J'ai évoqué sur ce blog l'éveil par la vue, par les sons, par les odeurs mais j'ai plus plus rarement parlé de l'éveil par les sensations.
Voici une anecdote zen, savoureuse comme je les aime, qui relate un éveil par une douleur :
"Paï-Tchang Houai-hai (720-814) se promenait avec son maitre Ma-Tsou. Un groupe d'oies sauvages passa dans le ciel et le maitre demanda :
"-Qu'est-ce que c'est?
-Ce sont des oies sauvages, Maitre.
-Vers où volent-elles?
-Elles ont disparu."
Ma-Tsou saisit brusquement le nez de son disciple et le tordit violemment. Paï-tchang eut une sueur froide ; il s'éveilla."
On peut supposer que Ma-Tsou n'a pas été satisfait de la réponse de son disciple parce que Pai-Tchang faisait encore une distinction entre le moi et les phénomènes. Peut-être aurait-il du répondre : "En moi, ou vers le vide, ou encore :quelles oies?".
En tout cas, la douleur (et la surprise) le ramène soudainement à lui-même et à la vacuité.
Dans le vijnana bhairava, tantra du Shivaisme du cachemire, on lit également qu'une douleur peut ramener à la source :
"Après avoir perforé une partie quelconque de son corps avec un instrument pointu ou autre, si l'on tient alors son esprit appliqué à cet endroit précis, la progression éclatante, vers Bhairava se produira."
Mais rassurons-nous, les sensations plaisantes( jouissance sexuelle, caresse, douce chaleur...etc) ramènent aussi vers la vacuité ! Inutile donc de se faire du mal.
Cependant, on peut fermer les yeux, et se pincer doucement la peau de la main. On prendra conscience alors que la sensation apparait dans le vide et ne nous enferme pas dans un corps. C'est à partir de la conscience nue et sans sensation que je perçois les sensations qui passent, comme des oies dans le ciel...
josé le roy