Une BD idéale pour la Saint-Valentin !

Par Marigotine

            

Attrape-moi..mais ne viens pas trop vite, un album de Védrines et Vaile (Drugstore)

CHRONIQUE - La sélection d'un album qui vient de paraître et analyse des planches image par image. Cette semaine Attrape-moi… mais ne viens pas trop vite, par Marc Védrine et Vicky Vaile (Drugstore)

Les Auteurs.

Né à Boulogne-Billancourt le 28 janvier 1971, Marc Védrines a toujours été un  passionné de BD. Il avoue même «avoir signé sa première bande dessinée à l'âge de six ans». Diplômé en arts plastiques, il travaille d'abord dans la publicité, tout en faisant des illustrations pour le magazine «Time-runner». En 2001, il rencontre Jérémie Kaminka qui dessine dans l'animation. Ensembles, ils publient 3 tomes du thriller fantastique Phenomenum, chez Glénat. Quant à Vicky Vaile, mis à part référence à Vicky Vale, la journaliste amoureuse de Batman, interprétée par Kim Basinger dans le chef-d'œuvre de Tim Burton (1989), c'est sa première incursion dans le domaine de la BD. On murmure que dans la vraie vie, Vicky partage la vie de Marc et que nombres d'anecdotes de l'album sont tirées de leur vie de couple !

L'album.

Allez, on ne va pas se le cacher bien longtemps, c'est le petit coup de cœur de ce début d'année BD. Et un cadeau idéal pour passer une agréable Saint-Valentin entre amoureux. Attrape-moi… mais ne viens pas trop vite raconte surtout comment Garance va tomber amoureuse de Mathieu... Qui est Garance ? Elle a 33 ans. C'est un joli brin de fille. Elle est gourmande, espiègle, expérimentée, sans tabou et un rien blasée par l'attitude des mecs. De son côté, Mathieu, la trentaine gamine, est un type charmant mais un peu (beaucoup) timide. Il fait plutôt partie de la catégorie des «ados éternels», et se demande encore si les femmes viennent réellement de Venus, parce que dans le fond, il ignore tout des femmes et de leur psychologie.

En cela, «Attrape-moi mais ne viens pas trop vite» est un parfait décryptage intime des relations amoureuses des Français d'aujourd'hui.

D'une page sur l'autre, le scénario fait avancer la trame principale de l'histoire d'amour, tout en jouant habilement la carte d'un gag par page. Chaque planche et chaque situation sont l'occasion d'aborder les frustrations des célibataires en quête d'amour, une leçon de flirt, les non-dits du couple, ou encore les anecdotes souvent assez justes qui entourent la psychologie amoureuse. L'ensemble forme un recueil cohérent et très amusant. Un peu comme dans une série américaine, ou un bon sitcom façon «Friends» ou «How I met your mother». Le dessin de Védrine fait aussi la part belle à l'érotisme et, il faut dire que ses héroïnes sont très joliment représentées. On attend le deuxième tome avec impatience…

Les planches d'Attrape-moi ..mais ne viens pas trop vite

Planche 3 : D’emblée, le titre frappe : « arithmétique ». La première case, panoramique, plante le décor. A savoir un bel après-midi ensoleillé à Paris, dans le quartier Saint-Germain, à la terrasse des Deux magots. Le va et vient des passants est ponctué par des chiffres : « 3 », « 7 », « 12 ». La quadruple bulle de pensée mène directement le regard du lecteur vers une personne en chemisier rose fushia cachée derrière un magazine. Les trois petites cases suivantes, bien rythmées, permettent de tout comprendre : la belle héroïne admire et note les fessiers des messieurs qui passent sous son regard. On admirera la mise en scène de cette planche qui offre des cases subjectives vue du point de vue de Garance, et sait s’éloigner du champ des deux copines en train de discuter quand il le faut pour prendre le recul nécessaire. Cette première planche donne le ton de l’album : piquant, coquin, drôle, mais surtout diablement bien vu !

Planche 5 : cette planche utilise des cases aux bords arrondis, ce qui signifie que l’action se situe dans le passé, en flash-back. Comme une bonne chanson, la mise en page rythme l’ensemble de la page d’une manière très dynamique : une case en longueur pour planter le décor. Suivie d’une série de quatre cases verticales qui scandent la métamorphose de Garance en super top model. On appréciera la bulle de pensée dans laquelle Garance se dit qu’elle ferait bien de s’acheter un Power-Plate pour se raffermir le fessier. Case suivante : le « Tiens voilà Garance ! » donne le top départ du gag : la bonne copine Maud qui comptait attirer les mecs à elle, est furieuse de constater l’effet immédiat d’une robe courte et moulante sur deux mâles célibataires. Le dernier gag qui vient ponctuer la page est irrésistible : le bon vieux coup du « sourire Ultrabright » agrémenté d’une belle feuille de salade !

Planche 15 : La planche du passage à l’acte. Dès la première case, on comprend l’embarras des deux protagonistes. Garance et Mathieu sont immobiles, debouts et Mathieu se gratte l’arrière du crane. Aucune bulle. Le contact est compliqué à établir. Védrine et Vaile mettent alors en place un astucieux double système narratif. D’un côté les bulles de pensée, et de l’autre les dialogues effectivement prononcés. L’effet comique est assuré. Les quatre dernières cases se passent de commentaires. Mathieu balance une phrase totalement creuse. Garance lui saute dessus en lui servant un schotch. Les amoureux roulent littéralement sous le canapé. Dernière case : seuls les pieds s’agitent au-dessus de la table basse, qui d’ailleurs est généreusement inondée d’alcool. La nuit promet d’être belle.

Planche 31 : La séquence s’orchestre en trois parties. Les protagonistes dans la baignoire de la salle de bain, qui papotent gaiement. Garance veut être rassurée sur les sentiments de son Mathieu et sur l’avenir de leur couple. Lui, soudain, visualise en une sorte de flash-forward futuriste ce qu’ils seront dans quelques dizaines d’années. Puis, dans la série de cases de bas de page, il revient soudain à la réalité. Là encore, Védrine et Vaile composent leur planche de façon à opposer le mode de pensée du héros à celui de l’héroïne. Garance tente de ses rassurer par les mots. Mathieu s’inquiète en visualisant le futur. Le verbe vénusien contre l’image martienne. Mais rien ne vaut un bon bain chaud pour s’égailler la libido…

     Que du  "vé cul"

      Marigotine