Légèrement, mais intrinsèquement mysogyne, le féminisme est un terrain sur lequel je m’aventure peu.
J’ai néanmoins suivi avec sympathie son émergence à partir de la fin des années 60, conscient, même si mon éducation ne m’y avait pas préparé, que rien ne justifiait que les épouses soient, dans un couple, la variable d’ajustement des tâches ménagères, de “l’élevage” des enfants, et qu’elles deviennent des citoyennes de seconde zone dès qu’elles se mariaient. J’ai aussi apprécié les différents ouvrages qu’E. Badinter a consacré au sujet.
C’est la raison pour laquelle je me sens un peu bousculé par sa dernière tribune dans Le Monde.
Sa critique de l’incitation à l’allaitement maternel, au nom de la liberté de la femme me gêne, d’autant plus lorsqu’il ne s’agit que d’une incitation.
Certes, je ne partage pas l’opinion selon laquelle “quand on fait un enfant, on lui doit tout”. Mais je pense néanmoins que lorsqu’on choisit de faire un enfant, qui n’a en général rien demandé à ce stade, on lui doit au moins beaucoup.
Je partage avec elle l’idée qu’une femme a parfaitement le droit de ne pas vouloir d’enfant. Mais cela signifie, en corollaire, que si elle choisit d’en avoir, cela crée forcément des obligations et l’allaitement maternel, s’il ne doit pas être rendu obligatoire, présente, pour l’enfant, un certain nombre d’avantages.
Sa dénonciation de l’écologie “radicale” comme co-responsable d’un mouvement de régression anti-féministe m’apparaît déplacé, même si les déclarations de Mmes Duflot et Kosciusko-Morizet sur le nécessité de remplacer les couches jetables par des lavables me semblent catégoriques et discutables.
Enfin, je suis dubitatif sur l’affirmation: “Le thème de l’indépendance économique des femmes n’est plus tenu. Et le féminisme de conquête, celui qui défend l’égalité, est en sommeil“. Quand le travail des femmes se généralise, la “femme à la maison” devient l’exception et, si le bout du chemin n’est pas atteint, la revendication d’égalité est régulièrement présente dans les préoccutions. Enfin, heureusement, l’égalité continue de progresser.
Je partage son idée selon laquelle “Au-delà du problème des femmes, la société actuelle est très régressive”, et donc que cette régression généralisée freine, y compris les avancées féministes mais je n’ai pas l’impression de vivre une période d’attaques généralisées contre leurs revendications.
Sur le même sujet, voir l’interview, en réponse, de Sarah Blaffer Hrdy, NouvelObs et celle de NKM sur Rue 89.
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