Qui a vu Nelken (Les oeillets) en 1983 dans la Cour du Palais des Papes à Avignon, ne peut oublier l'immense ovation réservée à une chorégraphe qui déjà dérangeait en mélangeant la beauté et le trouble. La moitié du public avait quitté la salle. Ceux qui sont restés , l'ont payé en larmes d'émotion. Pina Bausch a fait entrer le théâtre dans la danse ou l'inverse. Elle a surtout montrer les contradictions et les empêchements par le geste juste,elle a fait hurler les corps corsetés par les déterminismes et les préjugés, les corps engoncés dans les représentations dominantes et dominatrices.Elle a irradié de ses mélancolies les soleils noirs de Pedro Almodovar, ranimé comme lui les corps comateux ou dépourvus de tout désir.Elle a su élever la chorégraphie au rang d'art total mais ce qu'il faut encore saluer c'est sa poésie et son humour . Pina restera la plus grande artiste chorégraphe, une révolutionnaire du silence (seulement troué de quelques douloureux borborygmes) , une grande vivante, riante.
Il manque quelqu'un aujourd'hui à la danse. Quelqu'une.