Entre deux tristes annonces, une lueur peut jaillir du chemin de croix pour mélomanes qu’est ce début d’année. En apprenant le retour d’un poète, on s’enthousiasme au point de se fendre d’une impudique déclaration d’attachement. Dialogue unilatéral avec une légende.
J’me dis qu’on vit pour dire c’qu’on penseEt si c’qu’on dit compense notre absence
C’est ça la récompense
(Fabe – « Les Mots Vrais »)
C’était une forme de pèlerinage athée vers le vrai : régulièrement, les amateurs de bons mots revenaient poser une oreille sur vos créations. Alors, forcément, votre retour sonne pour beaucoup comme une délivrance. C’est que vous en avez façonnés, des diseurs de bonnes aventures sur boucles ; inspirés, des pourfendeurs du pouvoir cathodique. La révolution ne s’est finalement pas faite, Detroit n’est pas perdu, et vous êtes toujours debout. Il est peut-être préférable que rien ne bouge.
Et voici, après douze longues années, I’m new here… comme annonce d’une seconde jeunesse. Sur des mélodies loin de nier toute modernité, vous prouvez à qui ne l’entendait plus que la mise en musique des mots, qu’on la réduise ou non à quatre lettres qui « claquent », demeure un art. Certes, nous n’étions pour la plupart qu’embryons à l’époque de vos bœufs avec Laws, Carter ou Jackson, et ne possédons que des rééditions laser de Pieces of a Man ou Bridges. Malgré cela, soyez certain, Mister Scott-Heron, que ce retour aidera bon nombre d’entre nous à combler le départ de Mano, Vic ou Lhasa.
Ils nous manqueront. Vous nous aviez manqué.
Article paru dans Openmag