Les thrillers français se réveillent. Tiré du roman homonyme de Franck Thilliez, La chambre des morts est aussi bien une jolie surprise qu’une semi-réussite. Premier film d’Alfred Lot, ce long métrage a la force et la faiblesse des premières œuvres. Très ambitieux comme pas assez, très fouillé comme peu… nous avançons à tâtons dans une intrigue intéressante sans être non plus palpitante comme désiré.
Partant d’une intrigue à ambiance tétanisante, Alfred Lot a tranché et préféré opter pour le thriller classique psychologique au lieu du thriller angoissant du livre. Réalisé de fort belle manière, on navigue dans une ambiance froide et glauque sans pour autant tomber dans la frayeur. Quelque peu longuet sur le fond, le réalisateur s’attache surtout à développer ses personnages en entretenant une certaine (et jouissive ambiguïté doublée d’un mystère environnant permanent).
Exit donc le caractère diabolique, horrifique du roman tout comme la pression de certaines scènes qui disparaissent subitement au profit d'ellipses (voir la scène sur le parking du début, celle de l’enlèvement d’Eléonore sans oublier la peur ruminée par la petite fille dans son cachot.) Autant de terribles moments remplacés par un curieux vide invitant à faire fonctionner son intelligence. Déroutant, discutable mais pas innocent.
Nous passerons également sous silence la fin du livre modifiée au profit d’une happy end, sauvée par un petit cliffhanger sympathique. Cette petite entorse, offre toutefois intelligemment au spectateur l’opportunité de comprendre le pourquoi du comment psychologique sans tomber dans l’explication longue et grotesque souvent de mise dans ce genre de productions.
En parlant de pirouette scénaristique bien gérée, ceci nous renvoie à ce petit je ne sais quoi qui fait que La chambre des morts sort du lot. Excepté ses quelques erreurs de parcours, Alfred Lot, formé à l’écurie Besson a de qui tenir et gère plutôt bien son premier film, respirant l’ambition et l’amour. Il y a une réelle envie de bien faire et l'on pardonne les erreurs minimes de réalisation. Ses personnages formidablement bien croqués sont tous attachants et bien vus (mention spéciale à Mélanie Laurent, au duo Gilles Lellouche/Jonathan Zaccaï sans oublier l’interprète du tueur que nous tairons), l’intrigue bien qu’emmêlée trouve dans son chemin selon une logique imparable et les quelques rebondissements de l’enquête assurent ce qu'il faut pour maintenir l'éveil du spectateur.
Même si certaines storylines sont parfois un peu vite expédiées (voir la finalité du duo Lellouche/Zaccaï ou encore la déduction finale de Mélanie Laurent arrivant un peu comme un cheveu sur la soupe) l’ensemble reste de fort bon niveau.
Côté angoisse ce n’est pas l’extase mais le caractère étrangement lancinant et nébuleux du décor invite à être inconfortablement transporté. Lorgant clairement du côté du Silence des agneaux auquel le film renvoie par deux fois sans toutefois atteindre les sommets du film de Jonathan Demme (indétrônable objet du genre), La chambre des morts s'inscrit clairement dans cette logique de thriller aussi glacial qu'intriguant et de genre. Manque juste un zest de tension à faire hérisser les poils des avants-bras.
Si le film d’Alfred Lot est constamment entre deux courants et deux envies le laissant ainsi en position bancale durant presque deux heures, il est intéressant de noter que ce paradoxe trouve parfois en une seule scène à l’image du dénouement final, le chemin pour que la balance penche du bon côté et prouve que le potentiel du réalisateur s'impose comme prometteur.
Un bon petit premier film donc, qui handicapé par des erreurs de parcours reste plutôt bon et honnête offrant un polar bien plus consistant et profond que certains films de vieux routards de la caméra.
Satisfaisant, surtout qu'en terme de thriller français c'est réellement un joli tour de force.
Pourquoi y aller ?
Pour le final qui prend des allures de tragédies. Pour l'interprétation à la fois naturelle et troublante. Pour l'atmosphère du film. Pour la réalisation, vraie, honnête et sans excès de fioritures. Pour les non dits savamment distillés.Ce qui peut freiner ?
La durée un peu trop longue. L'inégalité des scènes. Le manque de tension pour un tel sujet.
Pitch : En pleine nuit, au milieu d'un champ d'éoliennes, deux informaticiens au chômage renversent un homme surgi de nulle part. A ses côtés, un sac rempli de billets : deux millions d'euros, là, à portée de main et aucun témoin. Que faire ? Appeler la police ou profiter de l'occasion ?
Le lendemain, dans un entrepôt à quelques mètres des lieux de l'accident, la police retrouve le corps de Mélodie, une fillette aveugle. Et si l'argent était destiné à payer sa rançon ? L'assassin a-t-il vu les chauffards ? Le soir même, une autre enfant est kidnappée. Diabétique cette fois. Ses heures sont comptées. A l'hôtel de police de Dunkerque, le compte à rebours est lancé. Aux côtés du lieutenant Moreno, un collègue très prévenant, Lucie, une jeune brigadier de 26 ans, participe à sa première enquête. Et curieusement, au sein du groupe crime, on a vite le sentiment que Lucie n'est pas là par hasard..