et cette petite vie
chante sous l’hiver déchaîné
- flocons flaques et pieds glacés –
présence têtue
que rien ne peut faire dévier
de son projet palpitant et cru
ce champ vert de neige
entraperçu dans le soir apaisé
figure un lac au bleu masqué
dans lequel je devine
des enfants hardis d’autrefois
qui pagaient contre la nuit
remontant sous le vent
ce sont mes frères mes amis
qui me saluent du fond des eaux
espérance jamais perdue
de les revoir glisser des arbres
jambes griffées par le gel de février
hors des souffrances
négligeant la glace et la bise crasse
ils s’exaltent sans gants ni bonnets
de vivre au présent
de jouer aux voleurs dans les branches
qui de leurs craquements couvrent les cris
l’enfance toujours
sous la mêlée des neiges graves pures
c’est le temps rude des écorchements
ils rient les bougres
de l’eau glacée jusqu’aux faîtes oscillants
contant les exploits dont je me suis exclu
la vie ma vie
les joues rouges des visages neufs engloutis
sous la neige des temps aux rues vides
asphaltes glissées
où encore trébuchant presque vieux
je souris d’avoir croisé tant d’insouciance