L’échec des politiques de développement mimétique, l’essoufflement des moteurs idéologiques des États postcoloniaux et les crises laissées ouvertes par la libéralisation économique nourrissent le mécontentement populaire dans le monde arabe. Émeutes, nouveaux syndicats autonomes, mouvements islamistes, associations de base et ONG, minorités nationales butent contre l’autocratisme autoritaire des régimes en place, monarchies et républiques.
Si prétendre dresser un État des résistances dans le monde arabe semble à première vue relever de la gageure, c’est d’abord le résultat des puissants lieux communs qui structurent l’imaginaire occidental en la matière. Un imaginaire souvent nourri par l’indifférence et l’ignorance, mais aussi par le mépris ou la méfiance, que la proximité géographique tend d’ailleurs plus à exacerber qu’à atténuer. À l’inverse de l’Amérique latine dont Marc Saint-Upéry (2007) parle à raison comme du « lieu d’un exotisme étrangement familier et de l’espace de projection privilégié » en particulier pour la gauche européenne, les rives méridionales et orientales de la Méditerranée renvoient davantage à « un voisinage étrangement distant » et à « une source de perplexité répétée ». Deux clichés dominants voilent singulièrement nos perceptions des dynamiques contestataires à l’oeuvre dans cette région.
D’abord, celui du « vide d’acteurs » civils et sociaux qui caractériserait les sociétés non démocratiques. L’autoritarisme, le militarisme ou les tiraillements des États du Maghreb et du Moyen-Orient auraient pour corollaire mécanique la confiscation rédhibitoire de tout espace autonome de mobilisation citoyenne et de contestation sociale. Dans ce schéma simplifié, point d’alternative réelle entre soumission et émeute. D’où une double représentation, réifiante et homogénéisante, de « la rue arabe », tantôt apathique, inerte, « morte », tantôt « irrationnelle », belliqueuse, dangereuse (Bayat, 2003). À l’idée de sociétés statiques, arrêtées, répond l’épouvantail d’irruptions menaçantes et de mouvements repoussants (« ugly movements »…
Ce qui nous amène au second poncif tout aussi répandu de ce côté-ci de la Méditerranée, à savoir l’épuisement de l’essentiel des formes protestataires du monde arabe dans la figure chosifiée des « fous de Dieu », figure qui fixe et surdimensionne la rhétorique religieuse. Les contradictions supposées intrinsèques entre mouvements islamistes et dynamiques de modernisation sociale et politique suffisent à « ghettoïser » l’objet, à le stigmatiser. La prétendue « exception arabo-musulmane » joue à plein, alimentée par le mythe essentialiste d’« une spécificité culturelle et irréductible de ces sociétés » et par une focalisation culturaliste sur un fondamentalisme islamiste figé (Bennani-Chraïbi et Fillieule, 2003).
Or, les réalités des résistances à l’ordre établi et aux inégalités sociales dans le monde arabe apparaissent, à un deuxième niveau de lecture, à la fois plus denses, plus dynamiques et plus complexes. Et elles s’inscrivent dans un contexte évolutif. L’échec des politiques de développement mimétique, l’essoufflement des moteurs idéologiques des États postcoloniaux et les crises laissées ouvertes par la libéralisation économique, la mondialisation et la géopolitique du pétrole ont nourri le mécontentement populaire et ouvert la voie à la (réémergence ou à l’autonomisation d’organisations sociales, identitaires, nationalistes et démocratiques…
Pouvoirs autocratiques et crises de légitimité
Du Maroc à l’Égypte, de la Syrie au Qatar, de la Libye à l’Arabie saoudite, s’il est une constante qui souffre peu d’inflexions dans le monde arabe, des indépendances à aujourd’hui, c’est le caractère autocratique et autoritaire de ses quelque vingt États postcoloniaux. Monarchies et républiques confondues – au-delà de leurs oppositions fluctuantes en matière d’obédiences externes et de gestion interne des rapports entre arabité et islamité (Khader, 2009) – partagent ce trait commun : en dépit de sérieuses crises de légitimité, elles sont parvenues à stabiliser, maintenir et conforter leur pouvoir au fil des décennies.
Un pouvoir construit dans la foulée des luttes de libération nationale et fortement centralisé dès le début pour répondre tant à la soif d’indépendance qu’aux besoins de développement économique et aux attentes sociales des populations. « Rattrapage du retard historique », réformes agraires, modernisation, nationalisation, industrialisation, tels furent les maîtres mots de la période. Avec le nationalisme, le panarabisme ou le socialisme comme propulseurs politiques, les États arabes coulèrent la concentration du pouvoir dans le béton des constitutions. Ce qui était à leurs yeux le moyen le plus adéquat pour « garantir leur indépendance face aux menaces extérieures, contenir les tensions sociales, adoucir les clivages entre classes et, partant, réduire toute source potentielle de conflit » (Khalil, 2004).
Le bilan de ces premières décennies « tiers-mondistes » est connu : si d’indéniables et importants progrès sociaux ont été enregistrés – les gouvernants tirant une bonne part de leur légitimité de leur fonction allocataire et distributive –, le nationalisme étatiste arabe a bien vite dû faire face à de multiples crises. Crises politiques, économiques, sociales et culturelles. La cuisante défaite militaire contre Israël en 1967 et les rivalités interarabes – entre nassériens [1] et baathistes [2], entre baathistes syriens et irakiens, entre « républiques progressistes » et « monarchies réactionnaires » sur fond de guerre froide, etc. – vont ainsi participer au net repli idéologique du rêve panarabiste.
En interne, les crises de financement et les carences des stratégies industrialisantes de substitution aux importations, ajoutées à l’endettement inconsidéré (des pays sans rente pétrolière pour effacer l’ardoise), à l’explosion démographique, à l’aggravation de la dépendance alimentaire et à la montée de l’insatisfaction populaire à l’égard des élites militaires ou des grandes familles régnantes, vont jeter les gouvernements arabes dans les vents dominants de l’économie internationale : ajustements structurels, libéralisation, privatisations, intégration subordonnée au marché mondial.
Pour autant, l’émiettement progressif du rôle de l’État et le « pluralisme politique » à doses contrôlées ne vont pas entamer l’autocratisme centralisateur, les partis uniques et les « leaders à vie ». Au contraire, les régimes autoritaires s’en trouveront consolidés (Camau, 2005). Comme l’écrit Bichara Khader, « les États, même affaiblis, font preuve d’une exceptionnelle résistance, grâce à la concentration des appareils de coercition et à leurs alliances avec les puissances extérieures qui finalement préfèrent traiter avec des États, certes autoritaires, mais stables et fiables » (2009). Sur fond de népotisme, de clientélisme et de corruption, les collusions entre élites politiques et économiques ont joué un rôle central dans la pénétration du capital étranger et dans l’essor d’un capitalisme spéculatif. La rente pétrolière et les surplus sont massivement placés dans le monde occidental, plutôt qu’investis dans le monde arabe (Mutin, 2009).
Cela étant, les pouvoirs vont tenter de continuer à asseoir leur légitimité sur les traditions : patriarcales, monarchiques, tribales et… islamiques. À une islamisation par le bas des sociétés arabes générée dans les impasses des politiques de modernisation, répond en effet une certaine réislamisation par le haut des régimes en place. « Si la pieuse oumma (communauté des croyants) a remplacé la grande nation arabe dans l’imaginaire politique, si on ne peut plus ignorer que l’islamisme a repris des mains du nationalisme arabe la bannière de la résistance, il ne faut pas en être surpris : non seulement parce que ce dernier a subi de sérieux revers, mais aussi parce que la foi musulmane est toujours restée prégnante dans nos sociétés au cours de l’histoire » (Ben Abdallah El Alaoui, 2009). La permanence des équipes gouvernantes tend à accréditer l’idée que ce ralliement opportuniste au discours islamiste – pour éviter qu’il ne soit utilisé contre eux – s’est transformé en victoire sécuritaire et politique (Ferrié, 2009).
Plus récemment encore, on a assisté à un certain « retour à l’État » des autorités arabes, au moins dans la rhétorique. Et ce, d’une part, à la faveur d’une crise mondiale qui a achevé de discréditer les tenants de la doxa néolibérale et réactualisé le principe de l’intervention publique et l’importance des politiques sociales… pour prévenir l’agitation (Alternatives Sud, 2009) ; d’autre part, à la faveur de la capacité retrouvée de grandes nations du Sud à questionner collectivement l’ordre mondial et de la volonté « tiers-mondiste » de s’y ménager de nouvelles marges de manoeuvre politiques et économiques en vue de récupérer la maîtrise de leur insertion dans la mondialisation (Alternatives Sud, 2007). La participation active des présidents Kadhafi (Libye) et Bouteflika (Algérie) au deuxième sommet Afrique-Amérique du Sud qui s’est tenu à l’automne 2009 au Venezuela s’inscrit dans cette tendance.
Mouvements sociaux et sociétés civiles autonomes et progressistes ?
Dans ce contexte qui consacre la persistance de pouvoirs aux boussoles idéologiques cyclothymiques et prudemment prêts à tout pour durer, qu’en est-il des résistances internes ? Des syndicats ouvriers ou paysans, d’hier et d’aujourd’hui ? Des mouvements islamistes, qui, dans toute leur diversité, semblent dominer le panorama des organisations sociales ? Des minorités nationales, ethniques, tribales ou religieuses, qui minent l’unité des États postcoloniaux ? Des associations, ancrées socialement ou non, qui infléchissent ou contestent l’ordre établi ? Qu’en est-il aussi de l’attitude spécifique des autorités à leur égard, des voies de l’exercice de la domination ? Répression, instrumentalisation, cooptation, institutionnalisation ou transformation ?
Syndicats : hors de l’« encadrement », la répression
Dès le lendemain des indépendances, les formes prises par les organisations de travailleurs arabes – des villes comme des champs – vont être intimement liées au profil modernisateur des nouveaux États postcoloniaux. Moteurs des processus d’industrialisation qui visent à les doter de véritables économies nationales, ceux-ci deviennent aussi les premiers employeurs des nouvelles classes de salariés. Les stratégies de développement, mues le plus souvent par un populisme socialiste qui tend à célébrer « le peuple » comme un corps soudé, cherchent alors à « atténuer les conséquences négatives de la croissance pour certains groupes sociaux (les ouvriers, les paysans, la petite bourgeoisie urbaine) aux dépens d’autres, plus particulièrement les capitalistes et les propriétaires fonciers » (Heydemann, 1999, cité par Gobe, 2008).
Et de fait, l’État apparaît aux yeux des travailleurs – « cols bleus » et « cols blancs » – à la fois comme double distributeur de revenus – salariat public et avantages sociaux divers (éducation, santé, logement&hellip – et comme garant d’une sécurité d’existence en progrès. Contrepartie du deal : « Mise sur pied d’organisations professionnelles gouvernementales, lois limitant ou abolissant le droit d’association, détricotage de tous les moyens de résistance et recours à des mesures de sécurité intérieure, voire à la violence » (Khalil, 2004). En un mot, la politologie appelle ce système le « corporatisme autoritaire ». Il s’agit « d’encadrer des groupes sociaux populaires dans des structures verticales de mobilisation au profit d’un projet national de développement » (Gobe, 2008), projet national se réclamant, en Égypte comme, à des degrés divers dans les années 1960-1970, en Tunisie, en Algérie, en Syrie, en Irak, en Libye…, du socialisme.
Exclue l’idée de conflit ou de lutte des classes, les syndicats et les organisations professionnelles s’apparentent alors à des instruments d’encadrement, de mobilisation de la société et de désamorçage des protestations. Instruments dont les cadres parlent au nom des travailleurs mais au service de l’État qui les gratifie en retour. Selon les pays, la formule va connaître des déclinaisons diverses et évolutives. Immédiate ou progressive, populiste ou intégrationniste, technocratique ou organique, au sein d’une seule confédération ou à des niveaux multiples, la neutralisation des capacités revendicatives des travailleurs génère aussi des stratégies diverses dans le chef des dirigeants syndicaux les plus combatifs. Stratégies périlleuses allant de la volonté d’en découdre au sein même des canaux de mobilisation officiels, jusqu’aux tentatives d’échapper à l’hégémonie gouvernementale, en donnant naissance à un mouvement ouvrier en marge du syndicalisme légitimiste.
Le virage néolibéral des années 1980 va générer de profondes transformations socio-économiques. Les politiques de libéralisation et de privatisation concomitantes à la mise en oeuvre des programmes d’ajustement structurel contractent d’une part sérieusement les « bases » classiques des organisations professionnelles officielles, diversifient d’autre part significativement les groupes sociaux et boostent la flexibilisation, la précarisation, le chômage et l’« informalisation » de larges secteurs de l’économie. Corollaire : le corporatisme d’État des années 1960 et 1970 est contraint, sur fond d’apparente démocratisation, à une « restructuration tactique de ses mécanismes de contrôle » (Murphy, 1999) et finalement, n’en subsiste que sa dimension répressive (Gobe, 2008).
Du côté des travailleurs, si les nouvelles conditions socio-économiques opèrent surtout comme des facteurs de dispersion et de démobilisation sociale, elles ouvrent aussi la porte à des éruptions contestataires incontrôlées, en dehors souvent des instruments syndicaux officiels. De plus en plus déconnectés des réalités sociales, ces derniers n’en restent pas moins appelés par les autorités à jouer un rôle d’étouffoir des revendications, que celles-ci portent sur les orientations économiques, sur la corruption, le clientélisme, le système de privilèges de l’ordre établi ou encore sur l’un ou l’autre cas concret d’exploitation. Avec bien sûr, d’importantes variations selon les configurations nationales et historiques particulières.
Peu de similitudes en effet entre, par exemple, la complète inféodation au pouvoir de la Confédération générale des syndicats des travailleurs d’Égypte sans plus aucune prise sur ses bases supposées, la relative indiscipline de l’Union générale des travailleurs tunisiens déchirée entre l’action des syndicats de base et la concertation en trompe-l’oeil du régime de Ben Ali et le frauduleux pluralisme syndical du royaume chérifien. En Irak, le gouvernement sous tutelle états-unienne continue à appliquer les lois antisyndicales de l’ère de Saddam Hussein, notamment « la tristement célèbre loi 150, qui interdit les syndicats dans les entreprises publiques et semi-publiques » (CSI, 2009). Pratiquement dans tout le monde arabe, la répression tend à prévaloir face à l’émergence et à l’activisme de syndicats indépendants et aux mobilisations contre les licenciements massifs liés à la crise économique mondiale. En Jordanie, la violence policière à l’encontre des travailleurs du port d’Aqaba en août 2009 a marqué les esprits. En Égypte, une série de manifestations contre les fermetures d’usine et pour le droit des travailleurs ont déclenché des interventions des forces de l’ordre d’une brutalité extrême. Et si un premier syndicat sectoriel indépendant (de quelque 50 000 membres) avait pu être reconnu dans ce pays en début d’année, de récentes manoeuvres gouvernementales visent à en limiter l’indépendance et les marges d’action. Au Maroc, les syndicats risquent bien d’être exclus des futures instances de négociation sur les salaires et les conditions de travail (CSI, 2009). Et en Tunisie, les chômeurs et les travailleurs acteurs de la « révolte du bassin minier de Gafsa » en 2008 sont encore sous les verrous (Gantin et Seddik, 2008).
Reste que cette ébullition sociale cache mal le déclin relatif des mouvements sociaux traditionnels, basés sur les identités de classe (organisations paysannes, coopératives, syndicalisme&hellip et longtemps inféodés aux régimes en place. La vaste majorité des travailleurs est aujourd’hui plus que jamais dispersée dans l’économie urbaine informelle et la question sociale dépasse largement les luttes pour les salaires, pour englober les problématiques de l’accès à l’emploi, au logement, à l’eau, à l’éducation, à la santé, aux transports… à des conditions de vie dignes.
Mouvements islamistes : contestation sociale et affirmation identitaire
En dépit de l’impressionnante stabilité des monarchies héréditaires et des républiques militaires du monde arabe qui semble démentir la lame de fond, la poussée islamiste occupe bel et bien le devant de la scène depuis plus de trois décennies. « Réaction de groupes sociaux déçus par les échecs du “nationalisme laïc” ou les tensions consécutives aux politiques de modernisation », l’islamisme – idéologie sociopolitique contemporaine plus que théologie – apparaît d’abord comme l’expression sociale d’une volonté de « reprise en main de sociétés en passe d’acculturation et d’occidentalisation » (Mutin, 2009). Reprise en main culturelle certes, mais aussi sociale et politique et dans une moindre mesure économique.
Cela dit, à l’idée d’un islamisme « espace compensatoire » des mutations traumatisantes (exode rural, urbanisation accélérée, boom démographique), de l’échec du développementalisme et de l’« État importé », de la crise économique et du sentiment de marginalisation exacerbé par la mondialisation, François Burgat ajoute à raison « la dimension culturelle, identitaire et nationaliste du phénomène, nuançant sa dimension strictement religieuse, considérant comme relativement marginale sa composante extrémiste et dénonçant par-dessus tout l’idée de son antinomie supposée avec les dynamiques de modernisation sociale et de libéralisation politique » (Burgat, 2001, cité par Bennani-Chraïbi et Fillieule, 2003).
Profond et ancré, le phénomène est aussi pluriel. Dans les identités sociales mobilisées d’abord, qui vont des victimes des carences des États, des laissés-pour-compte de l’accroissement des inégalités ou des jeunes universitaires en porte-à-faux avec le système, jusqu’à des secteurs établis, plus aisés socialement. Dans les modes d’organisation et de mobilisation ensuite, qui prennent notamment la forme, dans une multitude de quartiers et de villages du monde arabe, d’institutions et d’associations islamiques dispensant une large gamme de services sociaux et d’aide aux familles et aux communautés déshéritées. Enfin, le phénomène est aussi pluriel dans ses orientations, dans la portée qu’il donne à ses actions, dans ses revendications.
Tantôt qualifié de nouveau « tiers-mondisme » dans le sens où il actualise l’agenda nationaliste et anti-impérialiste des partis ou mouvements de gauche qu’il est venu en quelque sorte relayer sur la scène protestataire arabe, tantôt assimilé à un exclusivisme religieux discriminatoire à l’égard des non-musulmans et des femmes, l’islamisme séduit ou crispe les acteurs sociaux progressistes. Il fournit en tout cas le gros des foules et des mouvements qui contestent les ordres politiques arabes et, au-delà, l’« occident colonisateur » au nom de l’autodétermination du peuple palestinien et du monde arabo-musulman.
Nicolas Dot-Pouillard qui relève sur cet axe « émancipateur » une série de convergences à l’oeuvre entre organisations islamistes de diverses obédiences et tendances de gauche, note toutefois que la fracture entre ces deux pôles réside moins dans les questions démocratiques ou de genre (entre « traditionnels » et « modernes » – préjugé pourtant tenace – que dans la question sociale (entre libéraux et socialistes). Question sociale qui en effet tend à opposer le positionnement économique souvent à droite de l’islam politique – tout comme les contradictions de classe en son sein –, aux campagnes antiprivatisation et aux clés d’analyse marxiste des gauches (Dot-Pouillard, 2009).
Sur cet aspect comme sur les précédents, « l’infinie variation des configurations locales » (Dupret, 1999) et la multiplicité des foyers de référence des acteurs islamistes relativisent fortement les lectures généralisantes. Alors que plusieurs de ces acteurs ont souvent émergé grâce à la bienveillance des États arabes (pour affaiblir les oppositions internes de gauche) et des puissances occidentales (pour mettre en échec l’arabisme laïc d’inspiration socialiste), ils leur ont donné par la suite bien du fil à retordre. Selon les pays, différents scénarios ont prévalu : de la confrontation sanglante entre factions islamistes armées et militaires éradicateurs (Algérie) à l’inclusion conditionnée dans le jeu politique (Jordanie)…
Dans tous les cas, plusieurs observateurs ont depuis longtemps diagnostiqué l’échec de l’islam politique (Roy, 1992), notamment par manque de contre-modèle de société, d’alternative économique à proposer. Les régimes, peu ou prou islamisés, sont en effet toujours en place. Quant à la réislamisation des sociétés, réelle, elle n’aurait en rien changé les règles du jeu politique ou économique (Mutin, 2009). Reste que le terreau social et culturel qui a vu naître la contestation islamiste dans son extrême diversité et dans ses invariants n’a pas vraiment changé et que les multiples expressions de cette poussée constituent toujours aujourd’hui une réalité centrale dans le monde arabe.
Solidarités primaires et ONG : une « société civile » contrastée
Autre phénomène en forte progression dans le monde arabe depuis le virage néolibéral et le désengagement graduel des États de leurs responsabilités sociales : les organisations non gouvernementales (ONG). Le phénomène, qui répond depuis le milieu des années 1980 à l’appellation d’origine occidentale « société civile », doit d’emblée être partagé en deux réalités distinctes, qui renvoient en effet à des dynamiques sociales de nature très différentes, que Sarah Ben Néfissa, parmi d’autres, nomme : ONG de services d’un côté, ONG de plaidoyer de l’autre (Ben Néfissa, 2003). Cela toutefois, sans nier l’émergence de certaines organisations qui empruntent aux deux modèles (Denoeux, 2003).
Les premières – les ONG de services –, de loin les plus nombreuses, oeuvrent dans la prise en charge sociale et sanitaire des victimes de l’affaiblissement des capacités distributives des États, voire de leur déliquescence là où crises aiguës ou guerres prévalent. Au service, selon les cas, des classes moyennes urbaines paupérisées, des populations rurales, des enfants…, elles affichent souvent une inscription religieuse, islamique ou chrétienne. Tantôt décriées pour leur tutelle financière ou pour leur priorité au curatif sur le préventif, au caritatif sur le politique, tantôt célébrées pour leurs modes d’action souples, efficaces, participatifs, elles se caractérisent aussi le plus souvent par leur profil « parapublic » ou « paraadministratif » (Ben Néfissa, 2003), trait particulier de la majorité des organisations civiles arabes.
Intermédiatrices entre les besoins des populations dont elles sont très proches et les offres de l’administration que leurs leaders courtisent ou dont ils émanent, ces ONG de services s’inscrivent « volontiers » dans une relation clientéliste avec les pouvoirs publics ou avec des parrainages privés plus ou moins affins au régime. Ce qui en fait à la fois des « espaces de construction de notabilités sociales et politiques » et des instruments en prise avec l’ordre étatique et la société (ibid., 2003). Des instruments populaires d’auto- organisation citoyenne, de survie et de pression sur les autorités dans certains cas ; des instruments para-officiels de contrôle et de pacification sociale dans d’autres. Leur ancrage local s’opère dans les groupes de solidarité primaire (familles, communautés, quartiers&hellip qui y collectent avantages et ressources diverses [3].
Les rapports des Nations unies font ainsi valoir le rôle essentiel et vital des ONG du monde arabe comme ultime filet de sécurité sociale. Et la tendance est d’autant plus vraie là où l’État est absent ou inexistant, comme dans le Liban de la guerre civile ou en Palestine. Elles réussissent peu en revanche, selon Asef Bayat, à dépasser leur rôle de secouriste, pour obtenir, par la mobilisation, des droits légitimes. « Les conditions socio-économiques au Moyen- Orient semblent plus propices à une forme particulière de militantisme » qui défie autrement l’ordre établi et la répression : « un nonmouvement populaire que je qualifie d’“empiétement silencieux de l’ordinaire” ». Allusion aux actions directes individuelles ou familiales qui visent à s’assurer – en catimini – le nécessaire de base : terre, abri, consommation collective urbaine, emplois informels et débouchés commerciaux (Bayat, 2000)…
La seconde grande catégorie d’ONG – les ONG de plaidoyer – se distingue assez nettement du profil type des ONG de services. Moins ancrées socialement, moins représentatives, les ONG de plaidoyer adoptent une posture plus revendicatrice, critique, politique, même si là aussi, dans certaines configurations, elles peuvent parfois servir pour les autorités arabes d’alibi démocratique aux yeux du monde occidental [4]. Petites structures, petits budgets dépendant de bailleurs de fonds étrangers « prodémocratie », animées plutôt par des universitaires, classes moyennes supérieures, élites urbaines, elles connaissent des fortunes diverses. Clairement plus exposés que les ONG de services, leurs militants, souvent bénévoles, font régulièrement les frais (intimidation, censure, emprisonnement, disparition&hellip de leurs engagements et dénonciations, de leur travail de sensibilisation et de lobbying pour le respect des droits humains.
Cela étant, dans certains pays comme l’Algérie où l’on a assisté à des glissements politico-sémantiques liés à la montée en puissance des mouvements islamistes, cette « société civile » de plaidoyer a pu aussi devenir « le symbole de l’alignement de partisans proclamés du pluralisme et de la démocratie sur les régimes, et de l’exclusion de la mouvance islamiste, accusée précisément de menacer la société civile » (Camau, 2002). Ailleurs, elle a épisodiquement donné lieu à des campagnes d’ampleur nationale, démontré ses capacités de mobilisation et sa force d’intervention dans l’opinion publique. Le plus souvent sur des enjeux de culture politique, de libertés civiles, d’émancipation des moeurs, à d’autres moments sur des revendications nationalistes, antiprivatisations, anti-impérialistes ou dans des ébauches de forums altermondialistes nationaux ou régionaux où l’on retrouve notamment des figures de la gauche intellectuelle et politique arabe, des leaders de mouvements islamistes tiers-mondistes, des ONG progressistes…
Ethnies et confessions minoritaires face aux États-nations arabo-musulmans
Une autre clé de lecture cruciale pour comprendre les tensions et les conflits sociaux, politiques et culturels à l’oeuvre dans le monde arabe réside dans le « fait minoritaire » (ethnique, tribal, linguistique, religieux&hellip fortement présent dans ou aux frontières des espaces territoriaux hérités de l’histoire de la région et de la colonisation. La substitution au cours du 20e siècle de l’État national centralisé, d’imitation européenne, à l’État multinational et multiconfessionnel de la période multiséculaire ottomane n’a pas effacé les anciennes structures sociales. Au contraire, dans la plupart des États postcoloniaux « modernisateurs », le poids de la segmentation « communautaire » et des hiérarchies traditionnelles a joué un rôle déterminant dans l’édification des systèmes clientélistes. La pyramide d’allégeances claniques de l’Irak de Saddam Hussein en constituait un exemple abouti.
À l’échelle de la région, l’Irak apparaît d’ailleurs comme le cas le plus complexe d’enchevêtrements confessionnels, tribaux, ethniques et linguistiques, tandis que le Maghreb a plutôt tendance à se caractériser par sa diversité ethnolinguistique mais par une forte unité religieuse, et l’Égypte, le Proche-Orient et la péninsule arabique par une forte cohérence linguistique mais une grande diversité religieuse (Mutin, 2009). Quelques exemples spécifiques suffisent à indiquer en quoi ces réalités identitaires occupent une place centrale dans les conflits civils et sociaux de la région.
Ainsi au Maghreb, si la question berbère est particulièrement importante au Maroc (presque 40 % des Marocains sont berbérophones), elle est surtout très sensible en Algérie (20 %) où les Kabyles ont dû longtemps faire le gros dos face au discours hégémonique de l’arabité. De « printemps berbère » (1980) en « printemps noir berbère » (2001), d’émeutes en soulèvements réprimés dans le sang, les mobilisations autonomistes y occupent épisodiquement le devant de la scène et articulent des revendications à la fois d’ordre culturel (c’est seulement en 2002 que le tamazight a été reconnu comme langue nationale), social (chômage massif, manque de logements) et politique (corruption, favoritisme administratif).
De l’autre côté de la Méditerranée, le Liban est un patchwork de communautés – une petite vingtaine de confessions sur un micro-État d’une superficie trois fois moindre que celle de la Belgique – soumis plus souvent qu’à son tour aux invasions et influences étrangères : turques, françaises, israéliennes, syriennes, états-uniennes, iraniennes… Si la répartition des communautés chrétiennes (maronites, grecques orthodoxes, grecques catholiques, arméniennes&hellip et musulmanes (sunnites, chiites, druzes&hellip comme de leurs organisations et mouvements respectifs n’y obéit plus toujours à des localisations géographiques précises, les clivages socio-économiques intercommunautaires restent très prégnants et surdéterminent le destin plus ou moins conflictuel des configurations politiques successives.
Aux confins de quatre États antagonistes – la Turquie, l’Iran et pour le monde arabe l’Irak et la Syrie –, la minorité kurde (30 millions de personnes) est, elle, orpheline d’un État. Non arabes mais majoritairement musulmans sunnites, les Kurdes d’Irak sont paradoxalement ceux qui ont enregistré les avancées politiques les plus fortes en termes d’autonomie au cours du 20e siècle et ceux qui ont été l’objet de la plus brutale répression. 200 000 d’entre eux furent massacrés par les militaires du Baath irakien entre 1974 et 1991 et 4 600 de leurs villages rasés. En cela, les Arabes chiites du sud irakien, victimes eux aussi de la répression massive du régime de Saddam Hussein, n’ont pas grand-chose à leur envier.
Pour autant, l’actuel Irak sous tutelle états-unienne, présidé depuis 2005 par l’un des deux leaders historiques rivaux du Kurdistan irakien (Jabal Talabani), n’en est pas moins une catastrophe humanitaire et une aberration politique. Durablement déchiré, sous perfusion, chaotique, il a effectivement enterré le régime précédent et bouleversé les rapports de force internes, mais il a plus fait avancer la cause de la sécurité d’approvisionnement pétrolier pour l’Occident que celle de l’émancipation des peuples de la région. Et si la région du Kurdistan irakien apparaît « gagnante » – bien que bénéficiant d’une prospérité essentiellement factice et circonstancielle –, la consolidation géopolitique du statu quo territorial laisse irrésolue la question kurde dans son ensemble.
Conclusion
Juste évoquées ici, chacune des lignes de fracture qui traversent le monde arabe plongent ses racines dans l’histoire de la région, dans les colonisations et les interventions étrangères dont elle a été et est toujours l’objet et dans les caractéristiques physiques et géologiques de cet espace qui se déploie sur deux continents. Culturels, socio-économiques, politiques, les facteurs d’affrontements sont légion. Et s’il en est un, peu discuté dans cet éditorial parce qu’« extérieur » aux États arabes, qui a beaucoup servi, au Maghreb et au Moyen-Orient, non seulement à mobiliser la solidarité panarabe – républiques et monarchies confondues –, mais aussi à masquer, taire, neutraliser, instrumentaliser les contestations internes, à ressouder les opinions publiques contre un ennemi commun, c’est le conflit israélo-palestinien. Conflit – occupation et colonisation – forcément surdéterminant dans la structuration spécifique des acteurs sociaux palestiniens (Fenaux, 2009).
L’inégal accès aux ressources naturelles est une autre ligne de fracture béante du monde arabe. Elle distingue les pays, les régions et les groupes sociaux riches en pétrole, en eau ou en terres arables de ceux qui n’en ont pas ou en manquent cruellement. Au-delà, l’avenir problématique de la rente pétrolière, les pénuries d’eau et l’explosion de la dépendance alimentaire [5] ne risquent pas d’atténuer les tensions sociales croissantes et les vagues d’émeutes urbaines qui, sporadiquement, mettent en cause « la cherté de la vie ». Comment les régimes en place – dont la longévité cumulée atteint désormais des records mondiaux – y feront-ils face ? Les tendances actuelles – une approche sécuritaire des questions sociales et politiques, intensifiée au nom de la « guerre contre le terrorisme » sous tutelle étrangère – ne laissent rien augurer de bon.
Hors de la répression ou de l’encadrement, les mouvements sociaux pourraient s’autonomiser et gagner en centralité. L’effervescence citoyenne par le bas, parfois subversive à l’égard des élites publiques et privées, rebat déjà les cartes de la « cohabitation » entre groupes sociaux en quête de droits et autorités arcboutées sur leur stabilité (Bozzo et Luizard, 2009). L’unité dans la diversité des communautés devra passer par la reconnaissance des différences, l’égalité de condition et le partage du pouvoir, pour échapper aux replis identitaires meurtriers. Certains observateurs insistent sur l’existence d’un « postislamisme » à l’oeuvre dans ces mouvements qui, en rupture avec l’exclusivisme religieux doctrinaire et les crispations réactionnaires, conjuguent l’islam et la démocratie, valorisent « les droits plutôt que les obligations, le pluralisme plutôt que l’autorité d’un seul, l’historicité plutôt que des dogmes figés, l’avenir plutôt que le passé » (Bayat, 2007).
Prophétique, Hicham Ben Abdallah El Alaoui annonce, lui, dans Le Monde diplomatique la naissance d’un « troisième nationalisme », au-delà du « nationalisme postcolonial traditionnel, fossilisé dans les vieux régimes autoritaires » et du nationalisme islamiste conservateur, reposant sur un absolutisme religieux. Il s’agit d’« un autre type de nationalisme, séculariste mais se réclamant de l’identité panarabe et panislamique, fier du brassage avec les cultures et les langues du monde. […] Il marque l’imaginaire d’une grande fraction de notre jeunesse, se reflète dans les nouveaux moyens de communication, dans les réseaux qui lient les diasporas à leurs pays d’origine, et dans les formes profanes de la culture et de la langue qu’ils permettent. […] Il condamne l’autoritarisme local et la corruption, aspire à l’établissement de la démocratie, rejette fermement toute intervention militaire étrangère, défend fièrement l’identité arabe et islamique, prône modernisme intellectuel et diversité culturelle » (2009). Exit, donc, le nationalisme de papa et celui des imams ? Ben Abdallah tempère, en invitant à « se méfier d’un optimisme trompeur »…
Bibliographie
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Documents joints
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Notes
[1] Figure historique du nationalisme arabe et du protagonisme tiers-mondiste, Gamal Abdel Nasser a dirigé l’Égypte de 1954 à sa mort en 1970.
[2] Le Baath – parti socialiste de la « renaissance » (pan)arabe – a été fondé en Syrie dans les années 1940. Au pouvoir en Syrie de 1963 à nos jours. Au pouvoir en Irak en 1963 et de 1968 à 2003.
[3] « La société civile apparaît à cet égard comme une ressource des régimes et de leurs systèmes d’alliance et d’opposition à géométrie variable selon les conjonctures. Suivant qu’il s’agira de passer un compromis avec l’“activisme” ou de le réprimer, de pratiquer la politique du bâton ou celle de la carotte, la société civile sera “présente” comme arme ou comme appât […]. La “présence” sera incarnée par des individus ou des groupes cooptés, représentants autoproclamés de la société civile, devenus parties prenantes des “compromis avec exclusion” » (Camau, 2002).
[4] « La société civile contribuerait à leur conférer une plus grande “civilité” par une sorte de capillarité contrôlée et sans risque d’irruption d’une alternative politique contraignante » (Camau, 2002).
[5] Les pays arabes (5 % de la population mondiale) sont en passe d’absorber à eux seuls 20 % des exportations mondiales de biens alimentaires (Mutin, 2009). Principaux fournisseurs du monde arabe : les États-Unis, le Canada et l’Union européenne.
Cet article a été publié dans Etat des résistances dans le Sud 2010 - Monde arabe / www.cetri.be