La violente tribune de Guy Verhofstadt dans Le Monde (ce jeudi) intitulée «Il y a quelque chose de pourri en République française » n’a visiblement pas fait un tabac médiatique en France ni suscité une marée de réactions. En revanche, les critiques ont été nombreuses et souvent virulentes dans l’opinion publique belge francophone.
Ce que les lecteurs de journaux belges (qui ont largement fait écho à ce texte) reprochent principalement au célèbre Flamand, c’est de s’ériger en donneur de leçon vis-à-vis d’un pays voisin dans un domaine où… la Flandre n’est certes pas un modèle à suivre. Verhofstadt n’est pas « la Flandre » mais le raccourci et l’amalgame sont aisés et fréquents au café du commerce. Ce qui gêne, c’est qu’il est plus facile de fustiger le comportement d’un voisin que celui de ses propres frères et sœurs de sang qui votent en masse pour des partis nationalistes et d’extrême-droite.
Sur le fond, ce nouveau parangon de vertu n’a évidemment pas tort, même si son lyrisme fait parfois sourire, mais était-ce son rôle de jouer au donneur de leçon à un pays ami ? Lui qui n’est plus écouté ni même entendu dans sa propre « nation » flamande noyée qu’elle est dans un piteux complexe identitaire proche de la caricature ? Quelle mouche a piqué ce grand homme pour qu’il monte ainsi au créneau et avec une telle véhémence contre la France de Nicolas Sarkozy et son flop sur l’identité nationale ?
Quelle mouche l’a donc piqué, cet ancien Premier ministre devenu chef du groupe libéral au parlement européen ? Il m’étonnerait que ce soit un simple coup de sang médiatique. J’y vois personnellement une attaque en règle contre l’UMP sarkozienne qui a choisi d’adhérer au Parti Populaire Européen (PPE) cher à Merkel et Barroso plutôt qu’à l’Alliance des Démocrates et des Libéraux qu’il préside. Rancoeur et rancune.
J’y vois aussi, indirectement, une stratégie politique interne à la Flandre où le parti libéral dont il fut le président (Open VLD, proche de… l’UMP) frôle la déconfiture parce qu’il est moins nationaliste que les autres : affirmer publiquement l’image de tolérance interculturelle qu’il voudrait voir fleurir dans son parti auquel il est très attaché. Une mission difficile, voire impossible.
C’était donc faire beaucoup de bruit pour rien.
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Le texte intégral dans Le Monde et une synthèse d’AFP dans La Libre Belgique.
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