“Courez, vous avez encore une chance!” Et oui, j’ai couru et glissé sur le verglas pour l’Orchestre du Théâtre Mariinsky de Saint-Pétersbourg et pour son chef Valery Gergiev. Je franchis le seuil fatidique juste avant la fermeture des portes et je plonge sans transition dans l’ouverture Roméo et Juliette de Tchaikovsky. Après un début de semaine à la salle Pleyel, le célèbre orchestre fait escale aux BOZAR de Bruxelles pour deux concerts.
En retard, sans programme, je fais une découverte sans artifices, directe. Je connais simplement le nom des compositeurs et je ne saurais mettre un nom sur les oeuvres qu’après-coup. La première oeuvre me parait construite et romantique, Tchaikovsky sans doute. La deuxième emprunte des ampleurs élégiaques, on sent la steppe et les chevaux, les camps de feu, les étoffes précieuses et lourdes. Toute cette panoplie d’images qui défilent, le souffle lent, est l’apanage de Borodin, sa signature identitaire. L’interprétation est belle, précise et chaude.
Pourtant, c’est l’interprétation de la troisième oeuvre qui me subjugue. Elle est curieuse, en quatres mouvements qui se fondent dans un tout. Des solos en filigrane introduisent les mélodies principales vibrantes et sonnantes, l’orchestre s’en empare, puis elles reviennent telle les rymes d’une poème. Un moment magique tel un conte de fée aux contours estompés. Après je découvre que c’était Shéhérazade de Rimsky - Korsakov. En termes de repères musicaux, elle serait proche de la Symphonie fantastique d’Hector Berlioz (1830) et le poème symphonique composé par Franz Liszten 1854. Les thèmes qui me paraissaient connus étaient certainement celui de Schéhérazade (violon et harpe) et celui du sultan (cuivres). Sans connaitre le titre mon imagination vagabondait, toutefois, loin des palais orientaux…
En préparant ce billet je suis tombée sur une belle description de cette oeuvre, faite par Rimski-Korsakov lui-même, dans Chroniques de ma vie musicale :
« C’est en vain que l’on cherche des leitmotive toujours liés à telles images. Au contraire, dans la plupart des cas, tous ces semblants de leitmotive ne sont que des matériaux purement musicaux du développement symphonique. Ces motifs passent et se répandent à travers toutes les parties de l’œuvre, se faisant suite et s’entrelaçant. Apparaissant à chaque fois sous une lumière différente, dessinant à chaque fois des traits distincts et exprimant des situations nouvelles, ils correspondent chaque fois à des images et des tableaux différents. »
Une parenthèse enchantée menée avec superbe par Valery Guergiev.
L’orchestre du théâtre Mariinsky continue sur sa lancée, un dernier concert à la salle Pleyel complétera la présentation de l’ensemble des symphonies de Tchaikovsky. La 3e et la 6e (la fameuse “Pathétique”) restent à découvrir ce vendredi. Cet événement bénéficie de nombreux relais.
On peut suivre le concert en direct sur les sites de la Salle Pleyel (sallepleyel.fr) et de la Cité de la musique (citedelamusique.fr), où elles seront ensuite disponibles pendant deux mois. On peut le voir sur la chaîne européenne Mezzo et la télévision russe Kultura et seront diffusés plus tard par France Télévisions. France Musique diffusera sur ses ondes les 9, 23 et 25 février la bande son, qui sera ensuite proposée à la ré-écoute sur le portail internet de Radio France.
Concert du 27 février 2010 au BOZAR, Bruxelles
Pyotr Tchaikovsky Roméo et Juliette, ouverture-fantaisie (version 1880) Alexander Borodin Symphonie n° 2 Nikolay Rimsky-Korsakov Shéhérazade, suite symphonique, op. 35