Triangle d'or, Inde
En septembre 2008, lors de notre départ, j'ai sondé le terrain auprès de mon père à savoir s'il serait intéressé à venir éventuellement voyager avec nous quelques semaines. La réponse avait été plutôt vague et suivie du célèbre, « on verra ».
Le voyage avançait et toujours pas d'appel d'offre de la part de celui-ci. Quand je lui en glissais un mot, il savait rester évasif.
Puis, la mère de Will saisit l'opportunité de l'Asie du sud-est et se réserva rapidement l'Égypte. Que restait-il à Denis?
L'Inde!
La première réponse fût oui, probablement emporté par l'excitation du moment. Ensuite, en y réfléchissant, le oui fit place à un non. Plus tard, usant de mon pouvoir de persuasion et par curiosité sûrement, le non redevint un oui qui laissait cependant entrevoir un pic d'anxiété camouflant un iceberg appréhensions. Il me semble que je l'entendais à des milliers de kilomètres se dire « mais dans quoi je me suis embarqué? Maudits enfants! ».
Il faut dire qu'annoncer à ses amis que l'on ira passer ses vacances en Inde amène souvent son flot de commentaires négatifs. Les gens aiment se faire des peurs sur ce pays mystérieux où la plupart de ceux qui en parlent en mal n'y ont jamais mis les pieds!
Bref, sept vaccins plus tard, il était dans un avion vers cette destination dont il ne savait pas grand chose.
Aéroport de Delhi, deux heures du matin.
La ville est plongée dans un épais brouillard limitant la visibilité à disons… ma main. Le pire épisode de brouillard connu dans la capitale depuis sept ans retardant trains, bus et avions. Et créant une taxe brouillard inventée par les chauffeurs de taxi. Belle température pour arriver!
C'est tout de même un père souriant et excité que je récupère derrière les portes vitrées automatiques. Le mauvais temps n'a pas atténué son plaisir d'être dans le sous-continent. Ça commence bien.
Direction Main Bazaar dans Paharganj, histoire de le plonger directement dans l'exotisme de la faune de Delhi. À cette heure-ci, désertée par les commerçants et les voyageurs, la rue endormie ressemble à une ruelle malfamée. Premier choc pour Denis.
Delhi, dix heures du matin.
La ville se montre sous un meilleur jour. Le soleil brille, nous prenons notre déjeuner sur la terrasse d'un toit. La rue s'est remplie de ses vendeurs de babioles en tout genre. Attention aux vélos, rickshaws, voitures, piétons, vaches et un éléphant, pourquoi pas!
« C'est moins sale que je pensais, je m'attendais à marcher dans des crottes de vache tout le temps et à être toujours sale ».
Premier fait à demi démenti, oui l'Inde n'est pas le pays le plus propre, j'en conviens, mais la saleté ne saute pas sur le monde. À moins que par surprise, un baba la mène à vous par un baiser sur la main.
Au départ, nous ne voulions pas passer trop de temps à Delhi, nous faisant souvent dire par les voyageurs et les Indiens que c'est invivable, pollué et sans intérêt.
En fait, après plusieurs jours à l'explorer, je vous dirais le contraire. C'est effectivement très pollué, pas de surprise, c'est une grande ville d'Inde, mais je ne dirais pas que c'est sans intérêt. La cité regorge de choses à voir, de bons restaurants et simplement s'y promener promet de belles surprises.
Nous y visitons le Red Fort, vestige massif du court règne mogol, nous profitons de la quiétude de la mosquée Jama Masjid, la plus grosse du pays et admirons un coucher de soleil sur l'India Gate en l'honneur des soldats morts au combat, tentant toutefois de fuir les vendeurs ambulants insistants.
On se paye du bon temps au chic United Coffee House en enflammant les babines de mon père avec des mets locaux dans un décor des années 40 et, prenons une bonne Kingfisher glacée au branché Mirchi pub.
On rigole bien au musée du chemin de fer qui ne doit pas avoir été entretenu depuis son ouverture il y a fort longtemps et, nous faisons un plongeon dans la spiritualité hindouiste au temple Lakshmi Narayan.
Vient le temps d'expérimenter les trains pour atteindre les autres destinations du fameux triangle. De rencontrer la sympathique population qui n'a rien à vendre mais, qui veut tout savoir de toi. Mon père sort son meilleur anglais, pas plus mauvais que ses interlocuteurs, et tout le monde réussit à se comprendre et à apprécier les heures qui s'étirent.
Agra, midi.
La brume levée, nous apercevons le fameux Taj Mahal…
Le lendemain, trois heures du matin.
Denis est couché malgré lui sur le plancher de la gare de train. Face à la toilette turque, il décide de devenir végétarien pour le reste du voyage.
Agra, le lendemain et le surlendemain.
Denis est toujours couché, laissant l'opportunité à Will d'explorer davantage pour vous pondre une super chronique sur la ville.
Jaipur, cinq heures plus tard qu'annoncé.
La ville nous épate par la quantité de monuments tous plus surprenants les uns que les autres, en particulier le fort d'Ambert, un palace majestueux en pleine zone désertique.
Notre visiteur s'adapte rapidement à l'ambiance survoltée et enivrante, étant même surpris qu'il n'y ait pas plus de monde que ça. « Je m'imaginais avoir toujours des gens coude à coude avec moi ». Comme quoi l'imagination avait travaillé fort avant le départ. Il ne s'était par contre pas imaginé voir autant de chameaux sur le bord des rues.
Delhi, deux semaines après.
Les derniers jours ont filé comme le vent, empreints de bons souvenirs. Malgré les fréquents « Waterloo » (moments pendant lesquels le voyageur se sent prêt à abdiquer) que l'Inde offre à ses visiteurs, chaque recoin propose en contrepartie une merveille qui en vaut le détour.
Québec, deux jours plus tard.
Denis entre dans son condo et se dit : j’aurais bien pris une semaine de plus!
Incroyable!
- Nad initiant son père à l'Inde.