Un arrêt intéressant de la Cour d’Appel de Paris en date du 19 octobre 2009 vient de rappeler que le Directeur de l’INPI n’est pas le juge du contrat.
Les faits ayant amené la décision étaient les suivants : suite à la détection du dépôt de la marque française susceptible de contrevenir à ses droits antérieurs, une société de presse, titulaire de la marque verbale communautaire MATCH, a envoyé une lettre de mise en demeure au déposant aux fins de résolution amiable du différend par le retrait partiel de la demande contestée.
La partie adverse a répondu favorablement à l’ensemble des exigences prescrites et s’attendait à pourvoir jouir de sa marque suivant la nouvelle délimitation. Malheureusement, la société de presse n’a pas respecté sa promesse et a formé opposition à l’encontre de la demande d’enregistrement.
Un appel est interjeté devant la Cour d’Appel de Paris laquelle a confirmé dans son intégralité la décision de l’INPI de rejeter de la demande d’enregistrement de marque.
L’arrêt mérite quelques éclaircissements sur différents points.
Premièrement, la Cour d’Appel confirme la décision de l’INPI qui avait rejeté tout vice de procédure. En effet, l’arrêt est l’occasion de rappeler que l’irrecevabilité de la procédure consiste au non respect des conditions de validité de fond et de forme de l’opposition. (non respect des délais de procédure et des conditions de forme, absence de qualité à agir du mandataire, absence de titularité des droits). En l’absence de telles circonstances dans le cas d’espèce, la Cour d’Appel a valablement rejeté l’irrecevabilité de la procédure.
Le second moyen invoqué reposait sur la clôture de la procédure opposition suite à la transaction tacite intervenue entre les parties. En effet, l’opposition ne peut être clôturée que dans des cas limitativement énumérés par les textes .
(perte de la qualité à agir de l’opposant, cessation des effets de la marque, procédure devenue sans objet en raison soit du retrait ou du rejet de la demande d’enregistrement, suite à un accord entre les parties) En l’espèce, le fait pour la société de presse de se dire «disposée à résoudre ce litige amiablement et à ne pas déposer d’opposition…sous respect de certaines conditions» ne constituait-elle pas une proposition transactionnelle ? Le fait pour le déposant de respecter scrupuleusement les termes de l’offre ne débouchait-il pas sur un contrat tacite ?
En cas d’accord, celui-ci doit être porté à la connaissance de l’INPI par une information conjointe des deux parties ce qui n’a pas été le cas en espèce (ni au cours de la procédure écrite, ni au cours de la procédure orale. )
Certes, la Cour d’Appel a légitimement répondu en statuant que l’INPI n’est pas le juge du contrat de sorte qu’il ne pouvait connaître de toute question relative au contenu, portée, et violation de la transaction.
Néanmoins, le comportement de la société de presse est plus que répréhensible en terme de responsabilité contractuelle et de bonne exécution des contrats.
L’INPI n’est pas le juge du contrat de sorte qu’il ne pouvait connaître de toute question relative au contenu, portée, et violation de la transaction.
Deuxièmement, la Cour d’Appel confirme la décision de l’INPI qui avait accueilli la similarité pour l’intégralité des produits et services visés dans l’opposition. Une discussion peut néanmoins s’ouvrir sur le point de savoir si les services de décors de spectacles et services de divertissement sont similaires.
En effet, ces derniers s’entendent de «prestations visant à distraire et à amuser le public» alors que les premières sont définies comme des «prestations ayant pour but la réunion de moyens techniques et financiers nécessaires à la réalisation des films». Ainsi, l’argument de l’appelant selon lequel le libellé des services de divertissement serait trop général aurait pu aboutir notamment au regard de certaines décisions de l’INPI qui s’était déjà prononcé sur l’absence de similarité entre les services précités et dans l’hypothèse où la Cour avait fait une application stricte du principe de spécialité.
Enfin, la Cour d’Appel a fait une appréciation classique de la comparaison des signes en estimant que l’impression d’ensemble produite par les marques en cause était susceptible de créer un risque de confusion aux yeux du consommateur d’attention moyenne.
En l’espèce, la Cour a légitimement admis que la reprise de l’élément MATCH constituait le terme distinctif et dominant car immédiatement perceptible aux yeux du consommateur. (placé en position d’attaque, inscrit en lettres majuscules), l’adjonction du terme EVENT et la présentation graphique (cartouche à fond noir, présence de trois carrés de couleurs) restant néanmoins secondaires au sein de la demande d’enregistrement.
En conséquence, la Cour d’Appel ne peut que rejeter la demande d’enregistrement en application du droit des marques.
Sources :
Code de la Propriété Intellectuelle
INPI, Décision OPP 08-3187/PAB du 4 mars 2009 MATCH/MATCH EVENT
INPI, Décision OPP-05-2660/OLH du 16 avril 2009 SKY/SKY 7TH
INPI Décision OPP-07-2454/EC 17/02/2008 CAPEXPO/COMEXPO