(J-Drama) Nobuta wo Produce : une fable universelle sur l'amitié

Publié le 14 février 2010 par Myteleisrich @myteleisrich

Jusqu'à présent, dans le cadre des dimanches asiatiques, je ne vous ai parlé que de séries coréennes. Ce qui a pu vous donner l'impression erronée que je ne suis jamais allée au-delà de cette péninsule en Asie. En réalité, mon attrait coréen est somme toute assez récent, puisqu'il date surtout de l'année dernière. Aujourd'hui, c'est un post de retour aux sources que je vous propose (chronologiquement, je concède qu'il est probable que j'aurais dû commencer par là).

C'est par le Japon que j'ai découvert les séries asiatiques, il y a de cela 3-4 ans. En fait, j'y suis arrivée de façon peut-être un peu atypique, emportée par ma téléphagie. Car, a priori, je ne corresponds pas trop au profil classique d'amateurs des dramas de ces nationalités. Je n'avais jamais manifesté de véritable intérêt pour l'Asie auparavant. Tout juste le cinéma permettait-il d'entre-ouvrir une porte vers les fictions de ces pays, les films de Wu Xia Pian ou les Miyazaki m'ayant conduit plus d'une fois dans les salles obscures. Mais, à côté, je n'avais quasiment jamais lu de mangas de ma vie (ce qui n'a pas changé, d'ailleurs, depuis). J'ignorais tout aussi de l'entertainment asiatique, n'ayant jamais entendu parler de jpop ou de kpop avant de mettre un pied dedans (il faut dire que je n'ai jamais été très branchée musique). Et mon expérience avec la japanimation était principalement issue d'un passé chargé par des heures passées devant les programmes de jeunesse de TF1, à une époque que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, où les dessins animés japonais trustaient toutes les matinées.

Bref, je n'avais vraiment aucune prédisposition asiatique a priori. J'étais, au mieux, complètement ignorante. Cependant, via des forums ou des blogs de téléphagie "généraliste", je croisais de temps en temps d'intrigants articles évoquant un pan inconnu de la sériephilie et employant un vocabulaire qui m'était tout aussi étranger. De fil en aiguille, se réveilla en moi la curiosité associée à tout instinct de téléphage. Certes, je ne savais pas où je mettais les pieds. Je manquais cruellement de connaissances et de références culturelles ; mais quoi de plus excitant que de partir à l'aventure en des terres sériephiles inconnues ? Pourquoi ne pas tenter une brève incursion pour découvrir en quoi consistaient concrètement ces fictions qui paraissaient très diversifiées ? Qui sait, je pourrais peut-être même apprécier...

Une fois la résolution prise, j'ai ensuite cherché la série adéquate pour débuter. Là encore, un rapide balayage synthétique des forums et blogs m'avait appris l'importance de ce premier contact, mais aussi qu'il existait un certain nombre de "dramas clés" particulièrement bien indiqués. Il fallait une thématique suffisamment universelle pour parler à mon esprit d'occidentale, surtout pour une personne aussi profane que moi. Après diverses hésitations, mon choix s'arrêta sur un drama, jouissant d'une assez bonne réputation et en apparence suffisamment neutre pour ne pas provoquer de chocs culturels trop importants. Il se déroulait en plus dans un des rares cadres dont j'avais quelques souvenirs via les dessins animés : le lycée. Les high school dramas furent d'ailleurs, au cours de mon premier été asiatique, le genre prédominant que je découvris (une ère qui est révolue depuis). Il s'agissait de Nobuta wo Produce (oui, un des grands classiques pour commencer).

Quand j'y repense après toutes ces années, je me dis que ce premier visionnage comprenait une part de naïveté confondante, assez touchante au fond. Il y avait une excitation presque inexplicable, un quasi-émerveillement d'avoir enfin sauté le pas et de me retrouver devant ce décor entièrement nouveau. C'étaient une langue inhabituelle, des moeurs particulière et un environnement, à la fois familier et si différent, de ce que je pouvais connaître.

Je me demande si je pourrais un jour avoir le moindre recul critique sur Nobuta wo Produce, tant cette série occupe une place à part dans la construction de ma téléphagie. Elle est une de ces pierres, fondatrices d'un nouvel édifice, et restées, pour cela, chères à mon coeur. Je n'ai d'ailleurs jamais osé la revoir depuis, de crainte de briser le mythe idéalisé que mon esprit a forgé autour. De peur que 20, 30 dramas plus tard, des situations qui m'avaient tant touché sur le moment, me paraissent soudain d'une plate banalité. Nobuta wo Produce reste protégée dans mes souvenirs, un petit îlot utopique et inaccessible, jouissant d'un souvenir sans doute autant conjoncturel que lié à sa qualité indéniable.

Cette série, datant de 2005, est composée de 10 épisodes. Elle nous raconte une histoire classique, assez universelle : il s'agit d'une fable sur l'amitié, entre trois élèves aux personnnalités très différentes. Nobuko Kotani (Horikita Maki) vient d'arriver dans ce nouveau lycée. Timide et effacée, ne parlant quasiment jamais, elle devient rapidement le souffre-douleur de ses camarades (subissant un ijime). Parallèlement, Shuji Kiritani (Kamenashi Kazuya) est, à l'opposé, le garçon le plus populaire de l'établissement. Toujours entouré, il se sent pourtant profondément isolé, en marge des autres élèves avec lesquels il traîne et pour lesquels il joue la comédie du lycéen parfait, leur présentant l'image qu'ils attendent de lui. Akira Kusano (Yamashita Tomohisa) se situe, lui, à part, assez étrange et cultivant sa marginalité. Il essaye, maladroitement, de se rapprocher de Shuji. Finalement, à la suite d'un enchaînement de circonstances, ces trois étudiants très différents vont se réunir en se fixant un challenge : parvenir à rendre Nobuko populaire. Un fil rouge à l'origine d'une belle amitié.


Nobuta wo produce propose une histoire profondément humaine, d'une simplicité à la fois désarmante et rafraîchissante, qui n'en demeure pas moins très intéressante. Le trio principal offre finalement une association quelque peu atypique, d'adolescents très différents qui, ensemble, vont peu à peu mûrir et se découvrir au contact les uns des autres. Le drama met en scène une introspection touchante, qui conduit à l'apprentissage de ce qu'est l'amitié par trois jeunes gens qui n'avaient encore jamais connus de liens aussi forts. Dotée d'une écriture fine, assez subtile, et qui confère une authenticité troublante à l'ensemble, la série n'écarte d'ailleurs pas la logique ambivalence des sentiments réciproques des héros, traçant les contours flous d'un triangle implicite qui n'est pas destiné à se concrétiser. A tâtons, chacun se construit grâce aux autres, apprenant, au fil des évènements, autant sur lui-même que sur ses amis. L'idée initiale, "produire Nobuta", apparaît, en fin de compte, comme le prétexte parfait, une idée presque puérile, anecdotique, qui a permis cette rencontre a priori improbable entre ces trois adolescents.

Outre cette thématique qui trouve une résonnance universelle, les personnages contribuent grandement à l'attachement que le téléspectateur ressent instantanément pour cette série. Leurs personnalités gagnent en profondeur et en complexité au fur et à mesure que les épisodes introduisent de nouvelles situations, nuançant leurs traits de caractère tout en restant fidèles à ce qu'ils sont. Nobuko ne deviendra jamais une jeune fille extravagante et sûre d'elle, mais elle va peu à peu prendre confiance en elle, apprenant à se tourner vers les autres. Shuji reste attaché aux apparences, tout en comprenant que l'on ne peut mener une vie uniquement basée sur un artifice.  Akira garde ses comportements loufoques et spontanés, tout en découvrant ce que s'attacher à quelqu'un signifie. Tour à tour, drôles, touchants, suprenants ou encore émouvants, ces trois jeunes gens nouent une relation d'amitié difficilement catégorisable, qui ne peut laisser indifférent.

Au-delà de ce trio principal, c'est l'ambiance générale de la série qui l'impose comme une fiction à part. Elle bénéficie d'un récit qui mélange habilement les tons, passant avec aisance de moments légers à des scènes véritablement poignantes, jouant sur le ressenti et les émotions du téléspectateur comme de ses protagonistes. Le drama utilise d'ailleurs toute la palette de ressorts scénaristiques à sa disposition, n'hésitant pas à introduire quelques scènes très décalées, plutôt déjantées, qui s'intègrent pourtant parfaitement dans la narration. Il parvient également à exploiter au maximum une galerie de personnages secondaires particulièrement riches. Que ces derniers servent de guides ou bien de révélateurs pour nos héros, ils permettent d'ajouter une dimension supplémentaire à l'histoire.

Concernant le casting, si, à l'époque, je ne les connaissais absolument pas - je n'avais fait aucune recherche avant de regarder la série -, il est inutile de les présenter : tout amateur de j-dramas a déjà croisé les trois acteurs principaux, qui sont des habitués du petit écran japonais. Kamenashi Kazuya, Horikita Maki et Yamashita Tomohisa délivrent ici une performance d'ensemble homogène qu'il faut saluer. Dans cette série, peut-être aidés par la force du thème de départ, ils parviennent à créer à l'écran une réelle alchimie entre eux, si bien que le téléspectateur ressent une empathie instantanée pour ce groupe atypique d'adolescents en quête d'eux-mêmes. D'ailleurs, j'ignore si c'est une conséquence de cette ambiance particulière, mais j'avoue qu'il s'agit du seul rôle dans lequel Yamapi m'ait réellement convaincu en tant qu'acteur (ou alors, je suis mal tombée pour les dramas ultérieurs).
Bilan : D'une authenticité presque désarmante, Nobuta wo Produce est une série profondément humaine et touchante. C'est une histoire d'une grande simplicité, sur l'adolescence et ses apprentissages, abordant des thématiques connues, au sein desquelles l'amitié occupe une place centrale. Elle offre un récit dont la force réside, tant dans l'attachement instantané ressenti par le téléspectateur, que dans le caractère universel de son thème, qui trouve une résonnance particulière auprès de chacun.

NOTE : 8/10


Un extrait vidéo (en VOSTF) :


Le générique de fin, la chanson Seishun Amigo, par Shuuji to Akira (interprétée par les deux acteurs principaux de la série) :