujours supporter nos croyances par les évidences dont nous disposons? On peut donner deux ou trois bons exemples justifiant le principe en question. Mais, au-delà, il s’agit d’un sophisme, celui de la généralisation hâtive. Pour cette raison, le principe de Clifford-Locke n’est pas justifié.
L’épistémologie de Plantinga est «anti-fondationnaliste»; elle se veut plutôt «fiabiliste».[6] Depuis les Lumières, en fait depuis l’essor de la science expérimentale moderne, la conception fondationnaliste du savoir s’est imposée. La connaissance est conçue comme un édifice à la base duquel se trouvent certaines croyances de base évidentes et incorrigibles. Chez Descartes, les croyances de base évidentes par elles-mêmes ce sont «les idées claires et distinctes», dont le fameux cogito (le Je pense donc je suis). Le principe de Locke-Clifford se veut ainsi un principe fondamental de contrôle des croyances en bonne et due forme. Aussi, certaines croyances n’obéissant pas au principe de Locke-Clifford, en particulier les croyances religieuses, ont perdu leur légitimité de droit. En d’autres termes, il est aujourd’hui parfaitement irresponsable de croire ce que les religions enseignent, dont le christianisme qui a pourtant marqué la civilisation occidentale. Le chrétien est pour ainsi dire mis au banc des accusés et sommé de justifier ses croyances ou de les récuser. Mais le procès est non fondé car il est biaisé par le fait que la poursuite adopte une épistémologie fondationnaliste comme norme de justification des croyances. Alvin Plantinga est le premier a démonté les vices de procédure d’un procès qu’intente depuis plus de trois cent ans les partisans des Lumières à la croyance religieuse. En particulier, il a montré que la norme de justification des croyances se réfute elle-même. En toute légitimité, il peut dès lors rejeter l’épistémologie fondationnaliste. Libérée, une autre voie épistémologique s’ouvre donc pour justifier la croyance religieuse que Plantinga a baptisé d’«Épistémologie réformée».
Puisque les croyances chrétiennes ne peuvent être justifiées ou fondées sur des principes de base, sont-elles au moins fiables. Toute la question est de savoir si les croyances de l’exclusivisme sont fiables ou non. En d’autres termes, les croyances exclusivistes offrent-elles une garantie quant à leur vérité? Oui, répond Plantinga.
D’abord, il faut définir le concept de garantie (warrant). Pour résumer : une croyance possède une garantie pour quelqu’un si et seulement si elle est engendrée au moyen de facultés cognitives fonctionnant correctement, dans un environnement adapté à l’exercice de ces facultés; et, enfin, si ces facultés sont conçues suivant un plan visant à engendrer des croyances vraies.[7] Or, d’après Plantinga, ses croyances satisfont au trois critères précédents d’une garantie; ses croyances sont donc fiables.
Comment au juste? Notons que Plantinga ne fait pas appel à une expérience mystique aussi insondable qu’invérifiable. Toujours d’après ce qu'enseigne le Christianisme, c’est l’Esprit saint qui, œuvrant dans le cœur des hommes, nous ouvre à la confiance nécessaire au bon entendement des Évangiles. Donc, les croyances chrétiennes sont garanties si, évidemment, elles sont vraies. Dès lors, toute la question est de savoir si elles sont vraies. Sur ce point, comme on l’a vu, Plantinga ne pense pas qu’on puisse offrir de preuve fondationnelle puisqu’une telle demande est impossible à satisfaire. (Rappelons que Plantinga rejette le fondationnalisme.) Il n’en demeure pas moins que la première et la seconde croyances de Plantinga offrent une garantie – du moins, en supposant qu’elles sont vraies.
Passons maintenant à l’objection épistémique suivant laquelle beaucoup rejettent les croyances de Plantinga et adhèrent à d’autres croyances religieuses. En somme, l’objection veut que les croyances religieuses soient conditionnées historiquement. Si Plantinga était né en Chine, il serait sans doute taoïste ou bouddhiste ; mais le hasard l’a fait naître en Indiana, aux États-Unis et - ce qui n’est sans doute pas un pur hasard - il est membre de l’église épiscopalienne, tout comme George W. Bush. S’il était né au Québec, il serait peut-être catholique ou athée. Le même raisonnement vaut pour l’esclavage. Bon nombre aujourd’hui pense que l’esclavage est mal ; s’ils étaient nés au États-Unis au dix-huitième siècle, ou à Rome sous les Césars, ils auraient sûrement pensé différemment sur ce point.
À cette objection, Plantinga répond qu’une croyance morale ou religieuse ne perd pas automatiquement sa garantie si elle est crue à différents moments de l’histoire et dans différents coins de la planète. Si les critères de garantie sont satisfaits, et que la croyance est vraie, alors la croyance demeure garantie quelle que soit l’époque et le lieu où je suis né. Pour reprendre le dernier exemple, l’esclavage est mal quel que soit l’époque et le lieu où je vis. Ce qui garantie ma croyance, c’est que chaque humain possède une dignité, et aucun humain ne doit traiter son semblable simplement comme un moyen. Il est vrai que, pour Aristote, l’esclave (doulos) est un instrument (organon).[8] Sur ce point, Aristote se trompait (comme sur bien d’autres points). Il est vrai que le contexte culturel dans lequel il vivait le conduisit à approuver l’esclavage. Mais tous les Grecs n’étaient pas de cet avis, dont Antiphon qui affirmait que l’esclavage résultait de la force.
Venons-en, pour terminer, à ce qui, sans aucun doute, constitue l’objection principale du pluralisme contre l’exclusivisme. Formulons-la ainsi : les croyances religieuses sont sur un même pied quant à la vérité: un chrétien a autant raison d’être dans la vérité qu’un musulman. Plantinga croit que Jésus-Christ est (Fils de) Dieu ; l'ayatollah Sayyid Ali Khamenei, l’actuel Guide suprême d’Iran, croit que Jésus-Christ n’est pas Dieu, il n’est qu’un prophète, et Mahomet est le plus grand des prophètes.
Plantinga ne croit pas pour autant qu’il lui faille abandonner sa croyance parce que tous les deux ont la ferme conviction qu’ils ont raison ; ou encore, que Plantiga doive suspendre sa croyance en attendant qu’il trouve un argument qui convainc qu’ Ali Khamenei se trompe. Plantinga admet cependant qu’il peut bien se tromper ; en tout cas, il ne peut être accusé ni d’irrationalisme ni d’arrogance au plan épistémique. Il croit en toute sincérité que l’Esprit saint, qui œuvre en lui, l’incite à croire qu’il est dans une meilleure posture épistémique que Ali Khamenei. Encore une fois, il peut se tromper, mais il n’est sûrement pas coupable d’adhérer à la vérité que Jésus-Christ est (Fils de) Dieu.
Conclusion
Le pluralisme rejette au départ la vérité ; le chrétien est assuré de posséder la vérité et cherche à la comprendre. C’est le mot fameux de saint Anselme : fides quaerens intellectum: la foi cherchant l'intelligence. Je crois pour comprendre. Plantinga est philosophe d’abord parce qu’il est chrétien. Aussi scandaleux que cela puisse paraître aux tenants du pluralisme, l’exclusivisme est la meilleure voie pour le développement de l’esprit critique car il ne rejette pas au départ l’idée de vérité. Malgré ses positions anti-chrétiennes notoires, Nietzsche avait parfaitement bien compris la démarche épistémologique qui sous-tend l’exclusivisme chrétien (voir la citation mise en exergue). L’exclusivisme chrétien de Plantinga, offre plus de garantie à la vérité, même si on n’est pas en mesure de prouver les croyances fondamentales chrétiennes, tout simplement, comme nous l’avons vu, parce que cette entreprise fondationnelle est illusoire. Pour penser le pluralisme, il faut partir de l’exclusivisme, et non l’inverse, comme le souhaite le programme d’Éthique et de culture religieuse. À mon avis, il n’aurait pas fallu abolir le cours d’enseignement religieux catholique dans nos écoles. À la lumière de ce qui précède, je suis d’avis que le pluralisme religieux sur lequel repose le cours d’Éthique et de culture religieuse est une voie sans issue et conduit tout droit à un échec.
[1] La position de Leroux est plus nuancée, dans la mesure où elle rejette le modèle républicain français d’une laïcité qui «ne se reconnaît aucune mission de transmission des symboles et des normes». Mais, somme toute, l’argumentaire est faible.
[2] John Stuart Mill, De la liberté, chapitre 2, De la liberté de discussion.
[3] Alvin Plantinga, «A Defense of Religious Exclusivism», in James F. Sennett, The Analytic Theist. An Alvin Plantinga Reader, Eerdmans, 1998, p. 187-210. Voir aussi, Warranted Christian Belief, Oxford, 2000, chapitre 13, «Postmodernism and Pluralism», p. 422-457.
[4] Ourvrage faisant suite à deux autres consacrés à la notion épistémique de «garantie» (warrant), Warrant: The Current Debate, et Warrant and The Proper Function, tous deux publiés en 1993.
[5] William Kingdon Clifford (1845-1879), «The Ethics of Belief,» in E.D. Klemke, A D. Kline, R. Hollinger, Philosophy. The Basic Issues. St. Martin’s Press, 1982, p. 45. Ma traduction. Le texte de Clifford paru originalement en 1879 dans ses Lectures and Essays.
[6] Sur ce point, on consultera en français le lumineux petit ouvrage de Roger Pouivet, Qu’est-ce que croire?, Vrin, 2006.
[7] Voir Warranted Christian Belief, chapitre 6.
[8] Voir Aristote, Politiques 1, 1253b, 30.