Je pressentais que cela pourrait arriver, mais c’est néanmoins une mauvaise surprise : j’ai beau aimer Prince, je n’aime pas, mais alors pas du tout, vivre avec lui.
Au risque de faire ma Bridget Jones (contaminée par l’atmosphère ambiante ?), et d’avoir perdu mes lecteurs masculins dès la première ligne, j’assume. Ce sentiment se fait plus net avec chaque paire de chaussures qui traîne dans le salon/cuisine, chaque ronflement qui me réveille en sursaut, chaque chanson lancée à plein volume dans un appartement de 32 mètres carrés – pure estimation bien sûr ; on a vu que les Anglais ne s’embarrassaient pas de ce genre de basse préoccupation matérielle.
Bref, Prince m’énerve.
Pour couronner le tout, on dirait qu’il est tout le temps là. En tout cas, tout le temps là quand il ne faut pas : de 6h47, heure à laquelle son réveil retentit pendant dix minutes sans le réveiller (mais moi, oui), à 22h30, où il me pique toute la couverture et prétend que les trois quarts du lit lui reviennent – et puis, lui, il travaille, il faut donc lui assurer un sommeil de qualité. En passant par son retour du boulot où il lance son manteau en vrac sur notre unique meuble (un canapé où on tient à peine à deux en se serrant) et le dîner où il insiste pour regarder une obscure série qui ne fait rire que lui.
Et ne parlons pas des WE.
Prince m’énerve.
Le phénomène est d’autant plus étrange que, durant la journée, il me manque. Plus de 11 heures toute seule par jour, il y a de quoi perdre un peu la boule même quand on est à peu près équilibrée à la base (ce qui est loin d’être mon cas). Résultat : à peine Prince a-t-il franchi la porte que mon visage passe par les expressions suivantes :
- Soulagement : je ne suis plus seule !
– Curiosité : petit coup d’œil à la montre – à quelle heure rentre-t-il cette fois-ci ?
– Concentration : je calcule que j’ai été seule pendant… 11 heures et 43 minutes exactement. Soit 11 heures et 43 minutes de trop.
– Agressivité : là, tous les prétextes sont bons. Il rentre trop tard, il a oublié le lait pour demain matin, il a encore balancé son manteau sur le canapé, il rentre trop tard…
– Culpabilité : un peu tard sans doute, je réalise qu’après une journée de 11 heures et 43 minutes dans un nouveau boulot, Prince n’a sans doute pas envie d’être accueilli en ennemi mortel. Surtout quand l’accueil en question est assuré par un être de sexe non identifié, non coiffé, non maquillé, et ayant pour tous habits un bas de pyjama rouge, un haut de pyjama rose superposé à un pull vert, et un foulard noir.
En somme, heureusement que je commence à bosser lundi.