Pourquoi nos ouvreurs n'ont pas la confiance des sélectionneurs ?

Publié le 11 février 2010 par Pierre Salviac

A la Humphrey Perkins School de Barrow on Soar (Prטs de Leicester) oש j’ai dיcouvert le rugby le Professeur qui enseignait ce jeu disait : "Le rugby c’est un demi d’ouverture et 14 joueurs autour". Je n’יtais probablement pas assez douי pour faire un 10 car j’ai plus souvent יtי positionnי prטs de la touche. Plus souvent א l’extיrieur cפtי juge qu’א l’intיrieur qu’א l’intיrieur cפtי ailier. En tout cas jamais on m’a fait l’honneur du rond point, lא oש l’ouvreur inspire le jeu. Cette frustation א nourri en moi un intיrךt particulier pour le poste de demi d’ouverture.

En lisant le Sunday Times de ce dimanche je suis tombי sur un article du chroniqueur Stephen Jones s’יtonnnant de l’incapacitי des sיlectionneurs franחais א faire un choix sur un demi d’ouverture et א s’y tenir. Il constatait notamment qu’en 21 matches depuis son entrיe en fonction Marc Liטvremont avait changי 11 fois de demi d’ouverture. Pas moins de 6 ouvreurs ont יtי sollicitיs par le sיlectionneur actuel du Xv de France. Et en 7 occasions il n’a donnי qu’une seule chance au titulaire de son choix. Les 6 ouvreurs franחais de l’טre Liטvremont listיs par le chroniqueur britannique sont : Trin-Dhuc, Boyet, Traille, Skrela, Beauxis et Baby.

Mon confrטre britannique note que cette incapacitי chronique א faire confiance א un ouvreur n’est pas une spיcificitי Liטvremont. Elle est culturelle. Il ne comprend pas pourquoi notre pays gיniteur d’aussi brillants joueurs de rugby entretient avec ses ouvreurs des relations du type "Je t’aime moi non plus". Pour trouver un 10 franחais auquel un sיlectionneur a donnי sa chance 10 matches de suite il faut remonter א Didier Cambיrabיro dans les annיes 90 et א Lescarboura dans les annיes 80.

Stephen Jones pousse la recherche jusqu’א constater que parfois le sיlectionneur de l’יquipe de France est allי jusqu’א sיlectionner 5 ouvreurs diffיrents la mךme annיe calendaire. Et depuis 1960 il compte cent numיros 10 auxquels nos sיlectionneurs ont donnי leur chance une fois et les ont remplacי.

C’est vrai que, comparי aux autres nations, le rapport de nos sיlectionneurs avec ce poste si stratיgique de demi d’ouverture est troublant. De la Coupe du Monde 99 א la Coupe du Monde 2003 Wilkinson a יtי l’inamovible ouvreur de l’Angleterre. De 2007 au dernier match du Tournoi 2009 O’Gara a יtי le premier choix des sיlectionneurs irlandais 20 matches d’affilיe. Stephen Jones a יtי l’inamovible ouvreur lors des Tournois 2004, 2005 (Grand Chelem), 2006. Et en 2007 c’est sur blessure qu’il a perdu sa place pour le dernier match contre l’Angleterre.

Quand Michalak est arrivי א l’ouverture du XV de France en 2001 on le croyait parti pour durer 10 ans א ce poste. Aujourd’hui il cire le banc. Et quand il entre en jeu c’est pour jouer en 9.

Bref, pourquoi cette malיdiction sur les ouvreurs de l’יquipe de France ? Stephen Jones continue de s’interroger. J’ose une explication. Dans les מles britanniques ce qui guide les sיlectionneurs dans le choix du 10 c’est sa capacitי א rיussir les tirs aux buts. Il doit approcher le 100% א chaque match. En France l’ouvreur est choisi pour son aptitude א dיstabiliser les dיfenses adverses et pour sa capacitי א dיplacer le jeu au pied. Si dans les מles britanniques l’ouvreur est la plupart du temps celui qui est chargי des tirs aux buts ce n’est pas le cas en יquipe de France. Dans ces conditions l’ouvreur franחais est fragilisי par rapport l’ouvreur anglais (Wilkinson), irlandais (O’Gara) gallois (Jones).

On peut aussi יvoquer la pיnurie d’ouvreurs de classe internationale dans notre pays. Dans la plupart des clubs de Top 14 les ouvreurs titulaires sont יtrangers : Perpignan, Clermont, Castres, Stade Franחais, Toulon. L’exception est Toulouse. Mais dans ce club il n’y a que des 9 et demi ! Consיquence de cette politique des clubs : c’est l’יquipe de France qui trinque. Comme trinquait l’יquipe de France de Basket dans les annיes 70 quand tous les pivots de notre championnat יtaient amיricains.